Les investisseurs filent le parfait bonheur. Depuis le creux du 9 mars dernier, la Bourse a explosé d'environ 30% au Canada et aux États-Unis. Cela se reflète dans les résultats de fonds communs de placement.

Par exemple, les détenteurs de fonds d'actions canadiennes ont gagné 7,4% en avril, après un bond de 7,9% en mars (tableau des rendements). En deux mois, ils se sont enrichis de 16%. Quant aux porteurs de fonds équilibrés, ils ont repris 9% depuis deux mois, selon les données préliminaires de la firme d'évaluation de fonds Morningstar Canada.

«Wow! C'est assez phénoménal comme rendement sur deux mois», s'est exclamé Christian Charest, rédacteur en chef de Morningstar Canada. Toute l'industrie est portée par la vague: 20 des 24 catégories de fonds d'actions ont grimpé de plus de 5% en avril, exactement comme en mars.

Cette forte remontée apporte un baume aux investisseurs courbaturés. Mais elle ne leur permet pas de se relever complètement de leur culbute. En effet, les fonds d'actions canadiennes avaient déboulé de 40% au cours des six mois précédents (septembre 2008 à février 2009). Les fonds équilibrés s'étaient affaissés de 21% durant cette période.

Soulignons que le pourcentage d'un rebond, calculé à partir d'un niveau déprécié, paraît toujours plus important que celui d'une baisse, calculé à partir du sommet.

Ainsi, lorsque la Bourse baisse de moitié (-50%), elle doit ensuite doubler ("100%) pour récupérer tous les points perdus.

Fini les soins intensifs

Même si les investisseurs n'ont pas fini de panser leurs plaies, au moins ils sont sortis des soins intensifs. «Jusqu'au 9 mars, on anticipait presque la fin du monde», rappelle François Bourdon, vice-président et chef des placements adjoint chez Fiera Capital.

Il y a eu un tournant, à la mi-mars, lorsque la Réserve fédérale américaine a annoncé qu'elle redémarrerait la planche à imprimer des billets, pour injecter une dose d'adrénaline dans le système financier. Ce geste a confirmé que l'État ne laisserait pas le système tomber en déroute, note M. Bourdon.

Le ciel économique reste sombre. Mais les investisseurs guettent maintenant à l'horizon le moindre signe d'éclaircie.

«Il y a de moins en moins de mauvaises nouvelles qui ont une traction sur les marchés, et de plus en plus de petites nouvelles qui font grimper la Bourse», observe Luc Girard, directeur du Groupe de conseil en portefeuilles de Valeurs mobilières Desjardins.

Même si les ratés des constructeurs automobiles font la manchette, la Bourse se concentre sur une reprise économique en 2010. Pour profiter de l'éventuel rebond, les investisseurs cherchent sur les meilleurs tremplins.

Le goût du risque

Depuis deux mois, ce goût du risque a donné des ailes aux fonds d'actions mondiales de petites entreprises ("25%), aux fonds de pays émergents ("23%), et aux fonds spécialisés en technologie ("19%).

Mais ce sont les fonds d'actions de services financiers qui dominent le palmarès des meilleurs rendements, avec un envol de 30% depuis deux mois. Cette catégorie avait perdu 52% au cours des six mois précédents.

L'appétit pour le risque s'est aussi reflété sur le marché obligataire. Les investisseurs ont décidé de se mouiller un peu plus avec les obligations d'entreprises. Ces titres versent un rendement plus élevé que les obligations gouvernementales, mais ils comportent un plus grand risque de défaillance. Ainsi, les fonds d'obligations à rendement élevé ont avancé de 6% en avril, semant les fonds d'obligations canadiennes qui ont fait du surplace ("0,4%).

Les investisseurs ragaillardis ont délaissé les secteurs plus défensifs, c'est-à-dire ceux qui résistent le mieux à un ressac de l'économie, et qui leur avaient servi de refuges durant la tempête. En conséquence, les fonds d'actions spécialisés en soins de santé traînent en queue de peloton ("2,5% sur deux mois).

Mais ce sont les fonds spécialisés dans l'or, valeur refuge par excellence, qui ont le plus souffert, avec un recul de 11% en avril et de -1,9% sur deux mois, les rendements les plus faibles de l'industrie dans les deux cas.