Aucun achat de terrain à des fins de construction résidentielle n’a été effectué dans l’île de Montréal depuis deux mois, constate un spécialiste des transactions de terrains. Pareille apathie n’augure rien de bon pour l’ajout de logements à l’avenir, au moment où le marché a cruellement besoin de nouvelles habitations.

Zéro, c’est le nombre de terrains résidentiels qui ont changé de mains en avril et mai dans l’île de Montréal. Du jamais-vu, selon l’expert qui a colligé ces données. Il restait cinq jours avant la fin du mois, au moment d’écrire ces lignes.

« Les ventes de terrains interviennent environ 18 mois avant les mises en chantier, afin de tenir compte des délais d’obtention de permis, dit Simon G. Boyer, PDG de Landerz, une agence immobilière qui scrute toutes les transactions de terrains dans la région montréalaise depuis près de deux ans. De faibles ventes aujourd’hui signifient des mises en chantier anémiques dans 18 mois », soutient-il.

Ce sont de bien mauvaises nouvelles pour ceux qui sont à la recherche d’un logement. La rareté d’offre dans un contexte où la demande est soutenue a pour effet de faire bondir le prix. Ça se traduit par des maisons et des condos devenus inabordables et par des augmentations de loyer salées.

La Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) prévoit déjà que le loyer moyen va augmenter de 30 % dans la région montréalaise d’ici 2025. « Il y a lieu de se demander si la situation ne sera pas en réalité pire que ce qui est annoncé », se demande aujourd’hui M. Boyer. Sa firme, Landerz, fait paraître chaque mois Marketwatch, qui recense tous les achats de terrains.

De son côté, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) s’attend à une baisse de 40 % dans les mises en chantier de logements locatifs au Québec cette année. La province connaît un déficit de 100 000 habitations, selon cet organisme.

Pour M. Boyer, si les promoteurs capitulent, la crise du logement va s’amplifier, à moins que les décideurs politiques ne choisissent de prendre des décisions courageuses. « Il est critique d’offrir plus de prévisibilité sur le potentiel de développement des sites en offrant un zonage de plein droit. Trop de projets doivent encore passer par des processus d’adoption de projets particuliers, souvent soumis au processus référendaire. »

Baisse marquée

La tendance baissière dans la valeur des transactions de terrains remonte à un an et coïncide avec la remontée des taux d’intérêt.

Dans l’île de Montréal, la valeur des transactions de terrains à vocation résidentielle a chuté de 82 % en un an. Ce n’est guère mieux dans la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) dans son ensemble, où la baisse est de 79 %.

En mai 2022, la valeur de la moyenne mobile de 3 mois des transactions de lots résidentiels s’élevait à 53,5 millions dans l’île. En avril dernier, toujours selon une moyenne mobile de 3 mois, on est tombé à 9,7 millions, calcule la firme Landerz. Dans la CMM, les chiffres équivalents sont passés de 142,4 millions à 30,3 millions au cours de la même période.

En savoir plus
  • 7 millions
    Valeur de la transaction multirésidentielle la plus importante survenue en avril dans la région montréalaise. Il s’agit d’un terrain de 25 000 m⁠2 situé à la Croisée urbaine, dans le secteur est de la ville de Terrebonne, entre les autoroutes 640 et 40, près de l’hôpital Pierre-Le Gardeur.
    SOURCE : Landerz