L’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) déconseille à la Ville de Montréal d’aller de l’avant avec l’abaissement des hauteurs permises pour la Tour 6 du Square Children, site de l’ancien Hôpital de Montréal pour enfants, et sermonne au passage l’administration pour son manque de collaboration.

L’organisme de consultation déplore l’absence de projet et d’échéancier justifiant la modification demandée. « Il demeure difficile d’envisager à quelles fonctions le lot servira », écrivent les commissaires dans leur rapport paru le 29 août.

Cette tour, d’une hauteur initiale prévue de 20 étages, devait accueillir 174 logements sociaux. Elle n’a pas été construite, la Ville et High-Rise Montréal ne s’entendant pas sur le coût de construction. Le promoteur a plutôt choisi de payer la pénalité de 6,235 millions prévue à son contrat avec la Ville pour se libérer de l’obligation d’intégrer ces logements.

La Ville a riposté en abaissant les hauteurs permises pour le lot de 20 à 4 étages. High-Rise poursuit d’ailleurs la mairesse Valérie Plante et la Ville pour 20 millions pour expropriation déguisée.

La justification de la Ville est d’assurer un meilleur ensoleillement des espaces publics et une intégration architecturale plus judicieuse du futur bâtiment avec la Maison des infirmières voisine.

Il s’agit de la seconde consultation publique au sujet du Square Children. La première est survenue en 2017 et portait sur l’ensemble des six tours du site.

Une modification qui nuit aux logements sociaux

La commission présidée par Nicole Brodeur retient que si l’abaissement du zonage à quatre étages devenait réalité, cette modification viendrait empêcher pour de bon la construction de logements sociaux au Square Children, pourtant le but souhaité par tous publiquement.

« Il paraît cependant peu vraisemblable ne serait-ce que sur le plan de sa rentabilité financière que des logements de cette catégorie soient construits, compte tenu du nombre d’étages permis par la modification réglementaire », lit-on à la page 20 du rapport de 32 pages comptant trois recommandations.

Dans ce rapport, l’Office ne se gêne pas pour critiquer le comportement de la Ville dans le dossier, ce qui a nui à la qualité de la consultation publique.

« Mandaté en septembre 2019 par le conseil municipal, l’OCPM a dû attendre près de deux ans avant de pouvoir mettre à la disposition du public la documentation nécessaire à la tenue de cette consultation. Cette information, produite par la Ville, était limitée. La commission évalue que faute d’une information complète, claire et accessible, la consultation ne s’est pas déroulée dans les conditions de transparence, de sérénité et de confiance auxquelles les participants auraient été en droit de s’attendre », écrit la nouvelle présidente de l’OCPM, Isabelle Beaulieu, dans la lettre de présentation du rapport qu’elle adresse à la mairesse et à la présidente du comité exécutif, Dominique Ollivier, elle-même présidente de l’OCPM de 2014 à 2021.

La Presse avait mis en relief le caractère inédit de cette consultation publique dans un article de novembre 2020.

Lisez l’article « Un an et demi pour tenir la consultation publique »

Réactions

« Je suis très heureux de constater que l’OCPM n’a pas été dupe des représentations frivoles de la Ville », fait savoir Sarto Blouin, porte-parole du promoteur High-Rise Montréal (HRM).

« La commission considère qu’adopter un règlement sans projet, sans échéancier et sans crédibilité mérite d’être sanctionné par une fin de non-recevoir, appuyant ainsi sa conclusion-phare de recommander de ne pas adopter cette modification réglementaire », poursuit-il.

De son côté, la Ville prend acte du rapport. « Nous sommes tout aussi déçus que les citoyens que la tour de logements sociaux n’ait pas vu le jour dans le projet du Children, a indiqué par écrit Marikym Gaudreault, attachée de presse du comité exécutif. Mais une chose est certaine, le contrat social de 2017 n’est plus respecté sans logement social. Nous avons pris connaissance des mémoires déposés et du rapport de l’OCPM et nous confirmerons sous peu les prochaines étapes dans ce dossier. »

« L’administration Plante fait preuve d’entêtement, a réagi Aref Salem, chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville de Montréal. Elle doit changer d’approche, retourner à la table de négociations et trouver un compromis avec le promoteur pour le bien-être des citoyens et citoyennes. »

La Ville renonce à 6 millions pour avoir un square Cabot plus ensoleillé

La saga entourant la Tour 6 du Square Children fait se multiplier les factures et le manque à gagner à l’hôtel de ville de Montréal. En modifiant le zonage de 20 à 4 étages, l’administration Plante renonce au paiement de la pénalité de 6 millions que devait payer le promoteur, « le tout afin de garantir un site moins chargé et plus harmonieux du point de vue urbanistique, notamment quant à l’ensoleillement et à l’intégration architecturale ». De plus, la Ville fait face à une poursuite de 20 millions de la part du promoteur pour laquelle l’administration municipale est défendue par le cabinet Gagnier, Guay, Biron. La modification a aussi déjà entraîné un remboursement de taxe foncière de l’ordre de 127 000 $ en faisant baisser la valeur du lot concerné. La Ville refusait d’ajuster la valeur du terrain avant d’y être contrainte par le Tribunal administratif du Québec le 24 mai dernier, devant qui elle était représentée par le même cabinet.