Dans l’infolettre L’argent et le bonheur, envoyée par courriel le mardi, notre journaliste Nicolas Bérubé offre des réflexions sur l’enrichissement, la psychologie des investisseurs, la prise de décisions financières. Ses textes sont repris ici les dimanches.

Olivier Primeau, l’homme d’affaires québécois copropriétaire du Beachclub de Pointe-Calumet, a fait parler de lui récemment pour un investissement de 3 millions qu’il vient de faire dans une petite entreprise qui détient des permis de captage d’eau souterraine au Québec.

L’entreprise ne capte pas d’eau, mais dit être positionnée pour bien profiter d’un éventuel intérêt pour l’eau du Québec.

Inscrite en Bourse, l’entreprise en question, Dominion Water Reserves (DWR), est une action cotée en cents (penny stock en anglais). Les entreprises dont l’action est cotée en cents sont l’équivalent financier d’être assis dans les derniers bancs au fond de l’autobus scolaire, loin du regard du chauffeur. Les entreprises qui s’y trouvent sont moins réglementées, n’ont pas fait leurs preuves et sont risquées.

J’ignore si M. Primeau deviendra le Jeff Bezos de l’eau du Québec, ou si son aventure n’aboutira à rien, ou quelque chose entre les deux.

Ce que je sais, c’est que ce battage médiatique a fait passer le cours de l’action de DWR de 0,10 $ à 0,20 $, une hausse de 100 % en quelques jours. Ce qui veut dire que bien des gens ont décidé d’embarquer dans l’aventure de l’eau.

Les actions cotées en cents peuvent donner à ceux qui s’y intéressent l’impression d’être des pionniers. Comme si on prenait un seau, une pelle, et qu’on partait pour des terres éloignées à la recherche d’or.

Et c’est exactement ce qu’elles sont.

Le problème avec le fait de spéculer avec les actions cotées en cents est que les risques de subir des pertes catastrophiques sont beaucoup plus élevés que les chances de faire un profit.

Si vous croyez que les marchés financiers sont volatils cette année, c’est que vous n’avez pas jeté un coup d’œil au marché des actions cotées en cents.

L’indice du CSE, qui représente la majorité des actions cotées en cents au Canada, a perdu plus de 50 % de sa valeur depuis le début de l’année, contre 14 % pour la Bourse de Toronto.

Si je mets mes lunettes de gars positif, je me dis que les gens qui achètent des actions de DWR savent qu’ils spéculent. Ils peuvent le faire parce qu’ils ont fini de payer leur hypothèque, ont fait 100 % des cotisations dans les REEE de leurs enfants, que leur CELI et leur REER sont remplis, que leur véhicule est payé, et qu’ils ont assez d’argent pour arrêter de travailler demain matin s’ils le voulaient et qu’ils s’amusent à spéculer dans les actions cotées en cents pour se changer les idées entre deux massages thaïlandais et séances de yoga chaud.

Mais quelque chose me dit que ce n’est pas le cas.

L’appât d’un gain rapide est puissant sur les marchés financiers. Historiquement, les larmes ont été beaucoup plus nombreuses que les cris de joie dans cet univers.

Pour 99 % d’entre nous, la stratégie à mettre en place pour s’enrichir consiste à investir son argent dans un portefeuille diversifié composé de fonds négociés en Bourse (FNB) indiciels, c’est-à-dire qui contiennent les actions de milliers d’entreprises. Pourquoi ? Parce que si une de ces entreprises devait avoir des problèmes et faire faillite, cela n’affecterait pas la valeur de la moyenne. Ça nous éviterait aussi d’être pris avec toutes nos billes dans un secteur problématique ou qui vit un déclin à long terme.

Il est possible de commencer à investir avec un seul dollar sur des plateformes de courtage en ligne, dont Wealthsimple Invest, RBC Investi-Clic, Placements Idema, Questrade Placements Autogérés, et bien d’autres. En quelques clics, ces plateformes peuvent bâtir un portefeuille qui comprend aussi des obligations, qui sont des actifs financiers moins volatils que les actions, et qui aident à garder la tête froide lors d’une correction boursière, comme celle que l’on vit actuellement.

Une fois établi, un portefeuille équilibré n’a besoin que d’une chose : qu’on le laisse travailler en paix.

Dix mille dollars investis dans un portefeuille équilibré à la naissance de mon fils valent aujourd’hui 21 000 $. Investis à ma naissance, ils valent 483 000 $. Investis à la naissance de mon père, ils valent 7 600 000 $. À la naissance de mon grand-père : 85 millions.

Réussir en investissement ne veut pas dire d’avoir une performance éclatante à court terme. Réussir en investissement veut dire de rester debout, la tête hors de l’eau, le temps de voir nos actifs travailler plus fort qu’on ne pourra jamais le faire.

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