Monique* avait un plan de décaissement de retraite, mais le comptable qui l’a fait vient d’être radié.

La situation

Pour avoir l’esprit tranquille, Monique, 63 ans, s’est fait faire un plan de décaissement détaillé par un comptable. Une somme de 800 $ bien investie, croyait-elle. Or, elle vient d’apprendre que le comptable en question a été radié de son ordre.

« Il est maintenant un leader du mouvement complotiste, écrit-elle. J’ai perdu confiance dans ce plan et, là, je ne sais plus comment organiser mes années de retraite. »

« J’hésite à remettre de l’argent dans un autre plan », poursuit-elle.

Angoissée, Monique a été soulagée d’apprendre qu’un planificateur allait l’aider à organiser financièrement ses prochaines années. D’autant plus qu’en ce moment, ses placements ont baissé… comme pour bon nombre de retraités.

« J’arrive présentement à ne rien retirer, donc je ne vois pas ça comme une perte », dit-elle avec une touche d’optimisme.

« J’ai recommencé à travailler à temps partiel pour m’assurer une sécurité financière et aussi pour aider un organisme communautaire. »

Monique est célibataire et sans enfant. Elle habite l’appartement d’un duplex dont elle est copropriétaire avec sa sœur. « Nous souhaitons y demeurer le plus longtemps possible. Nous avons une entente notariée qui spécifie qu’en cas de décès nous héritons de la part de l’autre. »

Les chiffres

Monique, 63 ans

Revenu d’appoint : 17 000 $
Pension annuelle de son ex-employeur : 11 000 $ et 7136 $ (à 65 ans)
RRQ : 7045 $
REER : 109 200 $
CELI : 21 700 $
Placements non enregistrés : 10 000 $
Duplex, évaluation municipale : 300 000 $
Droits de REER non utilisés : 31 000 $
Coût de vie : 26 000 $

Les conseils

Antoine Chaume, planificateur financier et conseiller en sécurité financière chez Lafond+Associés, a fait l’analyse du dossier de Monique.

Un premier élément lui saute aux yeux : 52 % des actifs de la retraitée sont mobilisés dans son duplex.

« Quand on a une proportion importante de ses actifs dans sa propriété, c’est sûr qu’un jour il y aura un choix difficile à faire pour soutenir son niveau de vie. »

Avec un coût de vie de 26 000 $ par année, Monique aura épuisé ses économies en 2042, à 83 ans. Elle devra donc trouver de 10 000 $ à 12 000 $ par année.

Trois possibilités s’offriront alors : vendre pour se loger ailleurs, aller chercher une marge de crédit hypothécaire ou obtenir une hypothèque inversée, explique le planificateur.

Actuellement, même si elle est retraitée, Monique réussirait potentiellement à se qualifier pour la marge de crédit hypothécaire, car elle a des revenus de travail d’appoint de 17 000 $ par année, en plus des revenus de son régime de retraite provenant de son ancien employeur.

Une marge de crédit hypothécaire permet d’aller chercher des sommes d’argent sans vendre la propriété.

« C’est à vérifier avec son institution financière, mais elle pourrait probablement obtenir une marge de crédit de 97 500 $ », indique Antoine Chaume.

« Ça signifie qu’elle pourrait financer elle-même son coût de vie pendant 10 ans avec des retraits de 10 000 $ par année. »

Cependant, si elle choisit cette option, elle doit prendre une décision assez rapidement. Car lorsqu’elle cessera de travailler, elle ne se qualifiera plus, soutient Antoine Chaume. « Si elle veut rester dans cette maison le plus longtemps possible, je lui conseille de prévoir le coup en amont et d’aller se chercher une marge de crédit hypothécaire pendant qu’elle travaille encore. »

Attention aux prêteurs de deuxième rang qui vont donner un taux de 10 %, « ce qui n’a pas de bon sens », soutient le planificateur.

« Mon conseil le plus important est le suivant : si tu es capable de planifier aujourd’hui pour avoir un plus gros coussin demain, soit une marge de crédit hypothécaire, prends les actions aujourd’hui. Ça ne coûtera que les frais de notaire. »

Dans l’éventualité où Monique est encore autonome à 83 ans et n’a pas de marge de crédit hypothécaire, sa seule option pour garder le duplex sera l’hypothèque inversée.

« Ici, c’est de l’intérêt composé qui va gruger des sommes de son capital », explique Antoine Chaume.

Décaissement

Si elle n’avait pas eu de fonds de retraite, une stratégie de décaissement de REER aurait pu être élaborée pour obtenir le Supplément de revenu garanti jusqu’à la fin de sa vie, indique le planificateur financier. « Mais elle a la chance et l’opportunité d’avoir un fonds de pension », souligne-t-il.

Comme elle a des revenus d’emploi de 17 000 $ par année, Monique est encore admissible aux REER de la FTQ et de la CSN jusqu’à 65 ans. « Je lui recommande de cotiser 5000 $ avec ses droits inutilisés pour obtenir le crédit d’impôt. C’est une façon vraiment facile d’aller chercher 1500 $ chaque année. Tu ne travailles pas plus pour cet argent-là. »

Considérant ses revenus fixes de fonds de retraite, Monique doit décaisser ses placements de façon à niveler le taux d’imposition au fil des années.

« Elle a son objectif de retraite à 26 000 $ indexé. Si on regarde ses revenus totaux, on va vouloir toujours rester dans les fourchettes d’imposition marginales les plus basses, soutient le planificateur financier. Ce qui fait en sorte qu’on n’a pas des montants plus importants à payer en impôts certaines années. »

« Les revenus bruts au fil des ans ne dépasseront jamais 28 % dans le tableau d’imposition marginal, car elle sera sous les 46 000 $ de revenus », précise-t-il.

Les premières années, Monique pourrait laisser fructifier ses REER et décaisser au besoin son compte non enregistré ou son CELI en dernier recours.

Quand elle cessera de travailler à temps partiel, elle pourra décaisser des REER qui seront transformés en FERR à 71 ans. À partir de cet âge, Monique devra de toute façon sortir une somme minimum de FEER chaque année.

« Je conseille de prioriser le nivellement des retraits REER-FERR de 2023 à 2040 pour s’assurer de rester vraiment au taux marginal de 28 %. »

« Pour ce qui est de son portefeuille équilibré et conservateur, poursuit Antoine Chaume, l’année a été difficile pour ce qui est des marchés, tant pour les actions que pour les obligations. Même les stratégies très conservatrices ont été touchées par la hausse des taux d’intérêt qui touche négativement la valeur du portefeuille de revenus fixes. »

« Présentement, il n’y a pas d’endroit où se cacher à la Bourse. Je lui suggère donc de s’assurer d’avoir une tranche de liquidités pour garantir au moins une année de décaissement, ce qui réduit le risque de vendre un investissement au mauvais moment. Dans une telle année de volatilité, il faut s’armer de patience et suivre la vague. »

En attendant, si Monique en a l’énergie et l’envie, elle pourrait continuer de travailler un an de plus. « Ça va à coup sûr aider à soutenir son niveau de vie. »

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, le prénom utilisé est fictif.