François*, 59 ans, et sa femme Christiane*, 53 ans, projettent de se retirer de leur emploi à temps plein d’ici trois à cinq ans.

La situation

En planification financière de cette retraite, François pourra compter sur un actif substantiel déjà accumulé dans le REER collectif chez son employeur, ses comptes REER et CELI personnels, ainsi que ses placements en immobilier locatif.

La valeur nette de ce patrimoine personnel de François est estimée à 1,19 million, en excluant sa part de la valeur nette de la maison qu’il habite avec sa femme.

En comparaison, sa femme Christiane ne bénéficie pas d’un régime de retraite ou d’un REER collectif chez son employeur. Aussi, son patrimoine personnel en comptes REER et CELI, ainsi qu’un placement en immobilier locatif, se chiffre aux environs de 386 000 $ en valeur d’actif nette, en excluant sa part de la maison.

Quant à leur situation budgétaire, François et Christiane bénéficient de revenus d’emploi et de loyer immobilier qui totalisent environ 147 000 $ par an, avant impôts.

Ils mènent un train de vie raisonnable qu’ils estiment à environ 60 000 $ par an. Cette somme se partage ainsi : environ 10 000 $ liés à leurs coûts résidentiels et environ 50 000 $ liés à leurs dépenses personnelles.

Par ailleurs, fidèles à leurs habitudes d’épargne-retraite, François et Christiane dirigent chaque année pour environ 18 000 $ en contributions vers leurs REER et CELI respectifs.

Les chiffres

François, 59 ans

Revenus : Salaire d’emploi : 80 000 $ Revenus locatifs nets : 5000 $ Actifs financiers : REER collectif d’employeur : 270 000 $
REER personnel : 288 000 $
CELI : 115 000 $
Compte non enregistré : 156 000 $
Actifs non financiers : 50 % de la maison familiale : 200 000 $
50 % d’une terre agricole en location : 200 000 $
25 % de trois chalets locatifs : 150 000 $ Passif : 25 % des hypothèques des chalets locatifs : 70 000 $
Valeur nette des actifs personnels : 1,3 million

Christiane, 53 ans

Revenus : Salaire d’emploi : 60 000 $
Revenus locatifs nets : 2500 $
Actifs financiers : REER personnel : 202 000 $
CELI : 104 000 $
Actifs non financiers : 50 % de la maison familiale : 200 000 $
25 % de trois chalets locatifs : 150 000 $
Passif : 25 % des hypothèques des chalets locatifs : 70 000 $
Valeur nette des actifs personnels : 585 000 $

Les questions

François et Christiane cherchent des conseils sur deux aspects particuliers de leur planification financière et fiscale en vue de leur prochaine retraite du travail.

En premier lieu, est-ce que leur épargne-retraite s’annonce adéquate en vue de maintenir leur train de vie durant les nombreuses années de leur retraite ?

Sinon, comment l’optimiser au point de vue financier et fiscal durant leurs dernières années de revenus salariaux avant la retraite ?

Une fois retraités, comment devraient-ils planifier le décaissement de leurs actifs financiers, la revente d’actifs immobiliers à revenus et le début de leurs rentes publiques ? Tout en tenant compte de l’optimisation fiscale de ces revenus au fil des ans, ainsi que de l’écart significatif de la valeur nette de patrimoine personnel entre les deux époux ?

La situation et les questions de François et de Christiane ont été soumises à Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine chez FDP Gestion privée, une division de la Financière des professionnels.

Les conseils

D’entrée de jeu, Raphaël Hainault signale une « certaine disparité » entre les chiffres de revenu total de François et Christiane et ceux de leurs principaux débours budgétaires courants (dépenses de train de vie, cotisations d’épargne-retraite, charges fiscales).

Cette « disparité » suscite un doute quant au budget estimé de train de vie (environ 60 000 $ par an) que le couple aurait planifié lors de sa retraite.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine chez FDP Gestion privée

Selon mes estimations, leurs débours totaux pourraient approcher les 90 000 $ par an, ce qui est beaucoup plus que leur estimation de 60 000 $ par an. C’est un écart non négligeable que le couple aurait avantage à clarifier afin de renforcer la planification financière de sa prochaine retraite.

Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine chez FDP Gestion privée

Cela dit, Raphaël Hainault indique que le patrimoine commun constitué jusqu’à maintenant par François et Christiane (environ 1,8 million en valeur nette d’actifs en épargne-retraite, en placements et en actifs immobiliers) pourrait suffire à soutenir un train de vie de près de 85 000 $ par an jusqu’à un âge très avancé.

« C’est une bonne nouvelle pour la planification financière de leur retraite, en se basant sur des hypothèses de rendement moyen de 4 % par an sur l’ensemble de leurs actifs, ainsi qu’un taux d’inflation moyen de 2 % par an », précise M. Hainault.

N’empêche, afin d’optimiser leurs moyens financiers, François et Christiane ont quelques ajustements à faire dans leurs priorités d’épargne et de placement durant leurs dernières années de revenus salariaux et leurs premières années de retraite à revenus provenant de leurs actifs.

Combler les REER

En premier lieu, Raphaël Hainault conseille au couple de profiter de son surplus de revenu disponible durant ses dernières années de revenus d’emploi pour maximiser l’épargne en comptes enregistrés avec avantages fiscaux.

« Ils ont tous les deux d’importants montants de cotisations inutilisées dans leur REER, soit 18 000 $ pour François et 134 000 $ pour Christiane. Or, ils auraient intérêt à les combler le plus possible avant la retraite afin d’en optimiser les avantages fiscaux pendant qu’ils ont encore des revenus d’emplois avec des taux d’imposition plus élevés », explique M. Hainault.

« Dans le cas de François, il devrait combler dès cette année l’entièreté de ses cotisations inutilisées en REER (18 000 $), quitte à puiser dans ses placements en compte non enregistré pour ajouter à sa capacité d’épargne à même son revenu disponible, explique le conseiller de FDP Gestion privée.

« En ce qui concerne Christiane, je lui suggère de cotiser à son REER jusqu’à hauteur de 11 000 $ par an d’ici l’année de sa retraite du travail. Il s’agit du montant optimal pour le crédit d’impôt associé au REER en fonction de son niveau de revenu d’emploi imposable, explique M. Hainault.

« Et si Christiane n’a pas suffisamment de revenu disponible pour un tel montant de cotisation annuelle à son REER, son époux François pourrait y contribuer en puisant dans ses placements en compte non enregistré, ce qui servirait à optimiser les avantages fiscaux du couple pour l’ensemble de ses REER.

« En procédant ainsi, tout en continuant leurs cotisations maximales à leur CELI, François et Christiane placeront davantage d’actifs à l’abri de l’impôt en préparation de leur prochaine retraite », indique Raphaël Hainault.

Aussi, explique-t-il, le couple pourra profiter de ce transfert d’actifs vers des comptes d’épargne avec avantages fiscaux pour réviser le « profil de risque » de ses placements dans l’ensemble de ses comptes.

« L’objectif d’une telle révision est de réduire le niveau de risque de leurs placements en fonction d’un profil d’investisseur moins risqué et plus conservateur à l’approche de la retraite. Aussi, c’est pour leur éviter d’avoir à liquider des placements à un mauvais moment sur les marchés afin de combler des besoins budgétaires de leur train de vie », rappelle M. Hainault.

Minimiser l’impôt en début de retraite

Une fois à la retraite, François et Christiane auront alors une période de quelques années de revenus imposables minimes avant le début à 65 ans de leurs rentes de régimes de retraite publics (RRQ provinciale et PSV fédérale), ainsi que le début à 71 ans des décaissements minimums de leurs REER transformés en FERR (fonds enregistré de revenu de retraite).

Selon mes estimations, le montant optimal des retraits serait d’environ 30 000 $ par année pour le couple. Ces retraits devraient se faire en proportion de leur avoir actuel en REER, soit 20 000 $ pour François et 10 000 $ pour Christiane.

Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine chez FDP Gestion privée

Mais afin de pouvoir commencer ces retraits, il leur conseille de « convertir une portion importante de leurs REER en FERR au début de leur retraite, plutôt que d’attendre à l’âge maximal de 71 ans. »

De cette façon, explique M. Hainault, François et Christiane pourront minimiser l’imposition des retraits de leur REER respectif jusqu’au début de leurs prestations de rentes publiques (RRQ provinciale et PSV fédérale), qui sont aussi considérées comme des revenus imposables.

Par ailleurs, c’est aussi durant les premières années de retraite à faible revenu imposable que François et Christiane pourraient effectuer la revente progressive de leurs parts d’actifs en immobilier à revenu : les chalets locatifs et la terre agricole en copropriété avec des proches.

« Les gains en capital provenant de ces reventes d’actifs immobiliers à revenus s’ajouteront au revenu imposable de François et Christiane. C’est pourquoi ils auraient avantage à les effectuer durant leurs premières années de retraite, alors que leurs revenus imposables seront très réduits, explique Raphaël Hainault.

« Aussi, ils en obtiendront un capital qui pourra subvenir à leurs besoins budgétaires en début de retraite, et leur permettre de décaler d’autant les ponctions dans leur épargne-retraite. »

*Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, les prénoms utilisés sont fictifs.