Finances personnelles, investissement, consommation... Une fois par mois, la chroniqueuse Stéphanie Grammond fait le tour des petites et grandes questions qui préoccupent les lecteurs de La Presse.

Je suis un CPA. Dans ma clientèle de particuliers, j’ai plusieurs personnes âgées qui sont dans des résidences et je me demande comment je vais pouvoir faire leurs impôts.

Yves

Quelles sont les conséquences si je produis mes rapports en retard ?

Jocelyn

Pour donner un répit aux contribuables, le fisc a étiré la saison des impôts d’un mois cette année. La date limite pour produire votre déclaration de revenus a été reportée du 30 avril au 1er juin 2020.

Mine de rien, ça s’en vient vite ! Les particuliers n’ont rien à payer avant le 1er septembre. Ni le solde d’impôt. Ni les acomptes provisionnels. Rien. Et rassurez-vous, il n’y aura pas de pénalité pour production tardive si les contribuables ne sont pas en mesure de remettre leur déclaration à la date prévue.

Mais autant que possible, les contribuables devraient faire leur déclaration avant la date limite. Sinon, ils risquent de perdre certains crédits dont le paiement est recalculé au mois de juillet.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

La date limite pour produire votre déclaration de revenus a été reportée du 30 avril au 1er juin 2020.

C’est le cas des crédits de TPS et de Solidarité et de l’Allocation canadienne pour enfant qui pourraient malheureusement disparaître… à moins que le fisc poursuive leur versement en se fondant sur les informations de 2018.

Franchement, ce serait bête que l’État retire d’une main des prestations auxquelles les ménages ont droit, par manque d’agilité bureaucratique, alors qu’il s’évertue à donner de l’autre main des prestations d’urgence pour les aider à passer à travers la crise de la COVID-19.

Il y a certainement moyen de prolonger automatiquement ces prestations. La preuve, c’est que Revenu Québec a déjà annoncé qu’il reconduirait les versements du crédit pour maintien à domicile des aînés pour lequel les délais de renouvellement ont été prolongés de quatre mois.

Idem pour les versements du programme Allocation-logement, dont la date de renouvellement a été repoussée au 1er décembre 2020. Cela donnera le temps de souffler aux personnes à faibles revenus qui bénéficient de cette aide.

Les parents qui reçoivent l’Allocation famille ont aussi droit à un répit. Normalement, l’allocation qu’ils recevront de juillet 2020 à juin 2021 devrait être déterminée en fonction du revenu familial inscrit dans leur déclaration 2019. Mais si l’information n’est pas encore disponible, « Retraite Québec leur versera un montant temporaire pendant un maximum de trois mois, soit jusqu’en septembre 2020 », m’a expliqué le porte-parole Frédéric Lizotte.

Mais je le répète, les gens en mesure de faire leur déclaration de revenus ne devraient pas tarder, car ils devront rembourser les prestations versées en trop si leur situation a changé.

Je conviens que l’opération ne sera pas simple pour tous les contribuables qui restent en confinement. Comment faire parvenir les documents au comptable ? Certains fiscalistes m’ont confié que leurs clients leur avaient envoyé des photos de factures et de reçus par courriel ou texto. Ingénieux.

La promesse de Trudeau aux retraités

Avant d’être élu, M. Trudeau nous avait laissé entendre qu’il majorerait nos pensions de vieillesse. J’aimerais bien qu’il passe à l’acte. J’ai 86 ans et mes revenus ont fondu.

Louise

Le gouvernement pourrait permettre aux retraités et possiblement à tous de retirer un pourcentage maximum des REER et FEER, sans impôts ou taxes, pendant les années 2020-2021. Qu’en pensez-vous ?

Alain

Lors de la dernière campagne électorale, Justin Trudeau a effectivement promis d’augmenter de 10 % la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV) à partir de 75 ans. En ce moment, la PSV rapporte environ 7300 $ par année à partir de 65 ans. Avec la nouvelle mesure qui était évaluée à 2,6 milliards, quelque 3 millions d’aînés pourraient donc toucher 730 $ de plus.

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« Beaucoup de retraités ont l’impression d’être laissés pour compte, alors qu’Ottawa fait pleuvoir des milliards pour aider les Canadiens à passer à travers la crise de la COVID-19 », écrit Stéphanie Grammond.

Mais rien n’a encore été fait. J’avoue que le moment serait approprié pour remplir cette promesse. Beaucoup de retraités ont l’impression d’être laissés pour compte, alors qu’Ottawa fait pleuvoir des milliards pour aider les Canadiens à passer à travers la crise de la COVID-19.

Pour les retraités, il n’y a pas grand-chose…

Ottawa a réduit de 25 % les retraits minimums que les retraités doivent faire chaque année dans leur Fonds enregistré d’épargne-retraite (FERR). Cette mesure évitera aux investisseurs de retirer des sommes alors que leurs placements sont au tapis. Mais bien des aînés n’ont pas le luxe d’attendre. Ils ont besoin de leurs économies pour vivre.

À l’inverse, Québec a permis aux personnes de 70 ans et moins qui ont un fonds de revenu viager (FRV) de puiser davantage dans leurs économies en 2020. Normalement, les retraits annuels du FRV sont soumis à un plafond.

Mais beaucoup de contribuables, comme Alain, aimeraient pouvoir retirer des sommes de leurs REER, FERR ou autre régime enregistré, sans avoir à payer d’impôts. En Australie, justement, les épargnants peuvent retirer jusqu’à 20 000 $ de leur épargne-retraite, sans pénalité.

Chez nous, l’Institut C.D. Howe a recommandé la mise en place d’un mécanisme inspiré du régime d’accession à la propriété (RAP) qui permet de puiser dans son REER pour l’achat d’une maison. Mais l’argent doit être remis dans le REER au cours des 15 années suivantes, sans quoi le contribuable doit payer l’impôt.

Ce n’est certainement pas le congé fiscal dont les retraités rêvent, mais un tel mécanisme pourrait être une mesure de dernier recours valable pour les ménages à court de liquidités à cause de la COVID-19.

Le fisc et les résidences pour aînés

Les maisons de retraite peuvent atteindre jusqu’à 10 000 $ par mois. Lorsque l’un des deux conjoints conserve le domicile familial, ces dépenses s’ajoutent à celles inhérentes à la propriété. Serait-il possible d’écrire sur le traitement fiscal de ces services ?

Claude 

Oui, les résidences pour aînés coûtent cher. Mais heureusement, le fisc paie une partie de la note. 

Québec offre un crédit d’impôt remboursable pour maintien à domicile aux personnes de 70 ans et plus qui doivent payer pour obtenir des services personnels ou domestiques. Le crédit se module différemment selon que les aînés vivent dans leur propre maison, dans un immeuble résidentiel ou dans une résidence pour personnes âgées.

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Dans une résidence pour aînés, l’annexe du bail précise les services offerts qui sont admissibles au crédit selon différents taux établis par le gouvernement.

Dans une résidence, l’annexe du bail précise les services offerts qui sont admissibles au crédit selon différents taux établis par le gouvernement. Le crédit peut être réclamé lors de la déclaration de revenus ou versé par anticipation.

Mais il existe une kyrielle d’autres mesures fiscales destinées aux aînés. Je pense par exemple au crédit d’impôt remboursable pour l’achat ou la location de biens visant l’autonomie des aînés ou encore au crédit d’impôt pour l’accessibilité domiciliaire.

Les personnes qui sont atteintes d’une incapacité qui limite considérablement leurs activités quotidiennes devraient aussi demander le crédit d’impôt pour déficience mentale ou physique. Et les proches aidants ont aussi droit à un crédit que Québec a d’ailleurs bonifié et simplifié dans son dernier budget.

Ah oui, et j’oubliais les crédits pour frais médicaux !

Ne vous gênez pas pour consulter un spécialiste, car toutes ces mesures assez complexes peuvent représenter des milliers de dollars d’économies d’impôts.

Pour vous aider à vous y retrouver, la Chaire de fiscalité et de finances publiques de l’Université de Sherbrooke vient de lancer un outil web destiné aux contribuables dont la vie est en transition pour toutes sortes de raisons.

Un nouveau conjoint, une rupture, l’achat d’une maison, un premier emploi, l’arrivée d’un enfant, le départ à la retraite… Lors de ces moments charnières, il faut se pencher encore plus attentivement sur ses impôts pour ne pas laisser filer des cadeaux fiscaux.

Un des volets de ce guide décortique justement les mesures fiscales qui touchent les aînés qui quittent leur domicile.

>> Consultez le guide Transitions de vie

À quand la ristourne de Desjardins ?

Desjardins indique que les ristournes annuelles seront versées à un temps ultérieur puisqu’on ne peut tenir d’assemblée générale en ce moment. Comme le déconfinement et la tenue de ce type de rassemblement ne risquent pas d’être permis avant un bon bout de temps, je trouve que Desjardins devrait penser à une solution. Pour beaucoup de gens, les ristournes seraient utiles en ce moment. Est-ce que vous pouvez interroger la coopérative à ce propos ?

Elaine

Patience, patience pour les 4,75 millions membres du Mouvement Desjardins qui attendent leur ristourne. Pour l’instant, tout est gelé, car les ristournes doivent être votées dans les caisses où les assemblées ont dû être reportées à cause de la pandémie de COVID-19.

Mais soyez sans crainte, Desjardins a toujours l’intention de verser les ristournes, qui totalisent 317 millions de dollars, somme qui a doublé depuis quatre ans. « Nos équipes travaillent actuellement à trouver des solutions pour la tenue des assemblées générales annuelles, en tenant compte des contraintes du contexte actuel », m’a répondu la porte-parole de la coopérative, Chantal Corbeil.

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Selon Stéphanie Grammond, Desjardins a toujours l’intention de verser les ristournes, qui totalisent 317 millions de dollars, somme qui a doublé depuis quatre ans.

Le Mouvement fera peut-être des assemblées virtuelles. Mais cela ne s’organise pas en deux temps trois mouvements.

« Nous analysons présentement plusieurs scénarios, mais cela est complexe, car l’organisation de plus de 200 AGA sous une nouvelle forme nécessite des travaux pour lesquels nous devrons compter sur de nombreux fournisseurs technologiques », ajoute Mme Corbeil.

Espérons que ça débouche bientôt, car les membres qui ont perdu leurs revenus à cause de la pandémie auraient bien besoin de leur ristourne même si ce n’est un montant astronomique. Même s’il est trop tôt pour déterminer qui aura droit à combien, le montant total correspond à environ 67 $ par membre.

Qui a droit au PIRTE ?

Pourriez-vous apporter une précision sur le PIRTE ? On y mentionne qu’il faut avoir gagné entre 5000 $ et 28 600 $ en 2019 pour y être admissible. S’agit-il du revenu de travail ou du revenu total ?

Judith

Québec offrira bientôt le Programme incitatif pour la rétention des travailleurs essentiels (PIRTE), qui donnera droit à une aide financière de 100 $ par semaine aux travailleurs qui gagnent moins de 550 $ par semaine dans un secteur essentiel.

Pour y être admissible, il faut avoir gagné un « revenu de travail annuel » d’au moins 5000 $ et un « revenu total annuel » de 28 600 $ ou moins pour l’année 2020.

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Québec offrira bientôt le Programme incitatif pour la rétention des travailleurs essentiels (PIRTE).

Le revenu minimum de 5000 $ doit absolument provenir d’un travail, mais pas nécessairement dans les services essentiels. Par exemple, le portier d’une boîte de nuit pourrait avoir droit au PIRTE s’il va travailler durant quelques semaines pour la Croix-Rouge durant la pandémie.

>> Consultez la liste des services essentiels

Quant au revenu maximal de 28 600 $, il inclut l’ensemble des revenus du contribuable : travail, rentes de retraite, revenus de placement, etc. Ainsi, un retraité qui touche une rente de 30 000 $ par année n’aura pas droit au PIRTE s’il travaille dans un secteur essentiel durant la pandémie.