Vous planifiez un projet qui demande une utilisation judicieuse de votre argent ? Vous avez des problèmes financiers ?

Sylvie*, 56 ans, est coactionnaire d’une PME en aménagement d’espaces commerciaux qu’elle s’apprête à fermer graduellement d’ici trois ans. Sylvie sera alors au seuil de la soixantaine et en début de retraite.

La situation

Sylvie se soucie de la bonne planification financière et de l’optimisation fiscale de ses derniers revenus d’entrepreneur au cours de ses trois à quatre prochaines années.

Célibataire en bonne santé, et sans personne à charge, Sylvie se préoccupe aussi de ses revenus de retraite pour maintenir son train de vie à près de 30 000 $ par année, après 60 ans. Ces revenus proviendraient surtout de ses actifs en comptes d’épargne enregistrés (REER/FERR, CELI) et de ses prestations de régimes de retraite publics.

Dans ces comptes enregistrés, Sylvie a accumulé jusqu’à maintenant des actifs financiers pour une valeur d’environ 430 000 $, mais elle dispose encore de « cotisations disponibles » totalisant environ 30 000 $.

Quant à ses prestations attendues du Régime des rentes du Québec (RRQ), la plus récente estimation les situe aux environs de 7300 $ par année si elle les devançait à partir de 60 ans, et d’environ 11 700 $ par année si elle s’en prévalait à l’âge habituel de 65 ans.

Avant d’en arriver là, Sylvie prévoit que ces revenus de fin de carrière d’entrepreneur proviendront surtout de son salaire en réduction graduelle. Ce salaire est prévu à 80 000 $ cette année, puis réduit aux environs de 55 000 $ au cours des dernières années d’activité de sa PME.

En ajout de ce salaire, Sylvie encaisse quelque 10 000 $ par année en revenu de dividendes en tant que coactionnaire de la PME. Enfin, elle estime aux environs de 200 000 $ sa part de l’actif résiduel de la PME, une fois rendue au terme de ses activités d’affaires.

Les questions

Dans ce contexte, les principales interrogations de Sylvie en vue de sa prochaine fin de carrière d’entrepreneur se résument ainsi.

D’une part, comment optimiser d’un point de vue fiscal la répartition des derniers revenus de salaire et de dividende qu’elle prévoit d’obtenir de sa PME ?

D’autre part, Sylvie cherche conseil sur la meilleure façon d’optimiser son niveau d’épargne-retraite en comptes enregistrés (REER, CELI) durant les prochaines années, jusqu’à l’approche de son 65e anniversaire et l’amorce de ses rentes de régimes publics.

La situation et les questions de Sylvie ont été soumises pour analyse et conseils à Mathieu Huot, qui est planificateur financier et fiscaliste chez la firme IG Gestion de patrimoine, filiale du groupe Investors.

Les conseils

PHOTO FOURNIE PAR MATHIEU HUOT

Mathieu Huot, planificateur financier et fiscaliste chez IG Gestion de patrimoine

D’emblée, Mathieu Huot accorde une note favorable au bilan personnel de Sylvie en fonction de son train de vie raisonnable : actifs relativement bien diversifiés, flexibilité fiscale entre les types de revenus imposables, absence de dette.

« À moins d’imprévus, et pour que ses prochaines décisions de fin de PME et de préretraite demeurent adéquates, la situation financière et budgétaire de Sylvie est bien positionnée pour lui permettre d’envisager le maintien de son train de vie jusqu’à un âge avancé. »

Cela dit, Mathieu Huot constate la pertinence d’effectuer certains ajustements à la planification professionnelle, financière et fiscale de Sylvie alors qu’elle amorce une retraite progressive de son entreprise.

Dans un premier temps, M. Huot recommande à Sylvie de profiter de ses dernières années de revenu salarial de sa PME pour optimiser la fiscalité de son épargne-retraite en effectuant des cotisations maximales à un REER constitué de parts de fonds avec avantages fiscaux, comme le Fonds de solidarité FTQ.

« En cotisant jusqu’au maximum de 5000 $ par année, Sylvie bénéficierait d’un crédit d’impôt additionnel de l’ordre de 30 à 35 % qui serait applicable sur ses dernières années de salaire imposable », explique Mathieu Huot.

« Parce que c’est de l’argent que Sylvie pourra récupérer dans quelques années à peine, selon les règles de ces fonds fiscalisés, elle aura bénéficié entre-temps d’un rendement fiscal élevé et sûr sur cette portion de son épargne-retraite. Et ce, avant même de considérer le rendement potentiel sur la valeur de revente des parts de ce type de fonds. »

Dans un deuxième temps, Mathieu Huot recommande à Sylvie d’amorcer des discussions avec son coactionnaire et leurs conseillers comptables afin de vérifier la pertinence fiscale pour chacun d’entre eux de prolonger l’existence de cette PME comme une société de gestion d’actifs financiers, après la fin de ses activités, prévue d’ici trois ans.

« À cette étape-ci de leur plan d’affaires, Sylvie estime aux environs de 200 000 $ la valeur de sa part de l’actif résiduel qu’elle et son associé prévoient avoir dans leur PME au terme du processus de cessation des affaires », note Mathieu Huot.

« Or, il s’agit d’une somme importante dont l’encaissement en seulement un ou deux ans, en salaires ou en dividendes, risquerait d’être très coûteux en impôt personnel pour Sylvie et pour son associé. Peut-être de l’ordre de quelques dizaines de milliers de dollars chacun », avertit M. Huot.

D’où la pertinence d’envisager l’échelonnement de ce décaissement d’actifs résiduels de leur PME sous forme de salaires ou de dividendes pendant quelques années après la fin des activités d’affaires.

« Pour Sylvie, considérant ses revenus de retraite prévisibles à son 65e anniversaire en rentes publiques [RRQ] et en premiers retraits de ses REER ou FERR, tous imposables d’ailleurs, elle aura sans doute un net avantage fiscal à maximiser ses revenus d’encaissement d’actif de sa PME durant les quelques années entre la fin des activités et son 65e anniversaire », anticipe Mathieu Huot.

Et pour ce faire, Sylvie devrait-elle privilégier un encaissement d’actifs sous forme de salaire ou de dividende ?

« Cela dépendra de l’issue de ses prochaines discussions d’ordre financier et fiscal avec son coactionnaire et leurs conseillers comptables », répond Mathieu Huot.

« Par exemple, un prolongement de salaires pourrait être désavantageux à court terme pour la fiscalité personnelle de Sylvie et de son associé, mais avantageux pour la fiscalité de leur PME devenue une société de gestion de placements », explique le planificateur.

« De plus, la continuité de salaires pour Sylvie et pour son associé leur permettrait de continuer d’engranger des cotisations à la RRQ et des allocations de cotisation REER déductibles d’impôt, qui peuvent s’avérer particulièrement “payantes” à l’approche de l’âge habituel de la retraite à 65 ans. »

En comparaison, un décaissement d’actif résiduel de la PME axé surtout sur des versements de dividendes accrus pourrait être avantageux pour la fiscalité personnelle à court terme de Sylvie et pour son associé. C’est que les revenus en dividendes sont moins imposés que les revenus salariaux.

Toutefois, avertit Mathieu Huot, de tels revenus en dividendes plutôt qu’en salaire priveraient Sylvie de « l’espace de cotisations » additionnelles à la RRQ et à son REER durant ses dernières années d’admissibilité avant la retraite.

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, le prénom utilisé est fictif.

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Les chiffres

Sylvie*, 56 ans

Actif
Régime enregistré d’épargne-retraite (REER) : 377 000 $
Compte enregistré libre d’impôt (CELI) : 53 000 $
Compte d’épargne non enregistré : 18 000 $
Valeur estimée de la part de 50 % de l’actif final de PME : 200 000 $
Résidence : 295 000 $

Passif
Aucune dette

Revenus
Emploi : 80 000 $
Dividendes de coactionnaire de PME : 10 000 $