Grâce à des années d’efforts combinées à d’excellents salaires, Brigitte et Bruno arrivent à la mi-cinquantaine avec 1 877 852 $ d’actif, aucune dette et le généreux régime de retraite à prestations déterminées de Brigitte. Des problèmes de santé les incitent à vouloir arrêter de travailler le plus vite possible. Mais comment décaisser son patrimoine de façon optimale ?

Brigitte et Bruno ont toujours été très disciplinés dans la gestion de leurs finances personnelles. Puisque Bruno n’a pas d’emploi stable ni de régime de retraite, le couple n’a jamais vécu au-dessus de ses moyens. Il voulait aussi être en mesure de soutenir ses trois enfants dans leurs projets d’études.

« Les biens de luxe ne nous intéressent pas. Nous sommes plus des gens de plein air et de sport, explique Bruno en entrevue téléphonique. Je dirais que nous avons bien profité de la vie même si nous avons travaillé beaucoup d’heures et subi beaucoup de stress dans nos emplois respectifs. »

Bruno a maintenant quelques ennuis de santé. Il ne sait pas s’il lui reste 5 ou 20 ans de vie active. La maladie peut rester stable ou dégénérer rapidement.

« Je veux prendre ma retraite le plus vite possible pour en profiter pendant qu’on est tous les deux encore en forme, dit-il. Faire de l’exercice physique m’aide d’ailleurs à ralentir la progression de la maladie. »

Brigitte et Bruno veulent voyager cinq semaines par année pour faire des activités sportives. Quand la santé les aura abandonnés, ils prévoient habiter dans un pied-à-terre en ville.

« Je veux savoir comment procéder pour décaisser nos investissements et vendre nos propriétés, sauf le chalet, qu’on souhaite léguer aux enfants. »

SCÉNARIO 1

Pas besoin d’être planificateur financier pour constater que Brigitte et Bruno sont dans une bonne situation financière. Mais en ont-ils assez pour cesser de travailler dès maintenant et réaliser leur projet de voyage ?

Afin de maintenir le même niveau de vie à la retraite, les spécialistes conseillent de prévoir 70 % des revenus annuels nets. Antoine Chaume, planificateur financier et conseiller en sécurité financière chez Lafond et associés, émet certaines réserves à ce sujet.

« Lorsque les gens gagnent 50 000 $ par année, on vise effectivement le 70 %, confirme-t-il en entrevue téléphonique. Cependant, quand je fais une planification pour des professionnels, je vise plutôt 80 %, parce que si le revenu familial est de 300 000 $ depuis 10 ans, les gens sont habitués à un certain niveau de vie. Ils font deux ou trois voyages par année qui coûtent généralement plus que 1000 $. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Antoine Chaume, planificateur financier et conseiller en sécurité financière chez Lafond et associés

Pour Brigitte et Bruno, 70 % des revenus actuels nets correspondent à 133 000 $. Or, selon les calculs du planificateur financier, s’ils cessent de travailler en novembre 2020 avec ce revenu de retraite, ils n’auront plus d’actif en 2049, soit à l’âge de 84 ans et 86 ans. Même en vendant la maison, le condo et le chalet. Il manque exactement 455 354 $.

« Ce qui fait mal, ce sont les premières années de décaissement avant l’arrivée des rentes des deux gouvernements, explique Antoine Chaume. On gruge du capital qui ne pourra plus fructifier pendant les 30 prochaines années. »

Et s’ils décidaient d’attendre en 2022 avec 66 % de leurs revenus actuels ? Les 125 000 $ de revenus annuels ne seraient pas suffisants. Le manque à gagner est de 78 457 $.

SCÉNARIO 2

Étant donné que Brigitte et Bruno veulent cesser de travailler rapidement à cause des problèmes de santé de Bruno, ils pourraient utiliser un scénario en palier. À partir de 2021 jusqu’en 2033, l’année des 70 ans de Brigitte, ils auraient un revenu annuel de retraite équivalent à 66 % de leurs revenus actuels, soit 125 000 $. Par la suite, leurs revenus baisseraient à 115 000 $, qui correspond à 60 % de leurs revenus actuels.

« Considérant la maladie et l’envie de voyager qui entraînera des coûts plus élevés en début de retraite, le scénario en palier est intéressant, estime Antoine Chaume. C’est vrai qu’en vieillissant, beaucoup de gens réduisent leurs dépenses. Toutefois, il faut garder en tête qu’on peut aussi avoir plus de frais médicaux. »

Advenant que l’objectif 2021 soit trop loin pour le couple, le planificateur financier suggère de travailler à temps partiel pendant deux ans. Si cette option ne les intéresse pas, Brigitte et Bruno pourraient arrêter de travailler dès 2020, mais avec un revenu de 115 000 $ pour toute la durée de leur retraite. Dans tous les cas, ils doivent vendre le chalet dans 10 ans et les deux autres propriétés au début de leur retraite.

STRATÉGIE DE VENTE ET DE DÉCAISSEMENT

Brigitte et Bruno ont trois propriétés. Le planificateur financier conseille de vendre la maison au cours d’une année où les revenus du couple seront moins élevés, donc à partir de la première année de retraite. La maison est identifiée comme la propriété secondaire et le gain sera imposable. Même scénario pour le condo.

Les nouvelles liquidités doivent être placées dans des REER et des CELI, puisqu’ils ne sont pas encore maximisés.

« J’ai estimé qu’en vendant le chalet, qui est la résidence principale, dans 10 ans, sa valeur atteindra 500 000 $. Le couple pourra garder 100 000 $ pour la mise de fonds d’un pied-à-terre et investir les 400 000 $. »

Quand on a beaucoup d’actif en REER, en CELI et en placements non enregistrés, une bonne planification d’investissement et de décaissement est primordiale, souligne Antoine Chaume.

« J’ai remarqué que le couple était très éparpillé au niveau de ses placements, dit-il. L’argent est placé à cinq endroits différents. »

« Les gens croient à tort qu’avec un seul gestionnaire, on est moins diversifié, poursuit-il. C’est important d’avoir un seul maître d’œuvre qui voit la situation globale et qui est en mesure de maximiser les placements et les sorties selon les taux d’imposition. Par ailleurs, en plaçant son argent au même endroit, le couple aurait un rabais. »

Selon le planificateur, la stratégie de décaissement de base consiste à retirer une combinaison de placements non enregistrés et de REER tout en gardant un taux d’imposition moyen faible. Comme le CELI croît à l’abri de l’impôt, il est préférable d’attendre à la toute fin pour le retirer.

Les chiffres

Brigitte
Salaire annuel : 165 098 $
REER : 228 000 $
CELI : 46 000 $
Placements non enregistrés : 25 000 $
CRI : 47 600 $
Rente annuelle de l’employeur : 68 790 $ à 57 ans, 74 110 $ à 58 ans, 85 730 $ à 60 ans
RRQ estimée : 681 $ à 60 ans, 1071 $ à 65 ans

Bruno
Salaire annuel : 126 028 $
REER : 527 200 $
CELI : 0
Placements non enregistrés : 26 500 $
Régime de retraite : 0
RRQ estimée : 717 $ à 60 ans, 1114 $ à 65 ans
Maison : 325 000 $
Chalet : 450 000 $
Condo : 250 000 $
Compte d’épargne commun : 51 500 $
Dettes : 0