Karl, 43 ans, est un employé cadre dans une usine minière dans le Grand Nord québécois et père d'un enfant d'âge préscolaire en garde partagée.

Son emploi bien rémunéré, dans une entreprise bien établie, comprend de bons avantages sociaux : logement, alimentation et transport fournis au travail, régimes de retraite (d'entreprise et REER collectif), assurances collectives.

Comme nombre d'emplois dans des lieux éloignés, l'horaire de travail de Karl est en alternance : deux semaines au travail, deux semaines de congé.

Karl planifie actuellement un projet immobilier résidentiel à moyen terme, mais en continuant d'épargner pour les études futures de son enfant ainsi que pour une retraite plaisante.

Quel projet immobilier a-t-il en tête ?

Depuis deux ans, Karl est propriétaire-résidant d'un triplex à Trois-Rivières. Cet immeuble est évalué à 227 000 $ et lui rapporte un peu plus de 11 000 $ par an en revenus locatifs bruts.

Karl souhaite déménager d'ici deux ans à Québec, près du lieu de résidence de son enfant en garde partagée. Il se rapprocherait aussi de l'aéroport de Québec, d'où fonctionne la navette de son employeur vers le Grand Nord.

Il a deux projets immobiliers en tête, qu'il évalue chacun autour de 400 000 $ : acheter un terrain résidentiel en banlieue de Québec et y faire construire une maison, ou encore acquérir un lot forestier en périphérie de la capitale afin d'y construire une maison ou de rénover une maison existante.

« Je rêve d'avoir une terre à bois attenante à la maison. Ce serait un patrimoine intéressant à laisser en héritage à mon enfant », estime Karl.

Pour y parvenir, il s'interroge sur le meilleur moyen de financer un tel projet, tout en continuant d'épargner pour les études de son enfant et pour la retraite.

« Je souhaite être libre de dettes au moment de prendre ma retraite du travail à temps plein, dans une vingtaine d'années. »

- Karl

Par conséquent, il demande : « Est-ce que je devrais vendre mon triplex à Trois-Rivières et me reloger de façon temporaire à Québec pour quelques années, le temps de préparer mon projet immobilier ?

« Ou serait-il plus avantageux pour ma planification financière de conserver mon triplex et de louer le logement que j'occupe présentement, pour environ 700 $ par mois ? »

ACTIFS FINANCIERS 

Régimes enregistrés d'épargne-retraite (REER) : 34 500 $

(REER collectif d'employeur et compte REER au Fonds de solidarité)

Compte de retraite immobilisé (CRI) : 85 000 $

Régime de retraite d'employeur (à cotisations déterminées) : 33 500 $

Compte d'épargne libre d'impôt (CELI) : 1800 $

Régime enregistré d'épargne-études (REEE) : 1500 $

Compte de placement non enregistré : 7000 $

Compte d'épargne générale : 4000 $

Actifs non financiers : 

Triplex résidentiel en ville régionale : 227 000 $

Deux véhicules (d'usage courant et de collection) : environ 34 000 $

Passif financier : 

Solde de prêt hypothécaire : 199 000 $

Dettes de consommation (marge/cartes de crédit) : 18 000 $

Solde de prêt automobile : 24 000 $ (à payer d'ici juillet 2021)

Budget annuel  : 

Revenu salarial brut : environ 140 000 $/an

Revenu de logements locatifs : 11 400 $/an

Dépenses liées au triplex : environ 25 000 $/an

Autres dépenses : environ 39 000 $/an

Principaux débours fiscaux : environ 42 000 $/an (impôts fédéral et provincial)

Débours d'épargne-placement (REER et REEE) : de 7000 à 15 000 $/an, en fonction de bonus annuel d'employeur

LES CONSEILS

La situation financière et les questions de Karl ont été soumises à Maryse Filion, directrice en planification financière chez Gestion de patrimoine TD, à son bureau régional de Laval.

Afin de répondre à la majorité de ses objectifs, Maryse Filion propose à Karl une stratégie de finances personnelles en deux étapes principales : 

1. Éliminer la dette de consommation et maintenir les priorités d'épargne à subvention fiscale

« En première évaluation, Karl affiche un bilan financier sain ainsi qu'une bonne capacité à l'épargne. Il faut donc en profiter pour rembourser sa dette de consommation de 18 000 $ le plus rapidement possible afin de ne plus payer les intérêts plus élevés sur les cartes de crédit et la marge de crédit », constate Mme Filion.

Elle suggère à Karl de retrancher 6000 $ de son actif financier de 11 000 $ en placements et comptes non enregistrés pour réduire sa dette de consommation de 18 000 $ à 12 000 $. Ensuite, il devrait augmenter de 800 $ à 1000 $ le paiement mensuel sur cette dette afin de l'éliminer d'ici 12 mois.

Pendant ce temps, afin d'optimiser l'épargne-études de son enfant, Mme Filion suggère à Karl de rehausser sa cotisation au REEE à 2500 $ par année (ou 208 $ par mois) afin d'en maximiser la subvention fiscale (20 % au fédéral et 10 % au provincial).

« Avec ces cotisations jusqu'au 18e anniversaire de son enfant, le REEE devrait être suffisant pour financer au moins quatre ans de droits de scolarité et de frais de subsistance », estime Maryse Filion.

Quant à la continuité de son épargne-retraite, Mme Fillion suggère à Karl de maintenir une contribution à son REER d'au moins 12 000 $ par an à même les bonis annuels qu'il reçoit de son employeur.

2. Préparer le financement du projet immobilier avec l'actif net accru découlant de la revente future du triplex résidentiel

Karl projette d'acquérir un petit lot forestier dans la région de Québec afin d'y aménager sa future résidence. Mais d'emblée, Maryse Filion considère ce projet comme « très ambitieux dans la mesure où les institutions financières sont très frileuses au financement de ce genre de projet ».

Aussi, avertit Mme Filion, « acheter un terrain dans le but de s'y construire une maison aboutit fréquemment à des dépassements de coûts ».

« Par souci de prudence financière, et afin d'éviter de nuire à ses projets d'épargne d'études et de retraite, je recommanderais à Karl de privilégier l'achat d'une maison existante. »

- Maryse Filion, directrice en planification financière chez Gestion de patrimoine TD

Et pendant qu'il précise son projet immobilier, Maryse Filion suggère à Karl d'en préparer le financement dès maintenant.

Ainsi, elle lui recommande de conserver son triplex à Trois-Rivières « pendant au moins trois ans, ce qui permettra d'en réduire le solde hypothécaire et d'en accroître l'actif net [valeur marchande moins dette] qui pourrait ensuite servir de mise de fonds pour son projet immobilier ».

Mme Filion estime que Karl pourrait bénéficier d'un capital net d'environ 48 000 $ lors de la revente de son triplex à une valeur accrue autour de 240 000 $, après soustraction des frais de vente et du solde du prêt hypothécaire.

« Avec ce capital net et la bonne continuité de son emploi rémunérateur, Karl aurait alors la capacité financière d'acquérir une propriété résidentielle d'environ 350 000 $ avec une mise de fonds de 15 % et un prêt hypothécaire d'environ 305 000 $ assuré par la SCHL fédérale », explique Maryse Filion.

Quant au souhait de Karl de se reloger dans la région de Québec afin de se rapprocher de son enfant en garde partagée, Mme Filion lui suggère, en attendant une nouvelle maison, de se reloger en résidence locative à Québec, ce qui lui permettra de louer le logement qu'il occupe dans son triplex à Trois-Rivières.

En agissant ainsi, explique Maryse Filion, Karl bénéficierait d'un troisième revenu de loyer dans son triplex qui « se paiera par lui-même au fil des ans », jusqu'à sa revente dans quelques années.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Maryse Filion, directrice en planification financière chez Gestion de patrimoine TD