Investir dans un immeuble locatif pour loger leur petite famille et obtenir un revenu supplémentaire, voilà l'objectif d'Émilie et Renaud. Quelle stratégie adopter ?

LE PROBLÈME

Le couple de trentenaires originaire de France attend actuellement son deuxième enfant. « J'aimerais profiter de mon congé de maternité pour faire les démarches afin d'acheter l'immeuble locatif, explique Émilie. C'est un projet que nous aimerions réaliser dans les 12 à 18 prochains mois. Nous aimerions avoir un immeuble de trois à cinq logements. Nous en occuperions un. »

Émilie a déjà un peu d'expérience en location. Elle loue actuellement son condo situé en France. « Je trouve ça intéressant, car il s'autofinance, indique-t-elle. En plus, sa valeur a grimpé d'environ 100 000 euros [156 000 $] depuis l'achat en 2010. » Elle souhaite le conserver tant qu'il ne nécessitera pas trop de travaux de rénovation.

Elle a déjà commencé à faire ses devoirs pour l'achat d'un immeuble à Montréal. « Nous visons un immeuble d'environ 800 000 $, précise Émilie. Je pense qu'une fois tous les frais payés, je pourrais obtenir chaque mois entre 100 $ et 150 $ par porte, excluant la nôtre. »

Pour sa retraite, le jeune couple bénéficie d'un REER collectif au travail auquel leur employeur contribue. Ils ont également commencé à investir dans le régime enregistré d'épargne-études (REEE) de leur fille. Renaud peut aussi compter sur les 80 000 euros (125 000 $) de l'assurance vie héritée à la suite de la mort de son père. Cette somme est toujours en Europe et Renaud préférerait éviter d'y toucher.

LA SOLUTION

« S'ils réalisent tous leurs projets et que ça fonctionne comme ils le veulent, ça va devenir très intéressant, estime Christian Paré, planificateur financier chez Aisance gestion de patrimoine. En plus de leurs REER, ils vont avoir de bons revenus de location à la retraite. Leur hypothèque sera payée vers 60 ans. »

Au premier coup d'oeil, la valeur de l'immeuble convoité par le couple et les revenus qu'il souhaite en tirer semblent toutefois optimistes à ses yeux. « Ce n'est pas impossible, mais il faut qu'ils s'assurent de faire un budget comprenant tous les frais fixes comme l'hypothèque, les taxes, les assurances, l'entretien régulier, les travaux éventuels, l'aménagement, les droits de mutation, etc. », énumère M. Paré.

S'ils vont de l'avant, ils devront débourser 10 % pour la mise de fonds. Une hypothèque sur un immeuble de 800 000 $ s'élèverait donc à 742 320 $ en prenant en compte la mise de fonds et la prime d'assurance de la SCHL, calcule M. Paré. Avec un taux de 4 %, les mensualités s'élèveraient à 3905 $.

Pour la mise de fonds, M. Paré recommande à Émilie de retirer 25 000 $ de son REER dans le cadre du régime d'accession à la propriété (RAP). Elle n'aura donc pas d'impôt à payer sur ce retrait. Elle pourra ensuite puiser les 15 000 $ nécessaires pour compléter sa part dans son CELI.

Renaud, lui, pourrait également utiliser le RAP pour retirer l'argent de son REER, sortir l'argent de son CELI et combler le manque à gagner avec l'argent de l'assurance vie en Europe. Le planificateur s'interroge toutefois quant à son désir de laisser son héritage là-bas. Il pourrait très bien l'utiliser pour maximiser son REER et son CELI et verser sa mise de fonds. « Avec le taux de change, ce serait intéressant », souligne M. Paré.

QUELQUES CONSEILS

Comme Émilie cotise au maximum à son REER collectif, M. Paré l'incite à poursuivre dans la même voie. Il recommande aussi à Renaud d'opter pour l'épargne systématique. « C'est la meilleure façon d'installer une habitude », fait-il valoir.

Il encourage également le couple à continuer d'épargner dans le régime enregistré d'épargne-études (REEE) pour les enfants. Ce programme leur permet d'aller chercher 30 % en subventions des gouvernements. « L'idéal serait d'avoir un régime familial puisqu'il y a un deuxième enfant qui s'en vient », estime M. Paré.

Étant donné qu'ils auront une grosse hypothèque et deux enfants à charge, M. Paré leur recommande fortement de revoir leur couverture d'assurance. « En cas de décès, il ne faudrait pas laisser la famille crouler sous les dettes », note-t-il. Ils devraient également avoir un testament et un mandat d'inaptitude faits au Québec.

Il leur suggère également de conserver un fonds d'urgence correspondant au moins à trois mois de dépenses. « Avec un immeuble à revenus en plus, on a parfois des surprises, souligne M. Paré. De plus, un logement peut rester vacant quelque temps et cela peut déstabiliser les revenus. »

Finalement, Émilie doit savoir qu'il y aura de l'impôt à payer lorsqu'elle choisira de vendre son condo. « L'impôt sur le gain en capital réalisé avant qu'Émilie devienne "résidente fiscale" au Canada devra être payé en France, explique Élise Saint-Louis, fiscaliste chez Demers Beaulne. Pour le reste, l'impôt sur le gain en capital sera d'abord payé en France. Si le taux d'impôt est plus élevé au Canada, la différence devra être payée au Canada. »