Vous n'arrivez pas à rembourser votre carte de crédit, dont la limite est atteinte. Des agents de recouvrement vous harcèlent. Vous n'aurez sûrement pas la tête au boulot si vous êtes tracassé par de tels ennuis financiers. Votre performance risque d'en souffrir, ce qui déplaira à votre patron.

La chef de du développement la littératie financière au Canada, Jane Rooney, offre aux patrons une solution : accroître leur productivité et réduire l'absentéisme en offrant des formations en finances personnelles.

Explications.

PROBLÈMES D'ARGENT = STRESS

« Les soucis financiers sont la première source de stress chez les gens, souligne Mme Rooney. Il peut s'agir de problèmes d'endettement, d'impôts ou d'épargne retraite insuffisante. »

QUELLE EST VOTRE PLUS GRANDE SOURCE DE STRESS ?

Argent : 42 %

Travail : 23 %

Santé : 19 %

Relations : 16 %

LES QUESTIONS D'ARGENT M'EMPÊCHENT DE DORMIR

51 % des femmes

40 % des hommes

42 % des Canadiens de 35 à 44 ans peinent à respecter leurs engagements financiers, un taux plus élevé que chez les autres groupes d'âge.

29 % des Canadiens ont du mal à payer leurs factures à temps.

Source : Financial Planning Standards Council

STRESS = PRODUCTIVITÉ EN BAISSE

« Le stress cause l'absentéisme et nuit à la productivité, souligne Mme Rooney. Les employeurs seraient donc gagnants s'ils amélioraient les connaissances financières de leur personnel. »

20 %

Proportion des travailleurs canadiens souffrant d'une maladie liée au stress

16 milliards

Coût des problèmes de santé mentale pour les entreprises canadiennes, soit près de 14 % de leurs profits annuels

LE STRESS EN ENTREPRISE REPRÉSENTE :

19 % des coûts d'absentéisme ;

40 % des coûts de roulement du personnel ;

55 % des coûts des programmes d'aide aux employés ;

60 % des accidents de travail.

Source : Institut universitaire en santé mentale de Montréal

LE RÔLE DES EMPLOYEURS

Jane Rooney a rencontré récemment des représentants du Conseil du patronat du Québec (CPQ) pour discuter de leur rôle dans l'amélioration des connaissances financières de la population.

« Le CPQ offre déjà de la formation en santé et sécurité. On pourrait ajouter un volet sécurité financière, puisque c'est directement lié à la santé », note Camille Beaudoin, directeur de l'éducation financière à l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Les adultes québécois sont moins compétents en littératie et en numératie que la moyenne des habitants des pays de l'OCDE. Ils reçoivent aussi moins d'heures de formation professionnelle, selon le Bulletin de la prospérité du CPQ.

« La formation contribue à la prospérité, et nos faiblesses dans ces domaines devraient nous inciter à y investir. » - Yves-Thomas Dorval, PDG du Conseil du patronat du Québec

Les programmes d'aide aux employés (PAE) offerts par certaines entreprises incluent généralement l'accès à des conseils financiers. Les régimes de retraite collectifs organisent aussi des séances d'information pour leurs participants.

PAS D'ÉDUCATION ÉCONOMIQUE AU SECONDAIRE

La disparition du cours d'économie au secondaire, en 2009, a été critiquée de toutes parts. Un nouveau cours a été élaboré et n'attend que la signature du ministre pour être offert à la rentrée de septembre prochain, selon une source au sein de la bureaucratie. Mais les bouleversements récents à la tête du Ministère n'aident pas son approbation.

Le CPQ plaide pour un retour de la littératie financière à l'école. « J'en ai parlé à l'ancien ministre de l'Éducation, au ministre des Finances et au premier ministre, qui s'est montré sensible à la question », indique Yves-Thomas Dorval.

S'il obtient le feu vert du ministre, le nouveau cours d'éducation financière serait optionnel.

PARLER D'ARGENT DÈS LE PRIMAIRE

De son côté, le responsable de l'éducation financière à l'AMF s'apprête à « passer par-dessus » le ministère de l'Éducation en s'adressant directement aux enseignants, pour les inciter à intégrer des questions d'argent à leur contenu.

« Les enseignants ont besoin d'outils, mais ceux qui existent sont méconnus, explique Camille Beaudoin. On va donc lancer un concours pour les faire connaître dans les écoles. »

Beaucoup de programmes sont financés par le Fonds pour l'éducation et la saine gouvernance, garni grâce aux amendes et pénalités imposées par l'AMF. Le fonds a reçu 6,2 millions en 2015.

15 % Proportion des adolescents de 12 à 17 ans qui ont des dettes, en moyenne 600 $, ce qui monte à 1290 $ chez les 16-17 ans 

Source : Marie J. Lachance, département des sciences de la consommation de l'Université Laval

LES BANQUES PEUVENT-ELLES INFORMER CORRECTEMENT ?

De nombreux outils sont conçus par les institutions financières, qui financent aussi des programmes d'éducation. Mais leur engagement dans le domaine est critiqué.

Comment peuvent-elles éduquer les consommateurs de façon crédible, alors que leur but est de faire des profits en offrant du crédit et des outils d'épargne et d'investissement ?

« La question se pose, puisque les institutions financières sont la première source d'information pour les consommateurs, répond Camille Beaudoin. Notre pari, c'est qu'une meilleure éducation financière les forcera à améliorer leurs services pour garder la confiance du public. »