Chaque dimanche, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Martin Pelletier, de la firme TriVest.

Quel a été l'événement le plus significatif des derniers jours en Bourse?

Les principaux indices boursiers mondiaux ont glissé sous leur moyenne mobile des 200 derniers jours (un indicateur utilisé en analyste technique). Au cours des dernières années, la Bourse a rebondi après avoir touché sa moyenne mobile sur 200 jours. Cette fois-ci, la Bourse semble avoir de la difficulté à rebondir. Ça veut dire que l'investisseur qui avait pris l'habitude d'acheter sur faiblesse du marché ne se montre pas aussi résilient que par le passé. Mais il est encore trop tôt pour affirmer que ce repli du marché est un couteau qui tombe, falling knife, ou une autre occasion d'achat.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement?

Le prix déprécié des matières premières m'inquiète. Celui du baril de pétrole, notamment. Le prix du baril de brut est un très bon indicateur de la santé de l'économie mondiale. En particulier, pour les économies qui connaissent une croissance rapide comme celles des marchés émergents. L'appréciation du dollar américain a aussi eu un impact. Les investisseurs semblent s'être précipités sur les titres américains et les obligations corporatives américaines, ce qui me semble devenu une crowded trade, en d'autres mots: des investissements un peu trop populaires.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir?

Je ferais preuve de prudence et j'accumulerais progressivement des positions. Je n'investirais pas tout d'un seul coup. Pour ma part, je fais appel au marché des options lors de l'établissement de positions afin de m'aider à gérer une partie de l'incertitude à court terme.

Par exemple, pour ceux qui souhaitent profiter du récent repli dans le secteur de l'énergie, acquérir des options d'achat ou vendre des options de vente est mieux que d'acheter des actions de compagnies elles-mêmes, car ça offre une forme de protection à la baisse. Une stratégie semblable peut aussi être appliquée à l'ensemble du marché par l'entremise des fonds négociés en Bourse comme les iShares S&P/TSX 60 Index Fund (symbole XIU), pour ceux qui veulent profiter du repli boursier au Canada. Il y a aussi les iShares MSCI EAFE Index Fund (symbole EFA), pour ceux qui sont bullish pour l'Europe, l'Australie et l'Asie.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

Tout ce qui a un lien avec les prêts à risque (subprime) ou les titres à hauts rendements adossés par de vagues actifs collatéraux qui sont difficiles à comprendre. Ne vous laissez pas attirer par les gros rendements alléchants.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus?

Je dirais que la plupart des experts se montrent trop optimistes avec leurs prévisions de croissance pour l'économie américaine. Bien que l'économie américaine agisse comme meneuse à l'échelle mondiale avec son impressionnante reprise, je pense que c'est plus que bien reflété dans les évaluations boursières actuelles. On voit encore des titres atteindre de nouveaux sommets historiques. Ça ne veut pas dire que la Bourse ne peut pas aller plus haut, mais j'estime qu'il est toujours mieux de se montrer légèrement prudent et de se protéger durant les périodes de complaisance excessive. Et heureusement, le coût pour le faire est très raisonnable compte tenu des niveaux actuels de volatilité.