Les séjours d'études à l'étranger gagnent en popularité auprès des universitaires. En 2011-2012, pas moins de 11 % des étudiants au premier cycle avaient participé à un programme d'échange de courte durée. À l'UQAM, leur nombre a bondi de 132 % en cinq ans! Le succès de la formule est incontestable, mais qu'en est-il du prix à payer et des retombées financières d'une telle expérience?

L'autre façon d'apprendre

De plus en plus d'entreprises canadiennes sont à la recherche de diplômés ayant acquis des compétences dans le cadre d'expériences à l'étranger, selon l'Association des universités et des collèges du Canada.

Les employeurs souhaitent récolter les retombées à long terme des réseaux tissés par les employés actifs sur la scène internationale.

Afin de comprendre ce qui motive les participants, La Presse Affaires a interrogé Marie-Hélène L'Heureux, agente de recherche et de planification au service des relations internationales à l'UQAM, et Robyn Wiltshire, directrice du bureau des études internationales à l'Université McGill.

Q : Comment expliquer la popularité croissante des études à l'étranger ?

UQAM : « Plusieurs étudiants font des séjours à l'étranger dès le secondaire et le cégep, alors ils ont moins peur de vivre l'expérience à l'université. Nous faisons beaucoup de publicité sur le campus et les bourses sont plus nombreuses qu'avant. »

McGill : « L'intérêt pour les échanges a augmenté de 25 % en cinq ans chez nous, mais on sent aussi un grand attrait pour les stages à l'étranger, les projets de recherche ailleurs dans le monde et les trimestres où des groupes d'étudiants se déplacent dans un autre pays avec leur professeur, comme au Panama (biologie, sociologie, environnement) ou à la Barbade (gestion des eaux, géographie, environnement). »

Q : Quelles sont les motivations pour vivre l'aventure ?

UQAM : « Les étudiants veulent apprendre une autre langue, voir du pays, découvrir de nouvelles cultures, sortir de leur zone de confort et acquérir des compétences utiles sur le marché du travail. Certains veulent aussi suivre des cours dans leur domaine qui ne sont pas offerts à l'UQAM. Par exemple, un étudiant en sciences politiques pourrait aller au Mexique afin de suivre un cours plus poussé sur la politique mexicaine. »

Q : Quel est le profil des étudiants sélectionnés ?

McGill : « Nous choisissons des jeunes préoccupés par leurs performances scolaires et qui ont en moyenne un GPA de 3,6 sur une possibilité de 4, ce qui est très élevé. Avec les défis qu'ils rencontrent à l'étranger (chocs culturels, période d'adaptation, études dans une autre langue, modes d'évaluation différents), c'est important qu'ils aient les capacités de réussir. »

UQAM : « Ils sont souvent très engagés sur le campus, dans les associations étudiantes et les activités du centre sportif. La plupart étudient au premier cycle, puisque les programmes d'échange exigent d'avoir terminé au moins un an avant de partir. À la maîtrise, après un an de cours, les étudiants commencent la rédaction de leur mémoire, donc c'est moins pertinent. Mais certains étudiants au deuxième cycle font des séjours de recherche pour leur projet de mémoire ou de thèse. »

Q : Sont-ils tenus d'obtenir de bons résultats pendant leur échange ?

UQAM : « Au moment de reconnaître le cours suivi à l'étranger, on note uniquement un échec ou un succès. Mais on suggère aux étudiants d'obtenir des résultats élevés. S'ils veulent être admis à la maîtrise ou obtenir une bourse, les notes obtenues à l'étranger peuvent compter. En cas d'échec, on leur demande parfois de rembourser une partie de leur bourse. »

Q : Que pensez-vous de l'idée voulant que les étudiants aillent à l'étranger seulement pour faire la fête ?

McGill : « Les étudiants font la fête à Montréal aussi. À leur âge, c'est normal de s'amuser. En même temps, ils travaillent fort et rentrent avec une maturité qui saute aux yeux dès qu'on les revoit. »

Principales sources de financement

• Bourses à la mobilité du gouvernement québécois (jusqu'à 4000 $ par trimestre, selon le coût de la vie dans le lieu du séjour)

• Bourses d'excellence

• Soutien financier des Offices jeunesse internationaux du Québec

• Donateurs privés

Sources : Association des universités et des collègues du Canada, UQAM, McGill

Les universités québécoises

Université de Montréal

Nombre d'étudiants

2008-2009 : 491

2013-2014 : 761

Facultés (en 2014)

- Arts et sciences (58 %)

- Aménagement (8 %)

- Sciences de l'éducation (6 %)

Pays les plus populaires : France, États-Unis, Belgique, Sénégal, Suisse

UQAM

Nombre d'étudiants

2008-2009 : 181

2013-2014 : 430

Facultés

- Sciences de la gestion (35 %)

- Communications (18 %)

- Sciences politiques et droit (14 %)

- Arts (14 %)

Pays les plus populaires : France, États-Unis, Belgique, Espagne, Royaume-Uni, Suisse

L'UQAM fait partie du programme National Student Exchange, qui a des ententes avec 180 universités canadiennes et américaines.

Le Bureau de coopération interuniversitaire, autrefois connu sous le nom de CREPUC, a établi des partenariats avec 500 établissements scolaires dans le monde.

Source : UQAM

Université Laval

Nombre d'étudiants

2008-2009 : 770

2013-2014 : 860

Facultés

- Lettres et sciences humaines (20 %)

- Médecine (18 %)

- Sciences de l'administration (16 %)

Pays les plus populaires : France, Belgique, Suisse, Sénégal, Chili, Chine

McGill

Nombre d'étudiants

2008-2009 : 346

2013-2014 : 602

Facultés non disponibles

Pays les plus populaires : Australie, France, Angleterre, Espagne, Pays-Bas, Italie, Singapour

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Lorsqu'ils embauchent de nouveaux employés, 60 % des employeurs accordent de la valeur aux postulants ayant étudié à l'étranger.

Les nouveaux employés ayant une expérience internationale peuvent s'attendre à des salaires plus élevés à l'embauche, sont plus performants et sont plus susceptibles de progresser rapidement au cours de leur carrière que les employés ne possédant pas ce type d'expérience.

Source : QS Global Employer Survey Report, 2011

Retour sur l'investissement

« Même si j'avais déjà un bac et une maîtrise avant d'aller en France, la formation a bonifié mes méthodes et mes connaissances sur à peu près tout dans le domaine. Je me suis transformé en machine à analyser les situations en administration publique. Aussi, le fait d'être en contact avec d'autres cultures a fait évoluer mon regard sur moi-même et sur la société d'où je viens.

Le propriétaire d'Intangible connaissait la valeur de mon école, qui est la meilleure de la francophonie dans le domaine, et il a vite compris que je pouvais être un atout pour lui.

Mais pour la majorité des employeurs, mon expérience à l'international ne changeait rien. À moins d'aller dans une école hyper reconnue comme Harvard, Oxford ou Yale, l'acte d'étudier à l'étranger ne bonifie pas nécessairement une candidature au Québec. Dans toutes mes entrevues d'embauche, jamais on ne s'est intéressé à mes études en France. »

- Jocelyn Caron, vice-président d'Intangible Gouvernance École Nationale d'Administration publique de France - 2009 à 2011

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« C'est grâce à cette formation que j'ai décidé du reste de mon avenir en rédaction moderne. Je croyais que je serais faible par rapport aux Français, puisqu'ils baignent dans la littérature de leurs ancêtres, mais force est de constater que ce fut tout le contraire. Je me suis découvert une force, un plaisir et un désir d'écrire en vivant en France. Aujourd'hui, je suis correcteur d'épreuves dans une des plus grosses boîtes de traduction mondiales.

Le fait d'avoir approfondi ma connaissance du français, d'avoir fréquenté une université française et une université anglaise (j'ai également fait une maîtrise à l'Université McGill) m'a apporté un énorme avantage sur mon C.V.

On pourrait aussi dire que cette aventure m'a aidé d'un côté plus artistique, car je suis également écrivain. Il est clair que l'influence de mon expérience en territoire français peut se lire à travers les romans que je publie encore aujourd'hui. »

- Maxim Collins, correcteur chez SDL International et auteur - Programme de lettres modernes à l'université d'Aix-Marseille en France - 2005 et 2006