Depuis cinq ans, Laurent travaille pour le gouvernement du Québec comme contractuel dans le milieu de l'éducation. Cet ancien travailleur autonome de 53 ans aime sa sécurité d'emploi, dont ses longues vacances estivales.

Son père, un entrepreneur autodidacte, vendait à de grandes entreprises de l'équipement lourd tel des moteurs ou génératrices d'urgence. Son enfance avait été marquée par la pauvreté et de nombreuses privations. « Il en a tellement souffert qu'il tentait d'épargner le plus possible dans le but de profiter d'une retraite paisible et confortable », raconte Laurent.

En 2011, son papa meurt à 77 ans en laissant un héritage de 900 000 $ à ses trois enfants. Cette somme est séparée en parts égales. «Je me retrouve avec 300 000 $ et j'aimerais connaître la meilleure stratégie d'investissement. Je ne veux pas que cette somme rapporte seulement 1 % d'intérêt par année.»

Ce passionné de motos et de mécanique automobile s'est informé auprès de sa banque. «J'ai eu l'impression de rencontrer un vendeur de voitures usagées qui tentait de me vendre un produit. On m'a parlé en termes techniques difficilement compréhensibles pour moi.»

Laurent rêve aussi de prendre sa retraite dans 13 ans, soit à 67 ans.

Question: quelle somme doit-il mettre de côté afin d'aspirer au même niveau de vie?

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PORTRAIT

Laurent

53 ans

Contractuel pour le gouvernement

Salaire : 75 000 $

REER : 54 000 $

CELI : 26 000 $

Bien immobilier : maison d'une valeur de 475 000 $ payée

Frais mensuels : électricité, internet, câble, assurances, taxes municipales et scolaires : 300 $ par mois

Cellulaire : 70 $ par mois

Nourriture : 400 $ par mois

Sorties : 400 $ par mois

Voyages : 4000 $ par année

Voitures et motos (essence, entretien, assurances) : 500 $ par mois

Épargne : 300 000 $ provenant d'un héritage

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Objectif : Revigorer son fonds de retraite

À première vue, la situation de Laurent paraît extrêmement enviable. Il n'a aucune dette et possède une maison d'une valeur de 475 000 $ entièrement payée.

La seule ombre au tableau est liée à ses économies pour sa retraite. Son pécule s'élève à 80 000 $ répartis dans un REER (régime enregistré d'épargne-retraite) et un CELI (compte d'épargne libre d'impôt).

La providence lui offre, à 53 ans, un héritage de 300 000 $. « Laurent détient une belle occasion de se constituer un fonds de retraite intéressant. À l'heure actuelle [sans son héritage], et en tenant compte de ses cinq meilleures années de revenus, il toucherait environ 32 000 $ à la retraite », explique Fabien Major, conseiller en sécurité financière chez Major Gestion Privée.

Grâce à l'obsession de son père pour l'épargne, Laurent peut maintenant envisager une retraite à l'abri de soucis financiers. Auparavant, il doit franchir quelques étapes essentielles.

«D'abord, en 2013, il doit maximiser les cotisations REER inutilisées de 40 000 $.»

Son collègue Martin Dupras, président de Con-For financiers, suggère la même chose. « Par la suite, Laurent doit choisir des investissements hors REER qui doivent être fiscalement intéressants. »

Des placements qui vont fructifier jusqu'à la retraite

Chaque semaine, les conseillers financiers accueillent des personnes comme Laurent qui reçoivent une somme d'argent inattendue.

«Cela peut être une compensation financière pour une perte d'emploi, une somme provenant du rachat d'une entreprise ou d'une séparation», énumère Fabien Major.

Avant de placer le précieux pécule, les spécialistes financiers vont tous tenir compte d'une chose essentielle. «Peu importe le niveau d'actifs dont on dispose, que ce soit 5000 $, 500 000 $ ou 5 millions de dollars, il faut chercher à respecter sa tolérance au risque», indique Daniel Laverdière, directeur principal à la Banque Nationale Gestion privée 1859.

«S'il y a une baisse ou une hausse à la Bourse, il ne faut pas que cela empêche Laurent de dormir», illustre Fabien Major.

Des frais de gestion 

Le néophyte en matière de placements ou de financement doit se méfier de certains conseillers qui vont lui dire la phrase suivante: «Je ne te charge rien pour mes conseils.»

«En réalité, il y a toujours des frais sous-jacents aux produits offerts par un conseiller d'une banque ou d'une firme indépendante, observe M. Laverdière. Ces frais de gestion peuvent généralement s'élever entre 1,5 et 3,5 %.»

À l'abri de l'impôt

Revenons au cas de Laurent, qui a hérité d'une somme de 300 000 $. Il a déjà utilisé 10 000 $ pour entreprendre des rénovations dans sa résidence.

Tous les experts financiers lui recommandent de maximiser ses cotisations REER inutilisées de 40 000 $. Il lui reste donc une somme de 250 000 $ qui devrait servir à solidifier son fonds de retraite.

Tenant compte de son profil d'investisseur «modéré», Fabien Major recommande d'investir ce capital dans un fonds de placement équilibré mondial. «Cela signifie des placements à l'échelle planétaire dont la moitié est plus sûre et l'autre, plus volatile.»

Pendant les 14 prochaines années, ses épargnes en REER et CELI devraient profiter d'un rendement moyen de 4 à 5% par année. À sa retraite, Laurent touchera également une rente du Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP).

«En tenant compte d'un taux d'inflation de 2 %, il est raisonnable de concevoir que Laurent pourrait recevoir un montant annuel de 60 000 $ dès qu'il prendra sa retraite», indique M. Major.

Statistiques Canada évalue l'espérance de vie de Laurent à 91 ans. Grâce à la grande parcimonie de son père, il peut bénéficier d'une retraite beaucoup plus confortable. «Sans cet héritage, il aurait touché seulement 27 000 $ par année après 67 ans.»

Épargne annuelle de 10 000 $

Si Laurent conserve son emploi actuel pour le gouvernement, M. Major lui recommande d'économiser environ 10 000 $ par année. «S'il place par exemple 5000 $ dans un REER et un autre 5000 $ dans un CELI, Laurent pourra compter conserver 100 % de son niveau de vie actuel.»

En toute quiétude, Laurent pourra profiter de sa passion pour ses voitures et réaliser son rêve de s'établir à la campagne. Il est chanceux. «Seulement 16 % des Québécois ont un plan financier par écrit pour leur retraite, dit M. Major. Il ne faut donc pas s'étonner que près de 20 % de la population québécoise espère un gain de loterie pour financer ses vieux jours.»