Chaque samedi, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Peter Guay, CFA, gestionnaire de portefeuille chez PWL Capital.

Quel a été l'événement le plus significatif des derniers jours en Bourse?

R Je pourrais vous parler de la baisse des taux d'intérêt en Europe ou du fait que le S&P 500 a atteint un nouveau sommet, mais ce sont des distractions peu significatives dans le contexte de la gestion d'argent à long terme. Dans notre philosophie d'investissement, on agit sans tenter de prédire les tendances de semaine en semaine. Par contre, je dirais que le marché boursier américain est devenu plus cher, tandis que les marchés canadien, européen et asiatique sont relativement bon marché et que les marchés émergents sont probablement les moins chers de tous. Je ne prédis pas qu'ils vont monter demain, mais en surpondérant ces marchés pour mes clients aujourd'hui, je cours moins de risque et j'augmente leur rendement espéré dans le futur.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement?

R On regarde les indicateurs qui nous démontrent quels marchés sont relativement moins chers ou plus chers. Le meilleur indicateur jusqu'à maintenant pour cela est le ratio cours/bénéfices de Robert Shiller. Ce ratio est basé sur la moyenne de 10 ans des bénéfices sous-jacents des compagnies et il est ajusté pour l'inflation. En comparant ce ratio pour les marchés canadien, américain, et internationaux (développés et émergents), on rééquilibre nos portefeuilles pour vendre les marchés dans lesquels le ratio est au-dessus de la moyenne à long terme et on achète ceux qui sont en bas. Les études académiques démontrent que cet indicateur explique jusqu'à 40% des rendements dans les 10 ans qui suivent.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir?

R Nos portefeuilles sont toujours positionnés de sorte que chaque marché est représenté, y compris les obligations, les fonds de placement immobiliers, les fonds de services aux collectivités, et les actions canadiennes, américaines et internationales. Il est très rare qu'on sorte d'un marché complètement. Cela dit, pour un nouveau portefeuille aujourd'hui, j'achèterais des obligations à court terme seulement, et j'en achèterais le moins possible, tout dépendant de la situation du client. Je sous-pondérerais les actions américaines et je surpondérerais les actions internationales et de pays émergents. Pour ce faire, je recommande d'utiliser des fonds négociés en Bourse (FNB) à faibles frais, qui capturent les indices les plus diversifiés possible dans chaque marché. Vanguard vient de lancer une bonne sélection de FNB au Canada pour mettre en oeuvre cette stratégie. Ils se retrouvent dans les portefeuilles de tous mes clients.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

R Les obligations à longue durée et les obligations à rendement réel sont très risquées et se négocient à de très faibles rendements présentement. Il y a même des obligations à rendement réel qui s'échangent à un rendement réel négatif, ce qui garantit que l'acheteur ne suivra même pas l'inflation avec son investissement. J'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi un investisseur achèterait un tel placement!

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus?

R À cause des craintes de ralentissement en Chine, la baisse de la devise en Inde et les ralentissements au Brésil et en Russie, les Bourses de ces pays se négocient à des prix très attirants par rapport aux profits qu'on peut en retirer. En achetant un FNB bien diversifié de pays émergents, je peux donc acheter ces profits à bon prix, sans craindre de perdre mon capital à long terme. Tant que le capitalisme continue à fonctionner, je continuerai à être bon capitaliste et j'achèterai les marchés quand ils sont à rabais.

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Peter Guay est gestionnaire de portefeuille et planificateur financier chez PWL Capital à Montréal. Il est personnellement responsable pour 240 millions de dollars d'actifs sous gestion. Peter Guay a exercé diverses fonctions au sein du cabinet, notamment celles de directeur de l'exploitation, qui l'ont amené à diriger des projets au service de recherche et à contribuer à la refonte des systèmes de gestion de portefeuille et de gestion des relations clients.