Depuis 2009, Olivier, 27 ans, travaille à temps plein comme rédacteur pour une firme de communications d'Ottawa. Durant ses études universitaires, il a épargné, tel un écureuil, un pécule de 20 000 $. Son but? Entreprendre une maîtrise en sciences politiques en Grande-Bretagne.

Cependant, son projet a été mis de côté au profit d'occasions favorables sur le plan professionnel. Bénéficiant aujourd'hui d'une sécurité d'emploi, Olivier garde toujours ce désir d'apprendre.

En septembre, il commencera une Maîtrise en administration des affaires (MBA) à l'Université d'Ottawa. «On offre ce programme à temps plein aux professionnels qui suivent la formation le soir et les fins de semaine durant 24 mois», explique-t-il. Olivier évalue le coût de son projet à 25 000 $ échelonné sur deux ans. Il détient 83 000 $ répartis dans un compte d'épargne, un REER (Régime enregistré d'épargne retraite) et un CELI (Compte d'épargne libre d'impôt).

Olivier se demande où prendre l'argent. «Si j'utilise le REER, je crains un effet néfaste sur mon taux d'imposition.» Doit-il opter pour son compte d'épargne ou le CELI? D'ici cinq ans, il envisage d'acheter une résidence et profiter du RAP (Régime d'accession à la propriété.) De plus, après ses études, Olivier se demande quoi faire avec la cagnotte restante. 

Portrait

Olivier 27 ans, rédacteur

Revenu brut par année : 55 000 $

REER : 34 000 $

CELI : 27 000 $

Compte d'épargne : 22 500 $

Loyer : 800 $ mois (incluant les frais d'internet, électricité, etc)

Aucune dette

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Le REEP à la rescousse

«La meilleure solution pour Olivier est de recourir au Régime d'encouragement à l'éducation permanente (REEP), un outil encore peu connu du grand public et même des conseillers qui travaillent dans les institutions financières», explique Eric F. Gosselin, administrateur agréé et planificateur financier indépendant.

Le programme consiste à retirer une somme qui peut aller jusqu'à 10 000 $ par année de son REER (Régime enregistré d'épargne-retraite) sans obligation de payer d'impôt. «Il faut qu'Olivier soit aux études à temps plein. Il a 10 ans pour rembourser le REEP», ajoute M. Gosselin.

L'expert suggère à Olivier de prendre un retrait de 10 000 $ et de contribuer de nouveau dans son REER. «Cela génèrera 3 840 $ d'économies fiscales dans son prochain rapport d'impôt.»

En 2014, Olivier pourra répéter l'exercice de retrait et contribution au REER. «Bien structurée, cette stratégie peut même rapporter jusqu'à 40 000 $ en déduction fiscale, et ce, sur une période de 13 mois.»

Bonne nouvelle pour le jeune rédacteur âgé de 27 ans: le REEP n'a pas besoin d'être totalement remboursé s'il veut s'acheter une maison. «Olivier pourra utiliser le Régime d'accession à la propriété (RAP) et réaliser ses deux rêves, soit l'obtention d'une meilleure éducation et devenir propriétaire.»

Le spécialiste lui conseille de placer par la suite son épargne dans des portefeuilles rapportant un rendement supérieur à 1,35 %, le taux d'intérêt, qu'il a actuellement.

Un retour aux études favorisé dans un monde en mutation

Acquérir une nouvelle formation ou choisir de retourner aux études à temps plein ou à temps partiel est inéluctable pour de nombreux professionnels.

Ce phénomène s'observe un peu partout dans le monde. «Une personne sur trois continuera à étudier alors qu'elle travaille à temps plein», dit Paul Bélanger, professeur et directeur de l'Observatoire compétences-emplois au Département Éducation et formation spécialisées de l'UQAM.

Plusieurs raisons incitent les travailleurs à retourner sur les bancs d'école. «Aujourd'hui, l'employé affronte un monde en transformation et des changements dans les modes de production. Le développement professionnel continu est un concept qui devient très important.»

Au Québec, depuis deux ans, une formation est obligatoire pour les ingénieurs. «Des métiers spécialisés comme les architectes doivent obtenir de nouvelles formations. Le but est de continuer à pratiquer une profession qui elle, est en développement continu.»

Exit donc la traditionnelle montre offerte après 25 ans de fidélité pour le même employeur. «On constate que les gens changeront de travail au moins quatre fois durant leur parcours professionnel», note M. Bélanger.

De plus, au Québec, seulement 30 % des travailleurs occupent un emploi permanent avec une sécurité d'emploi et des avantages sociaux.

Ailleurs dans le monde

En France, le gouvernement a instauré une formation payée liée à l'entreprise. Cela permet à l'employé de s'adapter, par exemple, aux nouvelles technologies.

«Là-bas, on offre aussi un congé de formation au plan individuel afin de permettre à l'employé de se repositionner dans sa carrière», précise M. Bélanger.

Différents programmes favorisent le retour aux études dans plusieurs pays d'Europe. «En Angleterre, une commission d'enquête non gouvernementale a même proposé d'implanter un congé sabbatique universel à toutes les personnes de 50 ans afin de parfaire leur formation.»

Ce rapport est encore sujet à discussion.

«Au Canada, il n'y a pas encore de politique claire quant à l'octroi d'un congé d'éducation individuel pour favoriser le retour aux études», déplore-t-il.

Le programme tel que le Régime d'encouragement à l'éducation permanente (le REEP) est déjà un premier pas. En 2011, au Québec, 2840 personnes ont utilisé le REEP, d'après les statistiques compilées par l'Agence du Revenu du Canada. Entre 2005 et 2011, ce chiffre est resté sensiblement le même.

Toutefois, il faut plus, selon lui. «Cela signifie qu'on devrait légiférer et proposer des formules souples de congé consacré à la formation.»

Le cas d'Olivier 

En septembre, le jeune rédacteur de 27 ans désire faire une maîtrise en administration des affaires afin d'ajouter une corde à son arc sur le plan professionnel. Ce sacrifice financier de deux ans lui sera grandement profitable, de l'avis des spécialistes consultés.

«En augmentant son niveau de scolarité, cela peut engendrer un retard dans l'accumulation du capital retraite, mais cette décision risque de conduire à un emploi plus rémunérateur qui facilitera l'accumulation de capital pour sa retraite», estime le planificateur Eric F. Gosselin.

De son côté, le professeur Paul Bélanger conclut sur un ton empreint de sagesse: «Oliver investit de façon très rentable pour son avenir.»

Aux études en 2012-2013 :

Jeunes (24 ans et moins) à temps plein à l'université 47 %

Adultes (25 ans et plus) à temps plein à l'université 19 %

Jeunes à temps partiel 7 %

Adultes à temps partiel 27 %

Source : Données compilées par Pierre Doray, directeur du CIRST (Centre universitaire de recherche sur la science et technologie) de l'UQAM.