Vous êtes coincé depuis plusieurs minutes dans un bouchon au Quartier DIX30. Et même si vous partagez les opinions du maire du Plateau-Mont-Royal sur le côté «toc» de ce soi-disant milieu de vie urbain, vous êtes forcé de constater que ce projet doit être bien rentable pour ses propriétaires et que vous aimeriez bien en être un!

Eh bien, c'est possible, du moins indirectement. Car, comme bien des centres commerciaux, le DIX30 appartient à de grands investisseurs institutionnels, dont RioCan Real Estate Investment Trust, qui en détient la moitié. Or, vous pouvez acheter des actions de RioCan en Bourse. Seulement voilà, le DIX30 n'est que l'une des 344 propriétés commerciales dans lesquelles il détient, en tout ou en partie, une participation. Ces propriétés sont situées surtout en Ontario, mais aussi ailleurs au Canada et même aux États-Unis. Quarante-six sont situées au Québec.

À la fin du mois de mars 2013, il possédait plus de 53,7 millions de pieds carrés de surface louable nette qu'il louait à des sociétés comme Walmart, Canadian Tire, Famous Players/Cineplex/Galaxy Cinemas, Metro, Super C, Winners, Loblaws et Bureau en gros.

En somme, RioCan est un fonds de placement immobilier, le plus important du Canada, dont la valeur est de 14,4 milliards.

Comme la plupart des fonds de placement, RioCan est constitué en fiducie, de sorte qu'il distribue une très grande partie de ses revenus aux détenteurs de parts pour que ceux-ci soient imposés directement sur ces revenus et non RioCan. RioCan verse une distribution mensuelle de 11,75 cents, soit 1,41 $ par année. La distribution était de 1,14 $ en 2003. À son cours récent de 25,65 $, l'unité de RioCan vous offre donc un revenu de 5,5 %.

On compte 28 de ces fiducies de placement immobilier (FPI) cotées à la Bourse de Toronto. Outre les centres commerciaux, elles permettent de participer à d'autres segments du marché immobilier comme les immeubles résidentiels à logements multiples, les tours de bureaux, les immeubles industriels, les résidences pour retraités et les hôtels.

Des titres financiers volatils

Ces FPI sont classés dans le secteur des titres financiers dans les indices boursiers. C'est qu'elles financent leurs immeubles par emprunts hypothécaires, dans des proportions variant entre 50 et 70 %. Elles utilisent pour baromètre le taux sur les obligations fédérales de 10 ans.

En Bourse, les FPI ont le vent dans les voiles lorsqu'elles ont un accès facile et bon marché au crédit, comme ce fut le cas au cours des quatre dernières années. Ainsi, 100 $ investis dans l'indice S&P/TSX plafonné des FPI en mars 2009 en valaient 308,30 $ quatre ans plus tard, soit un rendement annuel composé de 32,5 %, le meilleur de tous les secteurs boursiers. C'est que durant cette période, le taux des obligations de 10 ans a atteint 1,58 % en juillet 2012.

Mais, durant la dernière crise financière, la valeur en Bourse des FPI a chuté de 66 % entre son sommet de février 2007 et son creux de mars 2009, et ce, même si les résultats financiers des fiducies n'étaient pas touchés. C'est la baisse appréhendée de la valeur des immeubles résultant du coût de financement plus élevé qui a le plus contribué à leur chute.

Récemment, la brusque remontée à près de 2,5 % du taux des obligations de 10 ans a fait chuter les FPI de 17,5 % entre leur sommet du 30 avril et leur creux du 24 juin. Certains voient dans cette correction une occasion d'achat. Ainsi, la baisse de 9 % du titre de RioCan au deuxième trimestre le rend désormais attrayant aux yeux de Neil Downey, analyste chez RBC Marchés des capitaux, qui augmente sa recommandation à « Outperform » avec un prix cible de 31 $. Idem pour Alex Avery et Brad Sturges, de Marchés Mondiaux CIBC, qui espèrent un rendement de 15 à 20 % pour l'univers des FPI qu'ils suivent.

Encore trop chers

Certains gestionnaires spécialistes des actions de dividendes ne sont pas si enthousiastes. « Bien que les évaluations se sont améliorées, elles continuent d'être élevées tant dans l'absolu que relativement à d'autres secteurs. Les FPI en général ne sont pas un secteur où nous augmentons actuellement notre présence », indique Hovig Moushian, qui gère le Fonds de revenu de dividendes Mackenzie Saxon.

Rory Ronan, gestionnaire de la Catégorie de dividendes Plus Trimark, jugeait en février que les FPI étaient surévaluées de 25 %. À leur niveau actuel, ceux qui en détiennent peuvent les conserver, mais il faudrait qu'elles soient 10 % moins chères pour qu'il se décide à en acheter. Il n'en détient aucune actuellement.

Le Barometer High Income Pool, géré par David Burrows, détenait près de 23 % de son portefeuille en FPI en décembre 2012, une proportion qui n'avait pas beaucoup varié en trois ans. Cette proportion n'était plus que de 12 % à la fin du mois de mai et de 8 % à la fin du mois de juin. Il ne voit pas les taux sur les obligations de 10 ans grimper à plus de 2,75 % et augmente de nouveau sa proportion de FPI, mais se limite aux immeubles industriels, car il croit que les loyers vont augmenter plus rapidement dans ce secteur.