Dimanche soir de novembre sur l'autoroute Bonaventure, à Montréal. Un camion-remorque échappe des structures d'acier d'environ deux mètres de long qui percutent les deux voitures qui roulent en arrière. Yvon Pelletier et sa famille ont de la chance dans leur malchance. À part un pneu qui est complètement déchiré, il n'y a aucun dommage à leur Volkswagen Touareg et surtout, aucun blessé.

Mais c'est maintenant avec sa compagnie d'assurances que M. Pelletier a un accrochage. Et il n'est pas le seul dans cette situation, car tous les assureurs appliquent la même politique. Voici le problème...

Comme il s'agit d'un véhicule à quatre roues motrices, le concessionnaire Volkswagen de M. Pelletier lui a recommandé de changer les quatre pneus. «Les pièces internes dans la transmission doivent travailler au même rythme. Si les roues n'ont pas la même rotation, ça défait la programmation des engrenages à l'intérieur», explique Simon Talbot, directeur du service après-vente chez Volkswagen Lauzon, à Saint-Eustache.

D'ailleurs, c'est écrit noir sur blanc dans le manuel du conducteur de M. Pelletier: Pour assurer une conduite sécuritaire, les véhicules quatre roues motrices doivent être équipés de pneus ayant la même taille, la même construction et la même bande de roulement.

Toyo Tires donne la même consigne. «Faut-il impérativement changer les quatre pneus en même temps sur un véhicule à quatre roues motrices? La réponse est oui», affirme Jason Willoughby, des services techniques de Toyo. Sinon, la transmission devra compenser pour la différence de vitesse de rotation, ce qui peut entraîner un bris prématuré.

«Avec un 4X4, les quatre pneus doivent avoir une usure égale, au risque d'avoir un bris dans le rouage», confirme George Iny, président de l'Association pour la protection des automobilistes (APA). Les autres types de véhicules devraient avoir au moins deux pneus de la même marque avec une usure semblable en avant et en arrière. Mais il est préférable d'installer quatre pneus identiques.

On peut tolérer une différence mineure dans l'usure, convient M. Talbot. Mais les pneus de M. Pelletier sont déjà assez usés. Et de toute façon, il est impossible d'installer le même modèle, car Toyo ne le fabrique plus.

Bref, il faut remplacer les quatre pneus. Mais La Capitale refuse de payer la note. Comme tous les assureurs, la compagnie paie uniquement pour les dommages directs causés par l'accident. «Le contrat est standard. Tous les assureurs l'appliquent de la même façon. C'est dommage pour M. Pelletier. Si les gens lui disent de remplacer les quatre pneus, pour nous ça ne change rien au contrat. On ne peut pas faire du cas par cas, car ça ne serait pas équitable envers les autres assurés», dit la porte-parole Audrey Bouchard.

Ainsi, La Capitale accepte de rembourser un seul pneu, ce qui coûte environ 325$. M. Pelletier devra payer 975$ pour remplacer les trois autres. Autrement, le concessionnaire ne pourra pas garantir les travaux.

M. Pelletier, qui avait une protection valeur à neuf, ne comprend pas pourquoi l'assureur refuse de faire la réparation conformément aux normes du manufacturier. «Mon véhicule était sécuritaire avant l'accident et je veux qu'il soit sécuritaire après l'accident», dit-il.

Mais les spécialistes en estimation du Groupement des assureurs automobiles trouvent que les manufacturiers exagèrent... et prêchent pour leur paroisse.

«Contrairement à l'avis de Toyo, il n'y a pas de chance que la transmission se brise parce qu'on roule avec des pneus qui ont une usure différente. Il faudrait rouler très longtemps avec des pneus qui n'ont la même taille pour endommager la transmission», rapporte Julie Bellemare, porte-parole du Bureau d'assurances du Canada (BAC).

Pour le BAC, les assureurs ne sont pas là pour faire l'entretien normal d'un véhicule. C'est à la discrétion du client de se payer des pneus neufs.

À propos de pneus d'hiver, voici un petit rappel : c'est à partir d'aujourd'hui que tous les véhicules immatriculés au Québec doivent être équipés de pneus d'hiver. Pas un, pas deux... mais bien quatre! Depuis 2008, le Code de la sécurité routière oblige l'installation de pneus d'hiver du 15 décembre jusqu'au 15 mars. Les retardataires s'exposent à une amende de 200$ à 300$.