Il n'y a que deux certitudes dans la vie: la mort et les impôts. Et même après leur décès, les contribuables doivent régler leurs comptes avec le fisc... enfin, la succession qui aura la responsabilité de produire leur déclaration finale.

Et parfois, c'est l'enfer, comme a pu le constater Suzanne Dagenais, dont la mère est décédée récemment.

Au début de février, la Banque TD envoie une série de feuillets fiscaux pour des certificats de placements au nom de sa mère, d'elle-même et de sa soeur. Or, les revenus d'intérêts qui figurent sur les T5 sont erronés. Certains montants se retrouvent en double sur le T5 des soeurs et de la défunte.

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La Banque TD admet les erreurs, en consultant les comptes à l'écran. Mais la banque renvoie Mme Dagenais à son comptable pour démêler le méli-mélo. Rien pour aider la dame qui prépare les déclarations de revenus elle-même.

Début mars, la Banque accepte finalement de lui émettre de nouveaux feuillets et demande à Mme Dagenais de rapporter les feuillets originaux à sa succursale. Mais les semaines passent et la cliente n'obtient toujours pas les documents.

La dame se plaint au service à la clientèle qui accuse réception... avant de la référer à sa succursale. Retour à la case départ! «On se retrouve bloqué dans une bureaucratie, déplore Mme Dagenais. On ne peut jamais avoir accès à la personne qui s'occupe des corrections. Il n'y a jamais d'imputabilité nulle part.»

À deux jours de la date butoir du 30 mars, pour la production des déclarations de revenus, la cliente n'a pas encore de feuillets. Elle se résout à produire les déclarations en se fondant sur l'information juste. Au diable les feuillets!

Excellente réaction de sa part. «Souvent, on fait fi des feuillets», explique Julie Lebreux, notaire et fiscaliste associée à l'étude Jolin Lebreux, de Granby.

Selon elle, il arrive que les institutions financières envoient des feuillets fiscaux au mauvais nom, dans les dossiers de succession. Il y a souvent des erreurs entourant les REER et les FERR, ajoute Michel Lavoie, CA et fiscaliste. «Il est important de bien vérifier les montants», dit-il.

En cas d'erreur, le préparateur de la déclaration doit utiliser les vrais chiffres. «Il faut faire une photocopie des états de compte, avec les intérêts qui ont été versés, pour être capable de fournir les preuves, si le fisc les demande», expose M. Lavoie.

Peu importe le feuillet, c'est l'intérêt couru qui compte, insiste Mme Lebreux. «Lorsqu'une personne meurt, on doit imposer les intérêts courus jusqu'au jour du décès dans sa déclaration de revenus. Il faut calculer les intérêts comme s'ils avaient été versés chaque jour, même s'ils n'étaient pas été encaissés au moment du décès», précise-t-elle.

Pour le gain en capital, le défunt est réputé avoir disposé de tous ses biens en rendant l'âme. Il doit donc payer les impôts sur le gain en capital dans sa dernière déclaration. Mais si la valeur des actifs chute, durant le règlement de la succession, il est possible d'utiliser les pertes en capital pour éponger, rétroactivement, l'impôt payé par le défunt. «Si on ne le fait pas, les pertes restent emprisonnées dans la succession», prévient Mme Lebreux.

Elle ajoute que, sur le plan fiscal, on a parfois avantage à ce que la succession s'étale sur plusieurs années, parce que la succession est considérée comme un contribuable indépendant qui a droit à une imposition progressive. Si les héritiers sont déjà très imposés, cela permet de fractionner les revenus et ainsi de réduire l'impôt.

À l'inverse, il ne faut pas brûler les étapes. Si le liquidateur remet les biens aux héritiers avant d'avoir obtenu le certificat de décharge auprès du fisc, il peut être tenu responsable des impôts impayés.

Mais revenons à Mme Dagenais. Pourquoi n'a-t-elle pas reçu les T5? «Lorsque les T5 ont été corrigés, ils ont été envoyés directement au gouvernement, et ce, avant la date limite des impôts. C'est la procédure d'envoyer les T5 corrigés et les lettres d'explications seulement au gouvernement», nous a dit la porte-parole du Groupe Banque TD, Fiona Hirst.

Pour rassurer la cliente, la Banque lui a finalement envoyé une copie des T5 annulés, une copie des T5 corrigés ainsi que les lettres explicatives qui ont été envoyés au fisc. De plus, un vice-président lui a écrit une lettre d'excuses. Avec cette combinaison de documents, elle devrait être blindée si jamais le fisc cogne à sa porte. Sinon, la Banque se dit prête à lui fournir des documents additionnels, au besoin.