Des dizaines de milliards en investissements privés et publics d'ici 20 ans? De nombreux projets d'exploitation de ressources exportables vers les marchés mondiaux?

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À n'en pas douter, le «Plan Nord» que propose le gouvernement québécois sur toutes les tribunes économiques et politiques recèle beaucoup d'attraits pour les entreprises d'ici.

Mais qu'en est-il pour les investisseurs boursiers? Quelles entreprises du «Quebec Inc.» cotées en Bourse pourraient être les mieux placées pour participer et, surtout, tirer profit des nombreux projets envisagés avec cet ambitieux programme?

Avec l'avis d'analystes chevronnés, La Presse Affaires a fait un tour d'horizon pour identifier ces entreprises qui pourraient être en première ligne des prochaines étapes du Plan Nord.

Certes, il est encore trop tôt pour chiffrer leur potentiel d'affaires et de rentabilité. Toutefois, plusieurs de ces sociétés sont déjà très actives dans le vaste nord québécois.

Que ce soit pour leurs propres projets, comme les mines d'or. Ou encore comme sous-traitants spécialisés des projets multimilliardaires qui sont menés par de grosses entreprises comme Hydro-Québec ou le géant métallurgique ArcelorMittal.

Aménagement primaire des sites des projets et de leurs voies d'accès, branchements aux réseaux d'énergie et de télécommunications, installation des équipements et leur mise en fonction.

Nul doute que le développement des divers projets envisagés dans le Plan Nord du gouvernement québécois passera d'abord par un important défi d'infrastructures.

Or, il s'agit d'un secteur de prédilection pour quelques entreprises québécoises inscrites en Bourse. À commencer par des colosses du génie-conseil et de la gestion de projets complexes, comme SNC-Lavalin et Genivar.

À propos de Genivar, les analystes notent favorablement sa stratégie de croissance par acquisition dans le marché des projets d'exploitation de ressources minérales et pétrolières.

Et même si cette croissance survient surtout dans l'Ouest du Canada, elle amplifie la prestance et l'expérience de Genivar dans un secteur - les grands projets de ressources - qui est prévu au noyau central du Plan Nord québécois.

De l'avis de Frédéric Bastien, analyste chez la firme Raymond James, Genivar a une «stratégie éprouvée de croissance par acquisitions» qui devait s'accélérer maintenant qu'elle a l'appui financier de deux poids lourds: la Caisse de dépôt et placement du Québec et l'Office d'investissement du régime de pension du Canada.

Quant à SNC-Lavalin, ces temps-ci, la perception des analystes et des investisseurs est ternie par les soupçons de malversations comptables -jusqu'à 35 millions? - et de liens douteux avec la famille du dictateur déchu Khadafi, en Lybie.

Des explications sont très attendues de la part des dirigeants de SNC-Lavalin lors de l'annonce des résultats financiers de fin d'exercice 2011. Cette annonce pourrait survenir d'un jour à l'autre, après le report du 2 mars dernier.

Mais pour l'analyste Pierre Lacroix, de Valeurs mobilières Desjardins, cette mauvaise séquence pour SNC-Lavalin devrait s'avérer de courte durée.

«Les investisseurs devraient se rappeler que les incertitudes boursières ont souvent été les meilleurs moments pour acheter des actions de SNC-Lavalin à bon prix, considérant la richesse de son carnet de commandes.»

Le contingent d'entreprises d'infrastructures québécoises qui pourraient bénéficier du Plan Nord comprend des firmes spécialisées de moindre taille, mais néanmoins performantes dans leur domaine.

Il s'agit notamment de fabricants de structures d'acier sur mesure comme Canam, basé en Beauce, et le Groupe ADF, en banlieue nord de Montréal.

Ce contingent comprend aussi les firmes CVTech, une spécialiste de l'installation et la réfection de réseaux de distribution d'électricité, ainsi que Stella-Jones, un fabricant de grosses pièces de bois traité (poteaux, traverses de rails) qui sont indispensables pour certaines infrastructures.

À propos de Canam, l'analyste Elaine Lae de Marchés des capitaux RBC estime que ce fabricant de structures d'acier est bien positionné pour tirer profit des «nombreuses occasions d'affaires attendues du Plan Nord du Québec de 80 milliards en investissement d'ici 25 ans.»

À propos de Stella-Jones, les analystes soulignent son élan de croissance dans un marché qui a plutôt bien résisté aux soubresauts économiques des dernières années. L'entreprise devrait frôler les 700 millions de revenus en 2012.

«Stella-Jones maintient une solide croissance parce que les transporteurs par rail et les distributeurs d'électricité continuent d'investir pour améliorer ou agrandir leurs réseaux», selon l'analyste Pierre Lacroix, de Valeurs mobilières Desjardins.

Pour être viables économiquement, tous les projets envisagés dans le cadre du Plan Nord du gouvernement québécois auront besoin de services de transport efficaces et fiables.

En raison des grandes distances à parcourir, bien sûr. Mais aussi des conditions de terrain et de météo souvent très difficiles.

Lors des premières étapes de prospection et de préparation des projets, il s'agira surtout du transport à la pièce du personnel spécialisé et de ses équipements.

Lors des étapes de développement, il faudra transporter des quantités de gros matériaux de construction (acier, béton) et des équipements industriels de production.

Après la mise en exploitation de ces projets, il faudra assurer leur approvisionnement continu en personnel et en matériel, tout en assurant le transport efficace des ressources produites.

Bref, le Plan Nord recèle un potentiel d'affaires considérable pour des entreprises de transport déjà bien implantées au Québec et accessibles aux investisseurs boursiers.

De l'avis d'analystes, ce groupe est mené par le Canadien National, réputé comme l'un des transporteurs ferroviaires les plus performants en Amérique du nord. Il comprend aussi l'entreprise de camionnage Transforce et le transporteur aérien Hélicoptères Canadiens, déjà très actif dans le nord québécois.

Dans les forums d'affaires qui se multiplient à propos du Plan Nord, Transforce promeut déjà sa filiale CK Logistics comme une spécialiste du camionnage de chargements spéciaux.

Chez Hélicoptères Canadiens, l'analyste des transports Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, souligne que ce plus gros transporteur héliporté au pays bénéficie d'une «demande robuste» pour ses services parmi les entreprises de ressources naturelles.

«Hélicoptères Canadiens est bien positionné pour profiter des nouvelles occasions qui émergeront des projets majeurs d'infrastructures dans ces régions (nordiques) au cours des prochains années», selon M. Doerksen.

Quant au Canadien National, «le Plan Nord représente une autre importante occasion de croissance d'ici quelques années», selon l'analyste Benoît Poirier de Valeurs mobilières Desjardins.

Dans son plus récent avis sur le CN, l'analyste montréalais estime que la réalisation des projets miniers du Plan Nord pourrait impliquer le transport en vrac de 100 millions de tonnes par an de minerais. Ça serait deux fois plus que le volume actuel.

Pour sa part, l'analyste Cameron Doerksen souligne l'expérience enviable du CN dans le transport en vrac de ressources dans l'Ouest canadien et tout le continent. Il s'agira d'un facteur très favorable pour son positionnement envers les projets prévus dans le Plan Nord au Québec.

Les projets d'exploitation minière constituent une bonne partie des ambitions du Plan Nord du gouvernement québécois.

D'autant plus qu'il s'agit d'un secteur d'activités qui mobilise déjà un bon nombre de PME québécoises en exploration minière et en services spécialisés.

Parmi celles à capital ouvert en Bourse, quatre entreprises se distinguent pour profiter le plus des ambitions du Plan Nord, de l'avis des analystes.

Les sociétés minières Osisko, Richmont et Virginia sont bien établies dans le secteur aurifère du nord québécois, comme chercheuse d'or ou comme exploitante de gisements importants.

Par ailleurs, encore méconnue hors du secteur minier, la société Orbit Garant, basée à Val d'Or, est devenue l'une des plus grandes entreprises de forages miniers au Canada.

Avec ses revenus prévus à plus de 160 millions cette année, les analystes voient Orbit Garant en bonne position pour profiter rapidement des premières étapes des projets miniers liés au Plan Nord.

Mais à court terme, notent des analystes comme Eldon Brown, de la Financière Banque Nationale, Orbit Garant devra surmonter l'un des gros défis provoqués par le boom minier: la croissance de ses coûts de main d'oeuvre spécialisée qui nuit à sa rentabilité.