Lucas et Julie abordent la trentaine avec chacun leur condo.

Ils habitent celui de Lucas, alors que l'appartement de Julie, qu'elle détient en copropriété avec sa mère, est en location.

Le condo de Lucas a été payé 150 000 $, et vaut présentement environ 205 000 $.

Lucas paie une mensualité hypothécaire de 900 $ sur un solde de 98 000 $.

« Je lui donne une pension de 500 $ et je n'ai rien d'autre à payer », explique Julie.

Julie et sa mère ont acheté leur condo il y a quatre ans, au prix de 80 000 $. Elle estime la valeur marchande de la propriété, libre d'hypothèque, à 160 000 $. La maman de Julie lui laisse tout le loyer de 805 $. Après les charges de copropriété de 240 $, la jeune femme empoche 565 $.

« Nous sommes à la recherche d'un condo d'une valeur entre 250 000 $ et 350 000 $, que l'on pourrait s'acheter ensemble, indique Julie. Mais nous nous demandons si c'est mieux de vendre l'une ou l'autre de nos copropriétés (ou les deux) ou encore de louer celle de Lucas comme je loue la mienne. »

Combien emprunter ?

Julie et Lucas, déjà propriétaires, n'ont pas droit au Régime d'accession à la propriété (RAP), observe d'abord Stéphane Girard, planificateur financier à la Banque Laurentienne. Il leur recommande par ailleurs de conserver en fonds d'urgence les sommes que Julie détient en CELI (15 000 $) et hors REER (1000 $).

Cela dit, trois scénarios se dessinent.

Julie et Lucas pourraient tous les deux conserver et mettre en location leurs condos actuels, « mais cette option les obligerait à emprunter la presque totalité du prix d'achat de la nouvelle maison », soulève Stéphane Girard.

En tablant sur l'avoir net accumulé, ils emprunteraient 30 000 $ sur chaque condo, qu'ils appliqueraient à la mise de fonds d'une nouvelle propriété de 300 000 $. Ces 60 000 $ équivaudraient à 20 % du prix d'achat, ce qui leur éviterait d'y ajouter l'assurance prêt hypothécaire.

Lucas pourrait tirer de son condo un loyer de 900 $ par mois en revenus de location, estime le planificateur. « Le seul problème est qu'avec cette stratégie, ils devraient consacrer un peu plus de 29 % de leurs revenus bruts mensuels - revenus de location inclus - au remboursement de leurs emprunts, alors que Julie ne veut pas dépasser 25 % », observe notre conseiller.

Le planificateur suppose également que les deux conjoints utilisent la stratégie fiscale de la mise à part de l'argent (MAPA).

Elle consiste à utiliser les revenus de location pour accélérer le remboursement de leur hypothèque résidentielle, et à emprunter pour payer les dépenses courantes des condos locatifs (impôts fonciers, charges de copropriété, entretien, remboursement hypothécaire...). Peu à peu, ils transforment ainsi leurs dettes personnelles, dont les intérêts ne sont pas déductibles, en dettes d'affaires, dont les intérêts peuvent être déduits des revenus de location.

Julie et Lucas accumuleraient ainsi un actif plus important, constate Stéphane Girard, mais au moyen d'un puissant effet de levier, c'est-à-dire au prix d'un plus grand risque. En outre, la MAPA ne donne tous ses fruits qu'après de nombreuses années et exige entre-temps une grande discipline. Enfin, avec les dépenses du nouveau condo, cette stratégie laisserait moins de liquidités à notre couple.

Julie et Lucas pourraient plutôt vendre leurs deux condos. Il faudrait cependant compter avec les frais de vente des deux propriétés et avec une possible pénalité sur l'hypothèque actuelle de Lucas si le nouveau prêt n'est pas contracté avec la même institution. En outre, puisque ni Julie ni sa mère n'habitent leur condo commun, il y aurait sans doute un impôt sur le gain en capital à acquitter.

Après les frais, le couple pourrait néanmoins appliquer quelque 175 000 $ en mise de fonds, pour réduire l'hypothèque de la nouvelle propriété à 125 000 $. Avec un amortissement sur 25 ans et un taux d'intérêt de 6 %, la mensualité de 799 $ n'équivaudrait plus qu'à 10 % des revenus bruts du couple.

Cette avenue présente l'avantage de produire davantage de liquidités. Par contre, le couple devra faire preuve de discipline pour qu'une partie de ces liquidités soit consacrée à l'épargne de retraite.

Troisième solution : la seule vente du condo de Lucas. Elle procure une mise de fonds de 97 000 $ pour le nouveau condo, ce qui évite encore une fois la prime de l'assurance prêt hypothécaire. La mensualité de 1298 $ correspond à 15 % des revenus bruts du couple, loyer inclus.

Les revenus de location du condo de Julie, préservés, amélioreront les revenus de retraite. « La dernière stratégie répond à toutes les demandes des clients et c'est aussi la plus simple à mettre en place », constate Stéphane Girard.

Mais parce que Julie et Lucas sont conjoints de fait, le conseiller rappelle l'importance d'un contrat de vie commune, qui stipulera les 97 000 $ apportés en mise de fonds par Lucas.

Conjoints, condos, contrat.

LA SITUATION

Julie et Lucas habitent ensemble dans le condo de Lucas. Julie est propriétaire avec sa mère d'un condo mis en location. Les jeunes conjoints veulent se procurer un nouveau condo qu'ils détiendraient en commun. Que faire avec les deux copropriétés actuelles ?

« Nous ne voulons pas non plus mettre plus de 25 % de notre budget mensuel dans une hypothèque. »

Julie

LES DONNÉES

Lucas, 29 ans Revenus : 50 000 $

REER : 2500 $

Condo d'une valeur marchande d'environ 200 000 $

Hypothèque restante : 98 000 $

Salaire annuel : 50 000 $ (avant impôt)

Aucune autre dette

Julie, 31 ans Revenus : 43 000 $

REER : 13 000 $

CELI : 15 000 $

Épargne non enregistrée : 5000 $

Propriétaire d'un condo à parts égales avec sa mère.

Valeur marchande d'environ 160 000 $, libre d'hypothèque.

Revenu de location : 800 $ par mois.

Aucune autre dette

La solution la plus simple consiste à couper la poire en deux. En vendant le condo de Lucas, le couple peut déposer une mise de fonds suffisante pour abaisser la mensualité sous la barre des 25 % de leurs revenus. Le condo de Julie procurera des liquidités supplémentaires pour améliorer leurs conditions de retraite.

« Je recommanderais donc de vendre le condo de Lucas, mais attention de bien prendre soin d'avoir un contrat de vie commune. »

- Stéphane Girard, directeur, planification financière, Banque Laurentienne.