Ottawa offre des milliers de dollars en cadeau aux familles à revenus modestes, dans le cadre du Régime enregistré d'épargne-études (REEE) et du Régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI). Les parents n'ont pas à investir un sou de leurs poches. Ils doivent simplement ouvrir un compte. Pourtant, la vaste majorité de ceux qui ont droit à cet argent tombé du ciel ne font pas les démarches pour l'obtenir.

Vous croyez que l'argent ne tombe pas du ciel? Détrompez-vous! Au Canada, toutes les familles à revenus modestes peuvent décrocher jusqu'à 2000$ simplement en ouvrant un Régime enregistré d'épargne-études (REEE) qui permettra de financer les études postsecondaires de leurs enfants.

Et pour les familles à faibles revenus qui ont un enfant handicapé, Ottawa offre jusqu'à 20 000$ en cadeau, dans le cadre du Régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI).

Dans un cas comme dans l'autre, les familles n'ont pas à investir un sou de leurs poches. Ils doivent seulement faire les démarches pour ouvrir le compte auprès d'une institution financière qui acheminera leur demande au gouvernement.

Or, ces deux récents programmes restent encore méconnus du grand public. La vaste majorité des familles qui auraient droit à cet argent n'ont pas fait les démarches pour l'obtenir.

«Je pense que c'est à cause d'une mauvaise information, ou encore parce que les gens trouvent ça trop beau pour être vrai!» avance Robert Comtois, responsable du développement pour l'ouest du Québec, aux Fonds d'investissement FMOQ, qui a été le premier fournisseur à offrir des REEI au Canada.

«Aujourd'hui, c'est rare qu'il y a des cadeaux, explique M. Comtois. Les gens pensent qu'ils ne seront pas admissibles. Ils craignent de faire toutes sortes de démarches pour rien.»

L'épargne-invalidité largement sous-utilisée

Lancé en décembre 2008, le Régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI) reste largement sous-utilisé.

«Nous arrivons au deuxième anniversaire du REEI et nous calculons que seulement un Canadien sur dix qui est admissible au programme, a effectivement ouvert un compte», indique David Sharone, directeur de produit, pour les régimes enregistrés, à la Banque de Montréal.

BMO a été la première grande banque canadienne à lancer un REEI, en décembre 2008. Elle compte présentement plus de la moitié des REEI ouverts au Canada.

Dans tout le pays, environ 37 000 Canadiens se sont prévalus du droit d'ouvrir un REEI, selon les statistiques, en date du 31 octobre 2010, fournies par Ressources humaines et développement des compétences Canada (RHDCC).

Cela représente à peine 8% des Canadiens admissibles au programme, a indiqué RHDCC à La Presse Affaires. «Si le taux de participation est aussi faible, c'est probablement parce que les Canadiens ne sont pas encore assez au courant du programme», croit M. Sharone.

Cela est bien dommage, car le REEI est le plus généreux de tous les régimes enregistrés, et de loin.

Il permet de recevoir en cadeau jusqu'à 20 000$ en bon pour les familles à faibles revenus, en plus d'obtenir jusqu'à 70 000$ en subvention pour les familles qui cotisent au REEI, pour un grand total de 90 000$ à vie en aide gouvernementale.

Depuis 2008, Ottawa a déjà donné plus de 127 millions en subventions et presque 52 millions en bons, selon RHDCC. Mais les Canadiens se sont privés de millions de dollars additionnels qui auraient pu leur être versés.

Lors du lancement du REEI, certaines familles ont été réticentes à ouvrir un compte, craignant que l'argent accumulé dans le REEI fasse un jour perdre à leur enfant handicapé ses prestations provinciales.

Mais depuis le lancement du REEI, la plupart des provinces ont décidé que les retraits du REEI n'affecteraient d'aucune façon les sommes versées par les programmes provinciaux aux personnes en difficulté, qui sont généralement établis en fonction du niveau de revenu, explique M. Sharone.

Au Québec, toutefois, les retraits du REEI, au-delà de 3600$ par année, pourraient réduire les prestations aide sociale, dit Robert Comtois, des Fonds FMOQ.

Malgré tout, il vaut la peine de profiter des avantages du REEI. Grâce à cet outil, une famille nantie, qui n'a pas droit à l'aide maximale du gouvernement, peut accumuler aisément près de 600 000$ pour subvenir aux besoins à long terme d'un enfant handicapé, calcule M. Comtois.

Afin de mieux faire connaître le REEI et augmenter sa popularité, Ottawa a élaboré une «stratégie de sensibilisation diversifiée et détaillée», assure RHDCC.

Épargne-études: beaucoup de cadeaux tombent à l'eau

Les familles canadiennes connaissent assez bien le Régime enregistré d'épargne-études (REEE), même si le taux de participation n'est que de 40%. Par contre, de nombreux parents ignorent que le programme a été bonifié en 2005, afin de donner un coup de pouce supplémentaire aux familles à faibles et moyens revenus.

Les ménages qui ont des revenus inférieurs à 41 000$ environ peuvent obtenir 500$ en cadeau à l'ouverture d'un REEE pour chacun de leurs enfants nés à partir de 2004.

Si la famille répond toujours aux critères d'admissibilité, Ottawa versera ensuite 100$ par année dans le REEE durant un maximum de 15 ans. Au total, un enfant peut donc récolter 2 000$ grâce au Bon d'études canadien, sans même que les parents cotisent au Régime. Il suffit d'ouvrir le compte.

Or, le taux de participation au Bon est de seulement 19%, selon le Rapport statistique 2009 de Ressources humaines et développement des compétences Canada (RHDCC). En fait, près de 212 000 enfants ont touché un bon en 2009, alors que plus d'un million d'enfants auraient pu en recevoir un. Autrement dit, seulement un enfant sur cinq obtient son dû.

Le taux de participation a presque doublé depuis deux ans. Mais il reste anémique. «Les gens ne profitent pas suffisamment des avantages qui leur sont offerts», déplore Isabelle Grenier, vice-présidente aux affaires corporatives pour les Fonds Universitas.

Chaque année, Ottawa expédie des lettres pour informer les parents de l'existence du programme. «Le gouvernement s'est aperçu que ses interventions étaient insuffisantes, dit Mme Grenier. Depuis cette année, il y a une table de concertation avec les fournisseurs de REEE pour trouver une meilleure façon de rejoindre le public cible.»

Dès le mois de mars prochain, le gouvernement lancera un projet pilote. Les prochaines lettres qui seront envoyées aux parents contiendront une simulation personnalisée qui précisera le montant auquel l'enfant a droit. L'envoi renfermera même un bon d'échange pour encourager les parents à ouvrir un REEE. «C'est symbolique, mais c'est plus concret», dit Mme Grenier.

Dans un premier temps, Ottawa visera les provinces où le taux de participation est le plus faible, ce qui n'est pas le cas du Québec qui est parmi les premiers de classe, avec un taux de participation de 22%.

N'oubliez pas l'extra!

Par ailleurs, le Programme canadien pour l'épargne-études a aussi été bonifié en 2005 pour encourager les familles qui ne roulent pas sur l'or à économiser dans le REEE.

À la base, toutes les familles ont droit à une subvention fédérale de 20% du montant cotisé. Pour avoir à la subvention annuelle maximale de 500$, il faut investir 2500$ dans le REEE.

Pour les familles qui gagnent moins de 82 000$, la subvention de base de 20% est bonifiée à 30% pour la première tranche de 500$ de cotisation.

Et pour les familles qui gagnent moins de 41 000$, la subvention est bonifiée à 40%.

C'est sans compter l'Incitatif québécois à l'épargne-études (IQEE) qui ajoute 10%, 15% ou 20%, selon le niveau de revenus. Au total, une cotisation de 500$ permet aux parents québécois d'obtenir une subvention combinée fédérale-provinciale de 30%, 45% ou 60%, selon le revenu familial.

Si les parents versent 500$ dans le REEE, les gouvernements ajouteront 300$. Un très beau cadeau... qui file entre les mains de nombreux enfants qui y ont droit.

La raison? Pour recevoir la subvention supplémentaire, la personne responsable du REEE de l'enfant doit consentir à ce que l'Agence du revenu du Canada vérifie son admisibilité pour l'obtention de la subvention supplémentaire.

Depuis 2005, à l'ouverture d'un REEE, les institutions financières font normalement remplir les documents nécessaires et acheminent les renseignements au gouvernement. Une fois la machine en branle, les familles reçoivent la somme due automatiquement, chaque année, sans autre formalité.

Mais les parents qui ont ouvert un REEE avant 2005 n'ont pas fait ces démarches, car la bonification n'existait pas. Et ils ne savent peut-être même pas qu'ils ont droit à cet extra. Conséquence: de nombreux enfants n'ont pas reçu le cadeau qui leur était destiné.

Pour résoudre le problème, le gouvernement du Canada a décidé d'informer les Canadiens qui peuvent potentiellement être éligibles et qui n'ont pas encore fait la demande.

Récemment, il a envoyé à plus de 587 000 familles canadiennes, une lettre les informant du programme de Subvention canadienne pour l'épargne-études supplémentaire. De ces 587 000 lettres, 93 232 furent envoyées dans la province du Québec, explique RHDCC.

Si vous l'avez reçue, informez-vous auprès de votre institution financière ou sur le site web du fédéral (www.cibletudes.ca). Il y a peut-être un cadeau qui revient...