Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Luc Girard, de Valeurs mobilières Desjardins.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

 

Je dirais que l'événement de la semaine est le potentiel sauvetage de l'Irlande. L'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) parlent d'envoyer des dizaines de milliards de dollars. Le plus important, c'est d'éviter la contagion à d'autres pays.

Mais pour nettoyer la maison, l'Irlande devra peut-être faire une croix sur sa croissance économique des prochaines années, peut-être même se priver d'un cycle complet de croissance économique. Mais ce n'est pas une question de choix: certains pays ont vécu au-dessus de leurs moyens. Ils doivent maintenant faire le ménage dans leurs finances publiques.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement en ce moment?

Je vais surveiller les obligations du gouvernement du Canada de 5 ans. Au cours du dernier mois, le taux d'intérêt sur ces titres a grimpé de 1,83% à 2,38%. Il s'agit d'un rebond de plus de 50 points de base. Quand les taux remontent, la valeur des obligations recule. Ainsi, le fonds négocié en Bourse iShares Dex All Government Bond Index (XGB), un portefeuille d'obligations gouvernementales qui a une durée moyenne de 6,3 ans, a perdu 1,7% depuis un mois.

Les obligations vont continuer de souffrir, car les taux d'intérêt ne font qu'entreprendre leur remontée. Déjà, la Banque du Canada a relevé trois fois son taux directeur pour le porter à 1%. Desjardins croit que ce taux atteindra 2% à la fin de 2012, et environ 4% en 2014.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

Présentement, nous sur-pondérons les actions et nous sous-pondérons les obligations. Pour les actions, nous cherchons à profiter de la thématique de la croissance de l'Asie. Nous favorisons le Canada, les grandes multinationales américaines, ainsi que les pays émergents. Mais nous sous-pondérons l'Europe.

Dans cette optique, je conseillerais quatre fonds négociés en Bourse:

Le iShares S&P/TSX Capped Composite Index (XIC) qui comprend les 234 plus grandes sociétés de la Bourse canadienne.

Le iShares S&P500 Index CAD-Hedged (XSP) qui regroupe les 500 plus grandes sociétés américaines, des entreprises internationales qui profiteront de la croissance à l'étranger.

Pour obtenir un portefeuille optimal dans les marchés émergents, nous conseillons une combinaison de deux fonds négociés à la Bourse américaine: le Chindia (NY, FNI) qui se concentre sur la Chine et l'Inde, ainsi que le BLDRS Emerging Markets 50 (Nasdaq, ADRE) dont le portefeuille est réparti dans un éventail de pays émergents, y compris en Afrique.

En combinant les deux fonds, on obtient un portefeuille qui compte 31% de Chine, 10% de Hong-Kong, 24% d'Inde, 19% de Brésil, sans compter plus autres pays. Au lieu des pays BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) on préfère juste le BIC, car la Russie nous semble trop risquée sur le plan politique.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

Il faut éviter les obligations avec une échéance plus longue (5 ans et plus) et s'en tenir avec des obligations avec des échéances de courtes (2 à 3 ans). Plus la durée de l'obligation est longue, plus elle est vulnérable à une remontée des taux d'intérêt. Les investisseurs risquent de se retrouver avec une baisse de leur fonds d'obligations, comme c'est le cas depuis un mois.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement?

Les gens sous-estiment la quantité d'argent qui est stationnée dans les obligations. Ils n'imaginent pas tout le volume que cela pourrait créer à la Bourse, si les investisseurs ressortent des revenus fixes.

Pourtant l'instant, les investisseurs ont une confiance aveugle dans les obligations. Depuis 18 mois, ils ont injecté 500 milliards de dollars dans les fonds d'obligations. C'est effrayant!

Pourtant, le rendement du dividende des sociétés à la Bourse canadienne (2,58%) est plus élevé que le taux des obligations du gouvernement du Canada (2,38%), sans même tenir compte du traitement fiscal plus avantageux pour les dividendes.