Claude Paquette, vice-président aux ventes chez la maison funéraire Complexe Aeterna, était catégorique: si, à son décès, la somme des primes payées par l'assuré est plus élevée que le capital-décès inscrit au contrat, l'excédent sera remboursé à sa succession. C'est une question capitale: les détracteurs de la future assurance funéraire appuient leur argument sur le coût des primes, dont la somme dépassera éventuellement le capital-décès assuré.

Où cette disposition est-elle inscrite? «À l'endos du contrat», répond Claude Paquette. Où exactement? Après une recherche de 30 secondes, il cite le paragraphe sur la Cession.

Celui-ci, cependant, stipule plutôt que si le capital décès est supérieur aux coûts des services funéraires au moment où ils sont livrés, la différence est appliquée aux paiements des taxes et services funéraires additionnels.

Après une autre minute et demie de recherche, il mentionne le troisième paragraphe de l'article Acceptation, qui pour sa part, informe plutôt que les taxes à la consommation applicables seront celles en vigueur au moment de la livraison des services.

Le spécialiste du produit nous indique qu'il va chercher l'information et nous rappeler.

Et en effet, il nous rappelle une demi-heure plus tard: la mention pertinente était inscrite en page 12 du Guide de distribution du produit. La somme versée au décès est la plus élevée entre le montant assuré et la somme des primes payées (plus intérêts).

Voilà qui soulève trois questions.

La première: comment l'acheteur peut-il s'y retrouver si ce point capital n'est pas inscrit au contrat, mais plutôt enfoui dans le Guide de distribution?

La seconde: comment un assureur peut-il faire des profits si les primes payées en sus du capital assuré sont remboursées au client, à l'encontre de la pratique courante en assurance?

Et la troisième: pourquoi les analyses effectuées pour le compte des entreprises funéraires n'ont-elles pas tenu compte de ce facteur?

L'actuaire Jean-Louis Gauvin, qui a étudié la question pour le compte de Jocelyne Dallaire-Légaré, explique qu'il s'est appuyé sur les contrats actuels, qui n'en font pas mention - ce qu'il trouve par ailleurs anormal.

Frédéric de Merchant, analyste à l'Union des consommateurs, fait valoir un autre point: l'assurance décès distribuée actuellement n'est pas la même que l'assurance funéraire qui serait autorisée en vertu du projet de Loi 8. L'Union des consommateurs avait deux préoccupations à l'égard de l'assurance décès: l'acheteur moyen paiera cher en primes, et celles-ci ne seront pas remboursées s'il annule le contrat. «Le produit de 2003 répond à ces deux problèmes, indique Frédéric de Merchant. Mais l'assurance funéraire, elle, n'y répond pas.»

En fait, l'assurance décès présentement distribuée est à ce point à l'avantage du consommateur qu'on se demande où l'assureur trouve son profit.

Si, parce qu'il a payé davantage que la valeur assurée, l'assuré demande un remboursement de ses primes, Assurant ne conservera que 250$ pour l'ensemble de ses frais, explique M. de Merchant. «Ça ne couvre même pas la commission qu'elle a versée à la maison funéraire. Je ne comprends pas comment elle pouvait vendre ce produit-là.»

D'ailleurs, l'assurance funéraire vendue en Ontario ne comporte pas non plus ces avantages.

Une hypothèse: l'assureur américain a temporairement bonifié son produit pour les besoins de sa cause québécoise. «Assurant est entré par la porte d'en arrière, constate Frédéric de Merchant. Il avait à rassurer le législateur sur son produit. Il a mis en vente un beau produit, dans un contexte de lobbying.»

ARRANGEMENTS SOUS SURVEILLANCE

Depuis début juillet, l'Office de protection du consommateur a émis 12 communiqués signalant des amendes imposées à des maisons funéraires qui ne se sont pas conformées à la Loi sur les arrangements préalables.

Cette cascade est le résultat d'un programme de surveillance de l'OPC, qui a porté oeil inquisiteur sur ce secteur - simple routine, assure Jean-Jacques Préaux, porte-parole de l'OPC. Aucun consommateur n'a perdu son argent, assure-t-il. Dans tous ces cas, les dépôts avaient bel et bien été faits, mais après les 45 jours impartis.

«Le système n'est pas blindé, mais dans l'ensemble, il est bon», commente Charles Tanguay, de l'Union des consommateurs.