André Labelle et sa conjointe se comptent chanceux d'avoir survécu au tremblement de terre qui a ébranlé le Chili, cet hiver. Mais ils se désolent de ne pas avoir été entièrement indemnisés pour leur voyage qui a tourné au cauchemar.

Le couple devait faire une croisière de deux semaines en Amérique du Sud. Il a quitté Montréal le 25 février, à destination finale de Buenos Aires. Mais à cause d'un bris mécanique (un oiseau a foncé dans un moteur), l'avion est resté cloué au sol lors de l'escale à Santiago, au Chili. Air Canada a logé les passagers à l'hôtel. Quelques heures plus tard, un violent séisme ravageait la région. «Tout a revolé! Les vitres ont cassé. On était dans le noir, sans électricité», raconte M. Labelle. «À l'endroit où on était assis à l'aéroport, douze heures plus tôt, tout s'est écroulé!», ajoute sa conjointe. Après avoir vécu dans l'angoisse des répliques sismiques, le couple a été rapatrié le 4 mars.

À son retour, le couple a voulu se faire indemniser. Il avait acheté le forfait de 10 860$ à de l'agence CAA-Québec. Le couple avait versé une contribution obligatoire (34$) au Fonds d'indemnisation des clients des agents de voyage.

Le Fonds peut voler au secours des voyageurs qui n'ont pas reçu la prestation touristique qu'ils ont payée, notamment à cause d'une faillite. Mais dans le cas des Labelle, «il ne semble pas y avoir eu de défaut, ni de l'agence, ni du transporteur. Les problèmes techniques, le Fonds ne s'embarque pas là-dedans», dit le porte-parole de l'Office de la protection du consommateur, Jean-Jacques Préaux.

Le couple avait payé son voyage avec sa carte de crédit Visa Desjardins Odyssée Or, qui couvre jusqu'à 2000$ par personne. Pour l'excédent, les Labelle avait souscrit une assurance complémentaire auprès de Desjardins Sécurité financière, au coût de 395$.

Le couple a donc soumis une réclamation de 10 860$ à l'assureur. Mais Desjardins leur a versé 8 517$, soit 2 342$ de moins que prévu... l'équivalent des deux billets d'avion.

La raison? En cas de retour anticipé, l'assurance couvre les frais de rapatriement, les frais de subsistance et la portion terrestre non utilisée. Mais pas le prix des vols inutilisés... c'est écrit à la page 25 d'un document de 60 pages.

«Ce n'est pas une faille dans l'assurance-voyage. C'est la circonstance qui est très particulière. Ils étaient bien couverts. Mais on ne peut pas rembourser pour le vol qui a été consommé», explique François Morel, conseiller aux ventes chez Desjardins.

De son côté, Air Canada a défrayé les frais de subsistance et de rapatriement. Mais pour le remboursement des billets, c'est une autre histoire. «Pour nous, ils ont eu le choix de continuer jusqu'à Buenos Aires. Beaucoup de passagers l'ont fait. Eux ont décidé de revenir», dit la porte-parole Isabelle Arthur porte-parole.

Mais avaient-ils vraiment le choix? À cause du retard d'une semaine, leur croisière tombait complètement à l'eau. Air Canada comprend leur situation... mais explique qu'il n'est pas responsable du retard, puisqu'il s'agit d'un cas de force majeure.

Le séisme est un cas clair de force majeur, confirme Me Paul Unterberg, du cabinet Unterberg Labelle Lebeau. Quant au bris mécanique, le transporteur doit faire la preuve que le problème était imprévisible, que l'entretien de l'appareil avait été bien fait, et qu'il n'y avait pas d'autre appareil pour assurer le service, ajoute l'avocat.

Le couple est dans l'impasse. Mais il devrait quand même soumettre une demande de remboursement officielle à Air Canada. «C'est du cas par cas», dit Mme Arthur.

Amer, M. Labelle se demande : à quoi bon prendre une assurance, si on ne réussi pas à se faire indemniser en cas de pépin? À cela, Me Unterberg répond : Tout le monde qui voyage aux États-Unis ou en Europe devrait au moins prendre une assurance-santé. Et surtout, il faut dire toute la vérité à l'assureur sur son état de santé. Les trois quarts du temps, quand un assureur refuse une demande d'indemnisation, c'est parce que le client avait «oublié» de dévoiler un problème préexistant.