Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Rémi Roger, de Seamark...

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

À l'échelle internationale, les déboires de la Grèce sont revenus nous hanter. Le gouvernement est coincé. Il doit suivre les règles de l'Union européenne, mais dès qu'il veut prendre des mesures, la population descend dans la rue pour revendiquer. Et de son côté, l'Union européenne ne peut pas vraiment mettre la Grèce à la porte. Le climat va être lourd pendant encore un bon bout de temps... et cela va se refléter sur l'euro.

Plus près de nous, la poursuite contre Goldman Sachs a des implications importantes. Il y aura un nuage gris au dessus de toutes les banques d'affaires, car le marché va se poser la question : qui d'autres a pu jouer un jeu semblable?

Et chez nous, la Banque du Canada a retiré son engagement de ne pas lever les taux d'intérêt. Le marché s'attend à que les taux remontent à partir de juin. Combien? À quelle vitesse? Les paris sont ouverts! On pourrait s'attendre à ce que les taux remontent autour de 3,5% d'ici deux ans.

Quel indicateur surveillez-vous le plus attentivement en ce moment?

La création d'emplois aux États-Unis. Il ne faut pas se le cacher, les États-Unis demeurent le moteur de la planète. Ils ont perdu plus de huit millions d'emplois durant la grande récession. Tant et aussi longtemps que le marché du travail demeure instable, l'atmosphère sera lourde pour le marché immobilier.

Au cours du dernier mois, il y a eu 162 000 emplois créés. Il faudrait que la création se maintienne au-dessus de 100 000 emplois par mois, pour quelques mois consécutifs, sans tenir compte de l'effet du recensement qui créera près 800 000 emplois, de façon très temporaire.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

À la suite d'une poussée faramineuse des Bourses, depuis mars 2009, les marchés sont revenus à des niveaux plus normaux. Il faudra maintenant être plus sélectif. J'irais vers une multinationale qui pourra participer à l'essor de la Chine et des marchés asiatiques. Idéalement une société stable, diversifiée, qui verse un dividende élevé, ce qui donne un petit coussin. Pas exemple, nous aimons bien PepsiCo.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

Je n'irais jamais acheter n'importe quelle obligation que la Grèce va essayer d'émettre bientôt! De jour en jour, leur prime de risque grimpe. Du côté des actions, il faut faire attention avec certains pays émergents, comme la Russie. Il ne faut pas oublier que ses titres de dettes ont fait faillite dans les années 90.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement?

Au Canada, les taux d'intérêt vont monter, pour toutes les échéances d'obligations. Mais je pense que le long terme (30 ans) va remonter un peu trop (de 4,1% présentement, à 4,3% peut-être plus) et ce sera l'occasion d'en acheter avant que les taux retombent.

À l'heure actuelle, je garde une bonne composante d'encaisse, à travers des obligations à taux flottant dont le taux est ajusté à tous les trois mois en fonction du taux des acceptations bancaires. Ces titres-là ne rapportent pas grand-chose (0,6% à 0,75%). Mais ils bénéficieront tout de suite d'une hausse des taux de la Banque du Canada.

Et d'autre part, je suis positionné dans le plus long terme (15 à 20 ans) et dans les titres provinciaux qui offrent une bonne valeur en ce moment.

Quant aux obligations de 5 ans, c'est l'ennemi no. 1 quand on est dans une situation de retournement de la politique monétaire. D'ailleurs, on le voit depuis six semaines.