Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés et de l'économie, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine : Ed Sollbach, stratège boursier et analyste quantitatif chez Valeurs mobilières Desjardins, à Toronto

À votre avis, que est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse ?Les résultats trimestriels des entreprises s'avèrent meilleurs que prévu. Et nous anticipons encore un rebond de 37% de la croissance des bénéfices cette année, qui serait le plus fort en 30 ans.

Toutefois, la Bourse avait déjà anticipé ce rebond des résultats depuis quelques semaines. Par conséquent, le léger repli boursier de vendredi pourrait être précurseur d'une mini-correction d'environ 5%, comme nous en avons connu à quelques reprises depuis un an.

Aussi, ce repli momentané devrait servir d'occasion d'achat pour le prochain élan en Bourse, qui sera justifié par le rebond continu des résultats d'entreprises. D'ici un an, nous avons un cible de 1 320 points pour l'indice S&P 500 de la bourse américaine et de 14 200 points pour le S&P/TSX pour la Bourse canadienne.

Quels indicateurs surveillez-vous le plus attentivement en ce moment ?

Aux États-Unis, l'inventaire de maisons invendues demeure élevé, au-delà de la moyenne à long terme.

Mais pour que la relance économique continue, il ne faudrait pas une autre rechute de valeur des maisons.

Ça nuirait à la faible reprise de confiance des consommateurs américains. Ça pourrait même provoquer une nouvelle ronde de grosses pertes sur prêts dans le secteur financier.

Par ailleurs, nous surveillons aussi le taux de rendement des obligations américaines, qui tourne autour de 3,8%. Un rebond soudain et fort de ce taux nuirait à la reprise économique et réduirait l'attrait des titres boursiers parmi les investisseurs.

Que feriez-vous avec 10 000 $ à investir ?

Pour un placement conservateur, j'irais avec des actions de banques canadiennes dont le rendement en dividendes –environ 3,7%– se compare à celui des obligations du Canada (10 ans), mais avec le potentiel additionnel d'un gain de valeur.

Aussi, les investisseurs en actions de banques obtiennent un crédit d'impôt pour les dividendes perçus. De plus, il est probable que les banques recommencent à hausser leurs dividendes au début de 2011, maintenant que leurs résultats sont en net redressement.

Pour un placement spéculatif, j'irais avec des actions de sociétés aurifères junior. Pour l'or, nous avons un prix-cible de 1420 $US l'once cette année parce que nous croyons que ce marché bénéficiera du prolongement des taux d'intérêt presque nuls de la part de la Réserve fédérale américaine.

Quels placements évitez-vous ?

Les investisseurs en Bons du trésor n'obtiennent aucun rendement, même qu'ils perdent 2% par an de leur pouvoir d'achat juste avec l'inflation.

Quant aux obligations gouvernementales, elles procurent encore un rendement en intérêt de 3,7% en moyenne. Mais ce rendement pourrait croître avec la reprise économique, ce qui signifie un risque de perte de valeur pour les obligations négociées.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement ?

Les titres de sociétés financières aux États-Unis sont encore risqués, mais ils ont aussi un meilleur potentiel d'appréciation que leurs semblables au Canada.

Les financières américaines se négocient en Bourse encore à la moitié de leur valeur moyenne de 2007.

En comparaison, les financières canadiennes sont revenues proche de leur valeur boursière de 2007, et elles ont déjà digéré toutes leurs pertes dues à la crise financière.

Pourtant, dans les deux pays, les résultats des entreprises et des banques en particulier sont en vif rebond. Et ça devrait se poursuivre avec la réduction des pertes sur prêts.

Ed Sollbach est chez Valeurs Mobilières Desjardins à Toronto depuis six ans à titre d'analyste quantitatif et de stratège boursier. Il est diplômé de niveau maîtrise en ingénierie et en gestion (MBA) de l'Université de Toronto. Il détient aussi le titre d'analyste certifié en finances (CFA) depuis 1998.