Âgés de 55 et 54 ans, Édouard et Micheline ont désormais la retraite dans leur ligne de mire. Jusqu'à maintenant, ils avaient d'autres priorités.

«Nous avons accompagné trois enfants qui sont aujourd'hui adultes et qui ont fait des études supérieures, décrit Édouard. C'est là l'oeuvre de notre vie. Cependant, je réalise que ces dépenses, que nous ne regrettons en aucune façon, ont handicapé notre potentiel de retraite.» Ils sont tous deux travailleurs autonomes, donc sans régime complémentaire de retraite. Édouard gagne 88 000$ et Micheline 28 000$. «J'ai versé des cotisations à nos REER respectifs dans une proportion égale depuis de nombreuses années, tant et si bien que nous possédons aujourd'hui chacun 160 000$ dans ces comptes, poursuit Édouard. C'est là tout notre avoir de retraite.»

Ils sont propriétaires d'une maison d'une valeur de 200 000$, libre d'hypothèque, qu'ils espèrent pouvoir conserver durant leur retraite.

Ils sont inquiets...

Des objectifs trop modestes?

La planificatrice financière Sophie Labonne, de la Banque Scotia, félicite le couple pour sa patiente discipline de contribution au REER du conjoint, qui facilitera grandement le fractionnement des revenus de retraite. Elle fait toutefois une mise en garde. On ne peut faire de retrait d'un REER de conjoint cotisant avant qu'un délai couvrant trois 31 décembre consécutifs se soit écoulé depuis la dernière cotisation.

«Il sera important pour Édouard de cesser de cotiser au régime de conjoint de Micheline au moins trois ans avant sa conversion en FERR», avise donc notre planificatrice. Rien n'empêchera par ailleurs Micheline de convertir son propre REER au moment de sa retraite.

La planificatrice observe que le couple, outre les études des enfants, a consacré ses ressources au remboursement de son hypothèque. La valeur que représente la maison peut-elle être mise à profit? Mme Labonne en a fait l'objet d'une des trois hypothèses de retraite qu'elle a tracées pour le couple.

Le premier scénario répond aux objectifs d'Édouard et Micheline, qui souhaitent toucher à la retraite un revenu brut de 52 000$, soit 45 % de leurs revenus combinés actuels.

Notre planificatrice a supposé une indexation des revenus et dépenses de 3 % par année, et un rendement sur les investissements de 5,5 %. Ses calculs montrent que si le couple continue de verser 10 600$ dans les REER de chacun, l'un et l'autre pourront toucher à 65 ans un revenu brut de 28 000$, indexé de 3 % jusqu'à 90 ans. L'objectif de 52 000$ est donc atteint, et même légèrement dépassé.

Cependant, Mme Labonne est réticente à l'idée de planifier une retraite avec moins de 60 % des revenus actuels. «Les gens pensent qu'ils pourront s'en tirer avec moins, dit-elle, mais l'expérience me démontre le contraire, surtout quand la piqûre des voyages les prend et quand la santé vacille...»

Pour leur donner un peu plus de marge de manouvre budgétaire, elle a fait le calcul des mesures nécessaires pour atteindre un revenu de retraite équivalent à 60 % des revenus actuels, soit 69 600$. Pour y parvenir, le rendement sur les investissements devra être haussé à 6,5 %, et chaque conjoint devra verser 5000$ par année dans son CELI. Cette épargne supplémentaire serait pour l'essentiel tirée des remboursements d'impôts en provenance des cotisations REER.

Dans un troisième scénario, Mme Labonne fait entrer en action l'actif accumulé sur la maison, pour tenter d'atteindre un revenu de retraite équivalent à 70 % de leurs revenus actuels – une proportion fréquemment citée en planification financière.

Notre conseillère utilise un emprunt pour investissement de 100 000$, garanti par leur propriété. Elle maintient les cotisations au CELI et le rendement du précédent scénario. Dans ces conditions, le couple ne pourra soutenir jusqu'à 90 ans qu'un revenu combiné de 76 000$, inférieur de 5000$ aux 81 200$ visés. «Je ne crois pas que pareil scénario corresponde à la personnalité du couple», observe notre planificatrice.

Par contre, elle croit que le deuxième scénario est parfaitement réalisable. «Pour le peu de différence que ce scénario représente pour le couple, souligne la planificatrice, il leur permet enfin d'atteindre le minimum souhaitable de 60 % des revenus à la retraite. Peu de sacrifices pour une différence majeure!»