Pas de doute, ça fait sérieux. Dans la salle de conférence de la firme LB2 Design, l'appareil se dresse comme un homme de bonne taille, avec son fût central en aluminium strié de nervures de refroidissement, ses deux longues poignées longitudinales, sa tête où un cerveau s'exprime au travers d'un écran. C'est léché, c'est ergonomique, ça impose le respect.

L'appareil est un générateur d'impact, et il mérite quelques explications.

À l'intérieur, un moteur linéaire propulse vers le sol une petite masse cylindrique de 3,3 kg, qu'il accélère à 200 km/h. L'impact équivaut à une masse d'une tonne qui tomberait du plafond de votre salon, fait valoir Daniel Rioux, président de l'entreprise lavalloise MicroMentis et maître d'oeuvre du produit.

Les moindres frémissements de ce mini-tremblement de terre sont enregistrés par 16 petits capteurs sans fil, de la grosseur d'un pamplemousse. «On génère une onde sismique dans le sol et on mesure ses modifications au fil de son passage dans le matériau», explique-t-il.

Ces données sont recueillies par un robuste ordinateur portable de terrain. En y combinant les autres données colligées de façon traditionnelle, cette «interface usager» est capable de produire une image en trois dimensions de la composition du sous-sol, jusqu'à une profondeur de 100 m, voire davantage.

Bref, cet appareil, le SWIPS (pour Surface Wave Intelligent Profiling System, ou système de profilage intelligent d'ondes de surface), est une petite révolution, selon son fabricant: il permettra aux compagnies minières de réduire considérablement le temps d'exploration et de prospection.

Un design à la hauteur du concept

«Quand on arrive dans un dossier comme celui-là, exprime le designer industriel Luc Blanchette, il n'y a qu'un tableau noir avec un paquet de formules mathématiques.» Il caricature à peine.

Lorsque sa firme LB2 Design a été contactée par Daniel Rioux, en 2007, le SWIPS, même s'il faisait déjà l'objet de plusieurs brevets, n'avait encore la forme que d'étincelles dans les yeux de ses créateurs (et d'électrons dans leurs ordinateurs).

«Notre première intervention a été de contribuer à valoriser cette technologie, à créer une visualisation de ce dont pourrait avoir l'air le produit», décrit Luc Blanchette.

Car on voulait dès le départ titiller l'intérêt de la clientèle. Alors même que le système était en cours de développement, MicroMentis l'a présenté dans des foires spécialisées. C'est un processus de conception peu courant. Habituellement, un nouveau produit n'est dévoilé qu'à son lancement sur le marché.

Mais en montrant - à l'écran - des performances spectaculaires sous des formes convaincantes, l'entreprise suscitait l'intérêt et recueillait en même temps les commentaires de ses futurs clients.

Le système évolue ainsi depuis deux ans et se raffine au gré des commentaires. Lors d'une foire à Sydney, on leur a fait la remarque que le premier modèle de capteur, de forme cylindrique, risquait de rouler au bas d'une pente si on le laissait tomber. Il est désormais cubique, avec des arêtes recouvertes de solides pare-chocs. «On peut avoir la recette de la Caramilk, mais il faut avoir une solution qui est viable à l'usage», lance Daniel Rioux.

LB2 Design apporte donc son expertise à l'esthétique, à l'ergonomie et à la fabrication du SWIPS. «Le choix des procédés est orienté vers un objectif de fabrication en petites séries», observe Luc Blanchette. Et là encore le travail de design est important: ces procédés plus artisanaux ne doivent en aucune manière réduire la perception de qualité du produit.

Les premiers systèmes devraient être sur le marché au début 2010. Le prix n'est pas encore fixé. Mais chacun se vendra plus d'un demi million - peut-être largement plus. À ce prix, le look du SWIPS doit avoir de l'impact.