Les adolescents sont souvent les premiers à se débrouiller avec les gadgets technologiques dernier cri. Leurs réflexes de consommateurs ne sont cependant pas aussi aiguisés, si bien qu'ils commettent des gaffes très coûteuses... pour leurs parents.

Sylvain, par exemple, a eu une très mauvaise surprise. Sa fille a l'habitude de télécharger de la musique à partir du site web d'Apple, iTunes. Elle utilise normalement des cartes prépayées. Au début de février, toutefois, elle lui a demandé sa carte de crédit afin d'acheter un jeu pour son iPod Touch (ces logiciels ne peuvent être achetés avec une carte prépayée). Sylvain a accepté. Sur l'ordinateur, il a entré les informations de sa carte de crédit et a réglé l'achat de 9,99$.

 

«Au début mars, j'ai presque fait un infarctus en voyant le solde de ma carte», raconte Sylvain. Sur son relevé de compte figurait une ribambelle d'achats de chansons au magasin iTunes, pour un total de 2207$.

Sa fille, atterrée, lui a expliqué la méprise: comme elle avait réussi à télécharger de la musique au-delà de la limite de sa carte prépayée, elle a cru qu'elle pouvait l'obtenir gratuitement. Une réaction très naïve, il faut bien le dire. Elle en a donc profité pour télécharger autant de chansons que possible sur son iPod.

Sylvain a déduit qu'Apple avait conservé les informations de sa carte de crédit et a continué de débiter son compte... à son insu. Il a appelé immédiatement l'émetteur de sa carte de crédit afin de dénoncer cette pratique. Mais on lui a répondu que pour renverser les transactions, il devait porter plainte pour fraude contre sa propre fille!

Il s'est rabattu sur Apple. Un responsable du magasin iTunes lui a expliqué gentiment la politique du magasin: les ventes sont non remboursables. «Mais je peux très bien comprendre à quel point la situation est démoralisante pour vous», lui a-t-il écrit. Faisant une entorse à la règle, il a accordé à notre correspondant un remboursement partiel de 607$, soit plus du quart de la facture.

Le responsable a souligné à Sylvain que le processus de paiement est clairement exposé dans les conditions générales d'iTunes, un document d'environ 40 pages que tous les acheteurs acceptent avant d'utiliser les produits.

En effet, ce contrat est bourré de mises en garde. Par exemple, quand vous ouvrez un compte, vous acceptez qu'iTunes conserve les informations sur votre carte de crédit qui peuvent ensuite être utilisées pour votre facturation.

Plus loin, le contrat précise que les transactions seront débitées sur votre carte de crédit si la carte prépayée que vous utilisez n'est plus valide. Un genre de facturation en cascade. Et encore plus loin, on explique que lorsque vous accédez à iTunes de votre iPod ou iPhone au moyen du Wi-Fi, la fonctionnalité 1-Click s'active. Dès lors, «le fait de cliquer sur le bouton «Acheter» lancera le téléchargement immédiatement et validera votre transaction sans aucune formalité supplémentaire».

Voilà donc comment la fille de Sylvain a pu si facilement porter toutes les transactions sur la carte de crédit de son père «sans aucune formalité supplémentaire».

Sylvain jure que s'il avait compris la portée des conditions d'achat de iTunes, jamais il n'aurait donné son numéro de carte de crédit.

Joint par La Presse, Jason Roth, porte-parole d'Apple pour iTunes, n'a pas voulu commenter le cas précis de Sylvain. Apple considère que les mises en garde sont claires et que l'information n'est pas «enterrée» dans le contrat.

Pour obtenir davantage, Sylvain devra tenter sa chance aux petites créances. La cause n'est pas gagnée, «mais c'est jouable», avance Vincent Gautrais, titulaire de la chaire de l'Université de Montréal en droit de la sécurité et des affaires électroniques. Selon les nouvelles règles sur les contrats à distance de la Loi sur la protection du consommateur, le commerçant doit présenter l'information de manière claire et évidente.

Mais sur le web, «on se retrouve dans une situation totalement ubuesque où les contrats grossissent de plus en plus. Le contrat de Yahoo gonfle de 10% par an, dit M. Gautrais. Ça devient humainement impossible à lire».

Le produit

2207,50$ de musique téléchargée sur iTunes.

Le hic

Le père n'a pas autorisé ces achats effectués par sa fille de 14 ans.

«Je trouve inconcevable qu'une entreprise garde en mémoire les données autorisant un seul et unique achat, et les applique à tous les achats suivants, sans autorisation.» - Sylvain

Au bout du compte

Apple considère qu'un achat est final sur iTunes, mais a fait une exception pour Sylvain en lui remboursant 607$, soit environ le quart de sa facture.

 

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