«La plus grande tragédie, dans les familles reconstituées, c'est qu'on ne veut pas parler de succession, expose le notaire Daniel Jolin. Soit on ne fait pas de testament, soit on déshérite carrément les enfants.»

En voici un exemple. Dans un testament olographe, Bob, qui a eu des enfants d'un premier mariage, a légué la maison à sa nouvelle conjointe. Les meubles suivent la maison, bien sûr, et il lui cède en même temps sa voiture. Ses REER? Pour éviter l'impôt à son décès, il les lègue également à sa conjointe.

Deux ans après le décès de Bob, sa conjointe se remarie et lègue la propriété à son nouveau conjoint. Résultat, conclut Me Jolin, «les enfants de Bob ont été déshérités».

Diverses solutions s'offraient pourtant. Bob aurait pu ne léguer à sa conjointe que la jouissance de la maison, ou encore lui en laisser l'usufruit, ou créer une fiducie au nom de ses enfants. Le principe est de définir ce qu'on veut faire et de planifier en conséquence.

Comme l'exprime Me Jolin, «dans un testament, il ne faut jamais placer la fiscalité avant les intentions».

Pour ce qui concerne le REER, par exemple, Bob aurait pu faire un legs à charge. Il aurait légué son REER à sa conjointe, mais à sa charge de remettre aux enfants de Bob un certain pourcentage de la valeur du REER au terme d'un délai précis. Une valeur équivalente, précise Me Jolin, pas nécessairement extraite du REER, ce qui évite le paiement de l'impôt lors du retrait. «Ainsi, conclut Daniel Jolin, les enfants ne sont pas déshérités.»

Autre ennui: la richesse à 18 ans

Dès qu'un mineur hérite d'une somme de 25 000$ ou plus, le Code civil impose l'intervention du Curateur public.

Un exemple: papa lègue à son jeune enfant une assurance vie de 50 000$. À son décès, la mère, tutrice légale, gérera l'héritage de l'enfant mineur. «Elle va devoir hypothéquer ses biens pour donner une garantie de sa gestion face à la curatelle publique», souligne Daniel Jolin.

La somme léguée est inférieure à 25 000$? «Dans énormément de cas, surtout sans planification testamentaire, l'argent est dilapidé et les enfants mineurs ne le savent pas», poursuit Me Jolin.

Pour éviter ces inconvénients, il préconise une fiducie, qui gérera le legs au nom de l'enfant jusqu'à sa majorité. Idéalement, plus longtemps encore. «Avez-vous déjà vu un garçon de 18 ans qui hérite de 250 000$? s'enquiert Me Jolin. Moi, j'ai vu deux successions flambées en trois semaines.»