L'appel est arrivé lundi dernier, au lendemain de notre chronique sur le nouveau design du boîtier de commande d'automatisation d'Hydro-Québec.

Le citoyen qui a vu apparaître devant chez lui le premier boîtier nouveau genre a appelé La Presse pour dénoncer tout l'équipement industriel qui l'accompagne encore, de haut en bas du poteau.

 

C'est tout le problème du transport d'électricité par voie aérienne plutôt que souterraine. En attendant l'idéal coûteux d'un réseau de distribution enfoui, une étudiante de l'École de design industriel de l'Université de Montréal a proposé une réponse intermédiaire mieux intégrée. Elle a participé à la mise au point du boîtier et a décidé, pour son projet de fin d'études de premier cycle, d'élargir la réflexion. Elle a eu sa première prise de conscience en regardant par la fenêtre de sa chambre: on y voyait un poteau d'électricité chargé comme un arbre de Noël gothique. Elle s'est rapidement aperçue que le problème dépassait Hydro-Québec. Une proportion de plus en plus importante des fils et accessoires aériens servent aux télécommunications - téléphonie et télévision haute vitesse, câblodistribution, etc. S'y ajoutent encore les panneaux de signalisation urbains et les feux de circulation.

«Il n'y a aucune coordination, ça devient une cacophonie», dit Tatjana Leblanc, professeure à l'École de design industriel et tuteure du projet de fin d'études.

Pour y mettre un peu d'harmonie, Yolaine Turcotte a imaginé un système modulaire dont l'élément de base est un lampadaire en aluminium. À son sommet s'enfiche une rallonge amovible pour la distribution de l'électricité et des télécommunications. Le système pourrait ainsi s'implanter par étapes. «L'idée était d'y aller de façon graduelle, en conservant la position des poteaux actuels», explique l'étudiante.

Le lampadaire surmonte une base élargie où seraient cachés les dispositifs des différents utilisateurs - commande des feux de circulation... ou d'automatisation électrique, par exemple. La hampe du lampadaire et le mât de distribution sont creux et peuvent donc accueillir les fils en toute discrétion.

Cette base, qui permettrait une future connexion souterraine, est revêtue d'un caoutchouc suffisamment épais pour qu'on puisse y agrafer les annonces de minet perdu ou de vente-débarras. «C'est une communication de quartier qui va demeurer», observe Yolaine Turcotte.

Au lieu d'être suspendus sur des traverses comme sur un séchoir à linge, les fils se fixent directement au mât, l'un au-dessus de l'autre, avec «des connecteurs étanches à déclenchement contrôlé en cas de verglas», explique-t-elle. Ils traversent ainsi le ciel comme une portée musicale, plus discrète que l'actuelle résille tendue au-dessus de la rue.

Dans la proposition de Yolaine Turcotte, les transformateurs ne sont plus accrochés en grappe mais enfilés sur le mât comme des tomates sur une brochette. Le mât de distribution et l'ensemble des fils ont la même couleur claire afin de mieux se fondre dans le décor.

Les problèmes techniques ne sont pas réglés, tant s'en faut. Le projet est teinté d'idéalisme. Mais la réflexion de Yolaine Turcotte a le - grand - mérite de s'attaquer au problème dans une vision globale qui tient compte de la majorité des enjeux. «On y trouve souvent des occasions d'innovation inespérées», assure l'étudiante, qui fait maintenant des études de maîtrise. Elle prépare une demande de subvention dans le but de poursuivre son étude avec une équipe pluridisciplinaire.