Elle voulait donner de son temps. Ses épargnes y sont passées.

«En décembre 2002, je suis partie avec l'idée d'offrir bénévolement mes services dans un foyer pour 130 garçons à Lima, pendant un an», raconte Diane.

Elle ne parlait pas l'espagnol. «Je suis partie avec mon dictionnaire sous le bras, relate la philanthrope de 57 ans, d'une voix enjouée. En échange, je demandais à être logée et nourrie. Je partais seule et sans revenus sauf mes économies personnelles.»

 

Ces économies personnelles, elles ont bien davantage servi aux mille urgences du Hogar Santa Maria qu'à ses besoins personnels. Quand elles ont été épuisées, Diane est revenue au Québec. C'était en mai 2005, deux ans et demi après son départ.

Elle travaille depuis lors pour un salaire annuel de 30 000$. «Le temps passe. J'aurai 58 ans en mai, et je veux y retourner le plus tôt possible, dès cette année, explique-t-elle. Est-ce que je peux repartir, à la lumière de mon profil?»

Son profil consiste en 55 000$ dans son REER, et en des épargnes non enregistrées de 10 000$. Elle possède un duplex d'une valeur de 425 000$, encore grevé d'un solde hypothécaire de 55 000$. Elle en occupe le rez-de-chaussée et touche un loyer de 830$ pour le logement à l'étage.

«Pour pouvoir vivre et surtout apporter une aide substantielle aux garçons, j'aurais besoin d'un revenu annuel de 10 000$», précise-t-elle. Elle songe à puiser dans sa marge de crédit hypothécaire, à louer son appartement.

«Merci de m'aider à les aider!» lance-t-elle.

La stratégie

Pour ce problème philanthropique, le nom de Nathalie Lacharité s'est imposé. La conseillère en sécurité financière est généreuse de ses excellents conseils en gestion budgétaire.

Première préoccupation: la santé. La conseillère a fait quelques recherches. Pour demeurer admissible à l'assurance maladie du Québec pendant son long séjour à l'étranger, Diane doit avoir le statut d'employée d'un OBNL canadien participant à un programme reconnu par Santé et Services sociaux Canada. Malheureusement, ce ne sera pas le cas.

Lors de son premier voyage, Diane avait souscrit une assurance pour environ 1100$. Elle ne l'avait pas renouvelée pour les deuxième et troisième années, comptant sur une chance qui lui aura en définitive souri.

Cette fois, l'assureur refuse, parce que Diane ne sera pas couverte par la RAMQ. «Leur conseil: voir si je pourrais être assurée à Lima!» s'étonne Diane.

À titre exploratoire, Nathalie Lacharité a ajouté 1000$ au budget annuel pour tenir compte de cette préoccupation.

Où trouver ces 11 000$? Notre conseillère écarte l'épargne non enregistrée de 10 000$. «Elle servira plutôt à couvrir les frais d'organisation du départ, le billet d'avion, notamment», signale-t-elle.

Il faut chercher ailleurs. Heureusement, Diane peut s'appuyer sur du solide. «L'achat du duplex, il y a 20 ans, constitue sans doute le meilleur investissement financier qu'elle aura fait, constate la conseillère. C'est essentiellement l'actif qui lui permet de considérer ce choix de vie humanitaire aujourd'hui.»

Diane a déjà trouvé un locataire prêt à payer 850$ pour son logement. Lorsqu'elle sera à l'étranger, ses revenus de location totaliseront ainsi 20 160$ par année.

Il faudra en soustraire les dépenses d'entretien annuel de 5000$ et les intérêts hypothécaires de 3050$, dans les deux cas déductibles d'impôts. Les revenus imposables s'établiront ainsi à 12 110$, qui seront grevés d'impôts négligeables.

Il reste encore à retrancher le capital remboursé chaque année sur la marge hypothécaire, soit 3372$ à l'heure actuelle.

Diane touchera donc de son duplex un revenu net de 8738$. Il manque encore 2262$ pour boucler son budget de 11 000$.

Où les trouver? «La solution la plus évidente est de tout simplement diminuer le remboursement de capital sur sa marge hypothécaire», répond Mme Lacharité. Il passerait ainsi de 3372$ à 1110$ par année. «Pour chaque année où le remboursement de capital est diminué de 2262$, l'amortissement s'allonge de 32 semaines, donc d'un peu plus de sept mois», a-t-elle calculé.

Diane avait plutôt songé à augmenter l'emprunt sur sa marge hypothécaire. Mais Nathalie Lacharité écarte cette avenue. Si d'aventure son séjour se prolongeait plus longtemps que prévu - ce ne serait pas la première fois -, Diane risquerait de trouver à son retour un solde plus élevé qu'à son départ, alors qu'elle s'approchera du cap de la soixantaine.

«De plus, aux yeux du fisc, cette stratégie contaminerait sa marge hypothécaire, ajoute notre conseillère. Pour éviter toute représaille fiscale, son comptable devrait extraire le montant emprunté du calcul des intérêts déductibles à payer. Comme ce montant supplémentaire n'est pas destiné à entretenir ou améliorer le duplex, les intérêts ne doivent pas être déductibles des revenus de location.»

Bref, un casse-tête à éviter.

En fait, observe Mme Lacharité, chaque année que Diane passera à l'étranger équivaut à une année de retraite. Elle ne versera aucune cotisation à son REER ou à la RRQ et elle vivra de ses actifs. À la différence qu'elle devra reprendre le collier à son retour au pays. Dans l'hypothèse qu'il s'effectuerait à 60 ans, ses épargnes REER actuelles, avec un rendement conservateur de 4%, se monteraient alors à 62 000$. Elles pourraient produire un revenu mensuel de 300$, auquel s'ajouterait le loyer du logement du duplex. Le solde hypothécaire ne sera pas encore acquitté. «Tout porte à croire qu'elle devra se retrouver un emploi - c'est d'ailleurs son intention -, du moins jusqu'à ce qu'elle puisse bénéficier de la pension de sécurité de la vieillesse», observe Nathalie Lacharité.

«C'est un trait de mon caractère, commente l'intéressée: si je m'inquiétais pour le futur, je ne partirais pas.»

Nathalie Lacharité suggère enfin que Diane répande la nouvelle de son voyage. «Par l'intermédiaire de l'organisme Les Ailes de l'Espérance, il est possible de faire un don désigné en spécifiant qu'il est fait à l'intention du foyer Santa Maria de Lima, au Pérou. Toute somme recueillie, si modeste soit-elle, serait alors entièrement acheminée au foyer.»

Chaque dollar donné sera un dollar que Diane n'aura pas à puiser dans ses réserves. Quelques heures de plus au Pérou...

 

LES CHIFFRES

Diane, 57 ans

Revenu: 30 000$

REER: 40 000$

Fonds de solidarité: 15 000$

Épargne personnelle: 10 000$

Duplex à Montréal, valeur marchande de 425 000$

Solde hypothécaire de 55 000$

Revenu de location: 830$/mois

Aucune autre dette

«Il existe d'autres façons d'exercer son altruisme. Il est possible de léguer le produit d'une assurance vie à un organisme.»

NATHALIE LACHARITÉ

Conseillère en sécurité financière