Le planificateur financier François Morency, président d'Aviso les conseillers financiers, le rappelle avec insistance: «Les règles d'un revenu de retraite équivalent à 70% du revenu de travail exigent une contribution de 35 ans. Pour atteindre cette échéance, Sylvie devrait travailler jusqu'en 2024, soit jusqu'à son 69e anniversaire.»

Pour déplacer cette cible à 60 ans, il faudrait que Sylvie ait déjà engrangé un capital supplémentaire de 112 653$, a calculé le planificateur.

 

Sylvie, de son côté, estime pouvoir vivre à la retraite avec la moitié de son revenu de vie active, une fois l'hypothèque acquittée. Elle se dit «prête à faire les sacrifices qui s'imposent. Il y a là une question de choix personnels basés sur nos valeurs sociales face à la consommation et à ce qui nous rend heureux dans la vie.»

Et en effet, son régime de retraite, si ses cotisations et son salaire se maintiennent, lui fournirait à 60 ans une rente de 36 000$ avant impôt.

Cependant, son train de vie actuel gravite autour de 40 000$. «Il est entendu qu'il est possible de réduire son train de vie à la retraite, observe François Morency. En contrepartie, le temps occupé par le travail doit être remplacé par des loisirs ou des activités personnelles. Il faut s'attendre à ce que ces activités engendrent des dépenses.»

Bref, il juge irréaliste de réduire les dépenses de 50% à la retraite. Néanmoins, pour aider Sylvie à s'approcher de son objectif, il lui recommande de participer à son régime de retraite jusqu'à sa 22e année de service, afin de limiter la réduction pour retraite anticipée. «Après les 22 ans, la réduction actuarielle est de 0,25% par mois d'anticipation de retraite au lieu de 0,5% par mois», explique le planificateur.

Une fois qu'elle aura atteint 55 ans et 22 ans de service, Sylvie pourrait quitter son emploi, sans toutefois réclamer le paiement immédiat de sa rente de retraite. Elle aurait alors le loisir de dénicher un emploi à temps plein dans sa spécialité.

En attendant, François Morency lui recommande de contribuer au CELI (compte d'épargne libre d'impôt), où dès maintenant, elle pourrait verser 5000 des 6000$ qu'elle détient en liquidités. Elle devrait également épargner les remboursements d'impôts provenant du fonds de travailleurs où elle verse ses cotisations REER annuelles. En réponse aux interrogations de Sylvie, notre planificateur déconseille la vente du duplex. «Habituellement, dit-il, ça coûte plus cher de le remplacer que de le conserver.»

Mieux vaudrait plutôt emménager dans le logement à l'étage, ce qui permettrait à Sylvie de retirer 350$ de plus en loyer pour le rez-de-chaussée, selon ses propres estimations. Des travaux d'aménagement de 15 000$, amortis sur cinq ans, coûteraient 290$ par mois (prêt à un taux de 6%) - avant les crédits de 2620$ que procureraient les nouveaux crédits d'impôt fédéral et provincial à la rénovation. «Le changement semble s'autofinancer et Sylvie profitera par la suite du revenu et de la fiscalité supplémentaire», observe M. Morency.

Déjà, Sylvie pourrait accélérer le remboursement de son hypothèque en faisant des versements aux deux semaines.

Sur son hypothèque de 87 000$, 30 000$ ont été prêtés à son fils aîné pour l'aider à acquérir sa première maison. Il le lui rembourse à raison de 200$ par mois, une somme que François Morency propose d'appliquer systématiquement au remboursement de l'hypothèque.

Enfin, et surtout, le planificateur estime que Sylvie, avec un budget bien en main, pourrait être en mesure d'épargner 7000$ par année. «Dégager des liquidités lui permettra de financer les changements à venir et de sécuriser ses décisions», conclut-il.

LA SITUATION

«Je ne pensais jamais avoir recours à vos services», formule Sylvie, qui croyait son projet de retraite suffisamment étayé.

La femme de 53 ans occupe à mi-temps un poste de professionnelle en recherche. Des contrats autonomes auprès du service qui l'emploie lui permettent de compléter sa semaine et doubler son revenu, pour le porter à un confortable 70 000$ par année. Mais voilà: on vient de lui apprendre que son poste à temps partiel serait retranché en juin 2010. Elle sera replacée dans un autre service - Dieu sait où, dit-elle - mais elle perdra du coup ses contrats parallèles. «J'aurai à ce moment-là près de 55 ans et 24 ans d'ancienneté, et accumulé 21 ans de cotisation à mon fonds de pension, confie-t-elle. Comme on dit, ça fesse dur.»

Que faire? Pour conserver ses contrats, elle pourrait demeurer dans le même service en occupant un poste moins bien rémunéré. Il en résulterait tout de même une baisse de ses revenus... et de sa rente de retraite. Elle songe également à abandonner son statut d'employé régulier pour se consacrer à plein aux contrats à la pige. Elle possède un duplex, encore hypothéqué à hauteur de 89 500$, dont elle en tire un revenu de location de 9000$ par année.

Son objectif, décrit-elle: «faire des choix qui me permettront de prendre ma retraite à 59 ou 60 ans avec environ 33 000$ par année, quitte à vendre la maison vers 70-75 ans.»

LES CHIFFRES

Sylvie, 53 ans

Encaisse: 9000$

Fonds de travailleurs: 40 000$

Autres REER: 6700$

Propriété (duplex): 365 000$

Passif

Solde hypothécaire: 89 500$

Prêt auto: 2000$

LA RECOMMANDATION

Une retraite avec 50% du revenu de la vie active est irréaliste. Néanmoins, une série d'aménagements et une épargne supplémentaire de 7000$ par année ne peuvent que rapprocher Sylvie de ses objectifs.