(New York) Le groupe pharmaceutique américain Eli Lilly, critiqué pour les prix élevés de son insuline, va les réduire drastiquement et plafonner à 35 dollars par mois le montant à débourser pour ce médicament dont dépendent des millions d’Américains atteints de diabète.

Le président américain Joe Biden, qui a régulièrement dénoncé ces derniers mois la hausse des tarifs demandés par les laboratoires pour ce traitement vital, a rapidement salué cette annonce.

« L’insuline coûte moins de 10 dollars à fabriquer, mais les Américains sont parfois obligés de payer plus de 300 dollars pour l’obtenir. C’est tout simplement injuste », a-t-il souligné dans un communiqué avant d’exhorter les autres laboratoires pharmaceutiques à « suivre » cet exemple.

Sanofi et Novo Nordisk, qui avec Eli Lilly représentent les trois grands fabricants d’insuline aux États-Unis, ont assuré dans des messages à l’AFP avoir eux-mêmes des programmes limitant l’argent à débourser pour les patients éligibles, allant de la gratuité à 100 dollars.

Le geste d’Eli Lilly est d’autant plus important que le nombre de diabétiques aux États-Unis a plus que doublé en vingt ans, 37,3 millions de personnes étant désormais atteintes de cette maladie, selon les autorités. Et le diabète est maintenant la 7e cause de mortalité dans le pays.

« Lilly prend ces mesures pour faciliter l’accès aux insulines Lilly et pour aider les Américains qui peuvent avoir des difficultés à naviguer à travers un système de santé complexe, pouvant les empêcher d’obtenir de l’insuline à un prix raisonnable », explique l’entreprise dans un communiqué.

Dans le détail, le laboratoire va d’une part réduire de 70 % le prix de ses insulines les plus vendues, Humalog et Humulin, à partir du quatrième trimestre 2023.  

Eli Lilly va parallèlement réduire le prix de son insuline générique Insulin Lispro à 25 dollars le flacon à partir du 1er mai, contre 82 dollars actuellement.

Le groupe va aussi plafonner à 35 dollars par mois le montant maximum à payer pour les patients assurés devant payer un reste à charge et pour les patients non assurés, s’alignant ainsi sur des propositions du gouvernement américain.

Eli Lilly s’était involontairement retrouvé sous le feu des critiques en novembre après la parution d’un tweet émis avec un compte Twitter à son nom, mais en fait usurpé, qui promettait de l’insuline gratuite. L’épisode avait relancé le débat sur le prix du médicament.

Pression de l’opinion publique

Le prix de l’insuline aux États-Unis a beaucoup augmenté ces dernières années, doublant presque entre 2012 et 2016 avant de se stabiliser selon une note du ministère de la Santé.

Les fabricants de médicaments font régulièrement valoir qu’ils accordent parallèlement des rabais de plus en plus importants aux assureurs.

Selon Damien Conover, spécialiste du secteur pharmaceutique à Morningstar, ces rabais représentent actuellement près de 80 % du prix officiel et vont sûrement baisser, laissant Eli Lilly « moins affecté que la réduction des tarifs (de 70 %, NDLR) pourrait le laisser suggérer ».  

Mais les augmentations de prix ont frappé de plein fouet certains diabétiques sans assurance ou ceux devant payer un reste à charge élevé.

La loi visant à lutter contre l’inflation (IRA) adoptée à l’été 2022 comprenait parmi ses mesures un plafonnement du reste à charge à 35 dollars par mois pour les patients couverts par Medicare, l’assurance santé publique réservée aux plus de 65 ans aux États-Unis.  

M. Biden a plaidé lors de son discours sur l’état de l’Union début février pour un élargissement de ce plafonnement à tous les diabétiques.  

Une telle mesure a toutefois peu de chances de passer dans la mesure où la Chambre des représentants est désormais contrôlée par les Républicains, qui se montrent généralement hostiles à toute mesure limitant le pouvoir des entreprises.

Le comité national du parti démocrate (DNC) a rappelé mercredi que tous les élus républicains avaient voté l’été dernier contre l’IRA.

L’association américaine des diabétiques ADA a, dans un communiqué séparé, salué la décision d’Eli Lilly et « encouragé les autres fabricants d’insuline à faire de même ».

Des responsables démocrates ont aussi applaudi la nouvelle, l’influent sénateur Bernie Sanders soulignant par exemple qu’après avoir dégagé près de 7 milliards de dollars de bénéfices l’an dernier, Eli Lilly avait plié face à « la pression de l’opinion publique ».