(Ottawa) La société derrière les épiceries Loblaws et Provigo, les Compagnies Loblaw, nie qu’elle profite de l’inflation pour engranger des profits. Son président-directeur général, Galen Weston, n’a pas témoigné dans le cadre de l’enquête parlementaire sur la hausse des prix des aliments, lundi, contrairement à la demande du Nouveau Parti démocratique (NPD). L’entreprise a plutôt envoyé son vice-président aux finances pour la vente au détail, Jodat Hussain, pour répondre aux questions des élus.

« Dans notre compagnie, je suis le mieux placé pour parler d’inflation et comment ça touche nos états financiers », a répondu M. Hussain lorsque le député néo-démocrate Alistair McGregor lui a demandé pourquoi le grand patron de Loblaw ne s’était pas déplacé.

Il témoignait devant le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes.

« Fondamentalement, le prix de l’épicerie a augmenté parce que le coût des produits que les épiciers achètent des fournisseurs est en hausse », a-t-il expliqué. Il a ajouté que la marge de profit sur « chaque produit vendu » est de moins de 4 cents. Il n’a toutefois pas indiqué quelle était la marge de profit pour les produits alimentaires seulement.

Il a expliqué la hausse des prix des aliments par la hausse du coût d’ingrédients de base comme la farine, le sucre et l’huile sur les marchés mondiaux, de même que par la hausse du coût de la main-d’œuvre.

M. Hussain a assuré que Loblaw s’était opposé à environ un demi-milliard de coûts additionnels en 2022 en négociant avec ses fournisseurs. « Certaines négociations sont plus difficiles », a-t-il dit en citant le conflit avec Frito-Lay, qui a privé la chaîne d’épiceries de plusieurs marques de croustilles durant trois mois.

De grands détaillants « abusent »

Le professeur Sylvain Charlebois, qui dirige le Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, a plaidé pour un code de conduite dans l’industrie alimentaire, qui doit en dévoiler un d’ici un mois.

« De nombreux Canadiens ignorent le fait que dans l’industrie alimentaire, les fournisseurs doivent payer les épiciers pour faire des affaires », a affirmé M. Charlebois.

Ces frais sont généralement justifiés par les coûts de marchandisage et l’espace d’étalage, mais la donne a changé au cours des dernières années.

Des entreprises comme Loblaw, Walmart et Metro abusent et certaines redevances ont été imposées rapidement de manière fortuite et unilatérale. Il est maintenant plus difficile au Canada pour les transformateurs et les épiciers indépendants de compétitionner.

Sylvain Charlebois, professeur et directeur du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse

Selon lui, le Bureau de la concurrence manque à son devoir en acceptant certaines grosses acquisitions qui ont réduit le nombre de chaînes en concurrence, d’où la nécessité d’un code de conduite pour les épiciers. Il estime que cela pourrait « changer la culture » de l’industrie où la « coordination verticale et la collaboration existent à peine ».

« Un code peut neutraliser les rapports de force au sein de la chaîne, stabiliser les prix au détail, mettre l’accent sur la valeur et l’innovation des consommateurs, améliorer la sécurité de l’approvisionnement en aliments au pays et encourager l’investissement dans le secteur agroalimentaire », a-t-il expliqué.

L’enquête parlementaire sur les prix des aliments a été mise sur pied à la demande du NPD. Le parti de gauche soutient que les grandes enseignes ont fait « d’énormes profits » au cours de la dernière année tandis que les salaires de leurs travailleurs et les prix payés aux producteurs agricoles n’augmentent pas au même rythme.

Un rapport des universités Guelph, Dalhousie, de Saskatchewan et de Colombie-Britannique sur les prix alimentaires prévoit que le coût pourrait encore monter de 5 à 7 % en 2023, ce qui équivaudrait à une augmentation annuelle de plus de 1000 $ pour une famille de quatre personnes.

Lisez la chronique « Un bond de plus de 1000 $ en vue en 2023 »