Le nouveau numéro deux de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) sera domicilié aux États-Unis même si son prédécesseur réalisait le même travail à partir du siège social de Montréal. Ce n’est pas la première fois qu’un haut dirigeant s’en va au sud de la frontière, où le chemin de fer a généré le quart de ses profits l’an dernier.

Edmond Harris, qui remplace Rob Reilly comme vice-président directeur et chef de l’exploitation, sera établi à Homewood, en Illinois, a confirmé à La Presse le plus important chemin de fer au pays, mardi. Ce détail n’était pas indiqué dans le communiqué annonçant l’arrivée du vétéran de quatre décennies de l’industrie ferroviaire – qui a déjà travaillé au CN dans le passé avant de tirer sa révérence 2007.

Les raisons entourant le départ de M. Reilly, un Américain, n’ont pas été expliquées, mais il a déjà quitté la société. Nommé en 2019, ce dernier avait déménagé dans la région de Montréal. Il avait eu droit à une rémunération totale de 4,5 millions l’an dernier.

« J’espère que c’est temporaire, affirme François Dauphin, directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), à propos de la recrue du CN. Un chef de l’exploitation est la personne clé dans les activités quotidiennes d’un chemin de fer. J’espère qu’il va voyager fréquemment pour rencontrer son équipe ici. »

Dans une déclaration, le CN n’a pas voulu commenter les circonstances du départ de M. Reilly. Le chemin de fer affirme que « le cœur et l’âme » de la compagnie « se trouvent à Montréal ».

« Ed aura des bureaux à Howewood et à Edmonton, où se trouve une partie de la direction des opérations, et à Montréal, où se trouvent le siège social et des membres clés de l’équipe de direction », a-t-on expliqué.

Un autre transfert

Sans tambour ni trompette, un autre membre de la haute direction du CN a déménagé aux États-Unis en juin dernier. Il s’agit de Rance Randle, premier vice-président, mécanique et ingénierie. Celui-ci travaillait auparavant à Edmonton, en Alberta.

En tenant compte de M. Harris, c’est 30 % de la haute direction du CN – composée de neuf cadres qui se rapportent directement à la présidente-directrice générale Tracy Robinson et d’autres premiers vice-présidents de l’entreprise – qui demeurent à l’extérieur du Québec.

C’est le genre de chose que je vois de plus en plus. Nous sommes dans un marché où les cadres sont en position de force. Si on veut attirer les talents, le conseil d’administration doit parfois faire des concessions.

Richard Leblanc, spécialiste de gouvernance, de droit et d’éthique à l’Université York, à Toronto

Sur cette question, M. Dauphin abonde dans le même sens que son confrère, avec un bémol.

« C’est une très bonne candidature [M. Harris], mais je trouve cela dommage qu’on n’ait pas pigé dans la filière interne, ajoute le directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP). Je n’ai pas l’impression que c’était une préoccupation. »

Ce n’est pas la première fois que la métropole constate un déplacement d’activités. En février 2020, le CN avait confirmé le transfert d’une centaine d’employés vers Edmonton après avoir décidé de concentrer le contrôle ferroviaire de son réseau à cet endroit.

De plus, la compagnie tente de réduire l’empreinte physique de son siège social. La Presse a rapporté en septembre dernier que le CN avait mis en sous-location 13 185 mètres carrés (142 000 pieds carrés) au 935, rue De La Gauchetière Ouest. En avril dernier, le chemin de fer avait été plongé dans une vive controverse linguistique lorsque La Presse avait révélé que les francophones avaient été écartés de la table du conseil d’administration. L’entreprise a corrigé le tir en septembre dernier.

Mme Robinson et son nouveau numéro deux se sont côtoyés au Canadien Pacifique (CP) il y a une décennie. Mme Robinson s’occupait du marketing et des ventes alors que M. Harris était le chef de l’exploitation. Celui-ci agissait à titre de consultant auprès du CN depuis le printemps dernier.

Avec André Dubuc, La Presse

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  • 31 %
    En 2021, le CN a généré un peu moins du tiers de ses revenus totaux de 14,5 milliards aux États-Unis.
    source : CANADIEN NATIONAL