L’achat de Sunwing et de Vacances Sunwing par WestJet, s’il se concrétise, amoindrira la concurrence dans le créneau des destinations soleil au Canada, plaide Transat A.T. Dans sa forme actuelle, la transaction ne devrait pas obtenir l’aval d’Ottawa, croit le voyagiste québécois.

Cette critique figure dans un résumé des observations de l’entreprise établie à Montréal transmis aux autorités fédérales, et obtenu par La Presse, dans le cadre des consultations ayant pris fin le 22 juillet dernier. Transat A.T. reprend une critique adressée à son projet de mariage avec Air Canada avant qu’il ne soit annulé l’an dernier : la consolidation d’acteurs dans l’industrie aérienne.

« La fusion proposée entre WestJet et Sunwing éliminerait la concurrence entre deux des principaux fournisseurs de forfaits vacances sur de nombreuses destinations soleil, peut-on lire. Elle éliminerait la présence indépendance de Sunwing, un concurrent agressif et à bas coût sur ces liaisons. »

Transat A.T. n’est pas la seule à s’inquiéter. Aéroports de Montréal (ADM) a aussi interpellé Transports Canada. L’organisme sans but lucratif craint notamment que la fusion ne se traduise par une perte de vols directs à Montréal-Trudeau au profit de l’aéroport Pearson de Toronto, où WestJet est bien installée.

Lisez l'article « ADM craint une perte de vols directs vers Toronto »

Le résumé des arguments de la société mère d’Air Transat ne comporte toutefois pas de moyens pour atténuer les risques de concentration dans l’industrie aérienne. Le voyagiste se base sur la saison hivernale 2019, la dernière avant la pandémie, pour justifier ses craintes.

Ainsi, entre le 1er novembre et le 30 avril 2019, Sunwing chevauchait Vacances WestJet sur 86 % de ses liaisons vers les destinations soleil, calcule Transat A.T. La combinaison des deux compagnies aurait provoqué une situation de monopole sur 22 liaisons, notamment en Alberta ainsi qu’en Saskatchewan.

Toujours en attente

Interrogé par La Presse, le voyagiste québécois n’a pas voulu commenter le contenu du document. Jeudi après-midi, Transports Canada, WestJet et Sunwing n’avaient pas répondu aux questions envoyées par La Presse. Transports Canada a jusqu’au 5 décembre pour soumettre son rapport au ministre fédéral des Transports Omar Alghabra. Celui-ci fera ensuite une recommandation au cabinet.

Établie à Calgary, WestJet avait annoncé un accord visant à acquérir Sunwing et Vacances Sunwing en mars dernier. La transaction, dont le prix n’a pas été dévoilé, permettrait au deuxième transporteur aérien en importance au pays d’accentuer son empreinte dans le secteur du voyage d’agrément, un créneau sur lequel mise grandement le voyagiste québécois.

Transat affirme qu’en éliminant le chevauchement entre WestJet et Sunwing, il y aura moins de concurrence, ce qui va être le cas. Je comprends moins, cependant, pourquoi Transat craint l’élimination d’un concurrent.

John Gradek, expert en aviation et chargé de cours à l’Université McGill

Au moment d’annoncer le regroupement, WestJet avait affirmé que Vacances Sunwing et Vacances WestJet, des rivaux, continueraient d’exister.

En se positionnant contre le regroupement, l’entreprise québécoise reprend une tactique de WestJet, qui avait fait de même lorsque le projet de mariage entre le voyagiste et Air Canada avait finalement été abandonné en avril 2021 en raison des réticences de la Commission européenne, dont l’accord était essentiel.

L’an dernier, la compagnie albertaine avait profité des consultations de Transports Canada pour lui demander de rejeter la prise de contrôle de Transat A.T. par Air Canada ou d’imposer plusieurs conditions en raison des risques de concentration dans l’industrie aérienne.

Ces préoccupations de WestJet étaient jugées légitimes par certains observateurs. Avant la crise sanitaire, le regroupement des entreprises aurait eu une part du marché transatlantique de 60 % à partir du Canada et se serait chevauché sur certaines destinations soleil en plus d’avoir une emprise sur les voyages aériens à Montréal.

Puisque les activités de Sunwing et WestJet sont jugées plus complémentaires par bon nombre d’analystes, ceux-ci estiment que les probabilités de voir la fusion aller de l’avant sont plus élevées.

En savoir plus
  • 1996
    Année de fondation de WestJet. L’entreprise appartient actuellement à la firme d’investissement torontoise Onex.
    westjet