Réprimandée en 2021 pour les « délais déraisonnables » imposés à son concurrent Vidéotron pour l’accès à ses poteaux téléphoniques, Bell s’est vu imposer mercredi des amendes totalisant 7,5 millions de dollars pour trois violations de la Loi sur les télécommunications.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) n’a pas retenu entièrement la demande de Vidéotron et d’un fournisseur internet d’Ottawa, Community Fibre Company, qui avaient suggéré lors des audiences, en avril 2021, d’imposer l’amende maximale de 10 millions par violation. Vidéotron, notamment, avait plaidé que les pratiques de Bell étaient « clairement contraires à l’intérêt public et qu’elles devraient faire l’objet de mesures d’exécution importantes afin de décourager les violations futures ».

Bell, de son côté, a estimé avoir commis des « erreurs de bonne foi », par exemple en déployant sa propre fibre optique sur des poteaux dont l’accès avait pourtant été refusé à Vidéotron. « L’infaillibilité ne peut être la norme pour les propriétaires de poteaux qui font face à des milliers de projets de construction sur une base annuelle, chacun comportant des considérations et des défis uniques », avait fait valoir Bell, selon ce que résume en substance le CRTC.

Capacité financière et mesures

Dans sa décision rendue publique mercredi, l’organisme fédéral établit d’entrée de jeu qu’il n’avait pas à réévaluer la réprimande adressée à Bell en avril 2021, à la suite d’une plainte de Vidéotron déposée en juin 2020. On reconnaît que le géant canadien des télécommunications a pris certaines mesures pour faciliter l’accès à ses poteaux, mais on « s’interroge sur l’efficacité de certaines de ces mesures ».

Le CRTC estime que Bell aurait la capacité financière de payer le montant maximal prévu pour les trois violations, soit 30 millions. Mais il tient compte de quelques facteurs atténuants, notamment le fait que les mesures prises par Bell devraient réduire les retards pour les accès aux poteaux et « diminuer, dans une certaine mesure, la probabilité d’une future non-conformité », écrit-on. Un montant de 7,5 millions lui semble adéquat, mais on prévient Bell : « Le Conseil continuera de surveiller la situation et, au besoin, prendra les mesures appropriées en cas de future non-conformité. »

Pour le président du CRTC, Ian Scott, cette mesure renforce l’assurance que le marché des télécommunications au Canada sera plus « équitable et concurrentiel ». « La décision d’aujourd’hui souligne ce point et démontre que nous n’hésiterons pas à utiliser les outils à notre disposition afin de prendre des mesures visant à promouvoir la conformité lorsque les actions d’une entreprise violent ces principes », a-t-il déclaré par communiqué.

Sur son compte Twitter, le PDG de Québecor, Pierre Karl Péladeau, a dénoncé l’« avantage indu » que se donne Bell en refusant à son concurrent l’accès à ses infrastructures. « Difficile d’être plus clair ! a-t-il tweeté. Les manœuvres dilatoires anticoncurrentielles de Bell à l’encontre de Vidéotron sont des violations graves à la Loi sur les télécoms qui lui valent une pénalité record imposée par le CRTC. »

« Nous prenons connaissance de la décision et n’avons aucun commentaire à faire pour l’instant », a déclaré de son côté Caroline Audet, porte-parole de Bell.