(Montréal) Lion Électrique a bon espoir que les 5 milliards US promis par le gouvernement Biden pour financer l’électrification des autobus scolaires amènent de nouveaux clients tandis que des analystes jugent que la croissance du carnet de commandes est décevante.

Le carnet de commandes de l’entreprise de Saint-Jérôme, d’une valeur de 600 millions, atteint 2422 véhicules électriques, en date du 3 mai 2022, soit 286 camions et 2136 autobus.

Ce chiffre contraste avec le potentiel de production de 22 000 véhicules que le fabricant souhaite atteindre en 2023, note Nauman Satti, de Valeurs mobilières Banque Laurentienne. La société prévoit toujours commencer la production de véhicules à sa nouvelle usine américaine de Joliet, en Illinois, d’ici la deuxième moitié de l’année. « Le faible seuil de commandes crée un doute sur la thèse d’investissement, commente l’analyste financier. Le risque d’exécution continue d’augmenter avec le temps. »

Le président et chef de la direction de Lion, Marc Bédard, s’est voulu rassurant lors d’un appel avec les analystes financiers, mercredi. Aux États-Unis, l’administration Biden a confirmé en février dernier qu’elle allait verser aux États près de 5 milliards US sur cinq ans pour soutenir l’achat d’autobus scolaires électriques. « C’était difficile d’avoir des commandes au cours de la dernière année aux États-Unis, car tout le monde attendait le programme, explique-t-il. Je crois que nous allons voir les commandes de la part des opérateurs américains augmenter à l’avenir. »

Le carnet de commandes dans le segment des camions électriques a aussi donné des signes de faiblesse. On y trouve 14 camions de moins qu’il y a trois mois. En tenant compte des livraisons, M. Satti croit que cela veut dire que l’entreprise n’a reçu que deux commandes de camions au cours du trimestre.

Les entreprises de camionnage en avaient plein les bras au cours de la dernière année, a souligné M. Bédard. « Leur attention était ailleurs [que l’électrification de leur flotte] avec la pandémie et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement. Nous avons de bonnes indications que ce marché revient. »

L’autobus électrique occupe une plus grande part des activités de l’entreprise, mais le marché potentiel du camion électrique est beaucoup plus grand, a souligné M. Bédard. « Gardez en tête que le marché du camion est dix fois plus grand que celui de l’autobus scolaire et que le marché américain est dix fois plus grand que le canadien. »

Le manque de vigueur dans le marché du camion électrique pourrait s’expliquer par le fait qu’il est moins subventionné que celui de l’autobus scolaire, avance Rupert Merer, de la Financière Banque Nationale. « La demande pourrait se développer plus rapidement dans des marchés comme celui de la Californie qui a adopté des incitatifs afin d’encourager l’adoption des camions électriques. Nous pensons que Lion pourrait avoir du succès dans ce marché avec le début de la production à son usine en Illinois tandis qu’elle pourrait profiter du fait que les véhicules seront fabriqués aux États-Unis. »

Des réserves de batteries

M. Bédard a aussi indiqué que ses difficultés liées à la chaîne d’approvisionnement continuaient de s’amenuiser. La stratégie de l’entreprise depuis plusieurs mois est de conserver de plus grandes réserves de pièces et composantes afin d’éviter les délais de production.

L’inflation des prix des composantes des batteries électriques ne semble pas inquiéter la direction, pour le moment. Le chef de la direction financière, Nicolas Brunet, a mentionné que l’entreprise avait près de 3000 batteries en stock en plus « d’importantes » commandes à venir. La société a aussi conclu des contrats à long terme avec ces fournisseurs, ce qui lui assure une certaine protection contre la hausse des prix.

Il a rappelé que la société voulait produire « éventuellement » sa propre batterie. « Même si le prix des matériaux augmente, l’avantage de le faire soi-même, sans devoir payer le bénéfice d’un fournisseur, permettra d’avoir une importante réduction des coûts de nos batteries. »

Des revenus multipliés par quatre

Lion Électrique a dévoilé la veille que ses ventes avaient presque quadruplé par rapport à l’année dernière à 22,6 millions grâce à une augmentation du nombre de véhicules livrés.

Le constructeur de camions et d’autobus entièrement électriques a notamment annoncé avoir livré 84 véhicules au cours des trois premiers mois de l’année, soit une augmentation de 60 véhicules par rapport aux 24 livrés à la même période l’an dernier.

La société affiche un bénéfice net de 2,1 millions, contre une perte nette de 16,1 millions pour le premier trimestre de 2021. Ce bénéfice tient cependant compte d’un gain de 21,5 millions lié à un élément comptable et à une charge moins élevée que l’an dernier liée à un programme de rémunération par actions. La perte ajustée diluée par action, pour sa part, est de 6 cents.

Avant la publication des résultats, les analystes anticipaient une perte de 1 cent et des revenus de 23,04 millions, selon la firme Refinitiv.

L’action de Lion reculait de 3 cents, ou 0,38 %, à 7,85 $ à la Bourse de Toronto, vers midi.

Entreprise dans cette dépêche : (TSX : LEV)