Entre 2015 et 2019, Bell a été la cible de plus du tiers des plaintes des consommateurs de son industrie. La forte tendance à la baisse desdites plaintes, amorcée avec l’arrivée de Mirko Bibic en 2020, n’est pas le fruit du hasard : le PDG a fait de la satisfaction des abonnés sa priorité, combinant investissements dans le réseau et investissements dans le service à la clientèle. Prix élevés au Canada, couverture en région, plaintes des concurrents : il fait le tour du propriétaire en entrevue avec La Presse.

« Ça porte ses fruits »

Bell a beau être le plus important fournisseur canadien en télécommunications, avec ses 20,6 millions d’abonnés tous services confondus, sa mauvaise performance au chapitre des plaintes des consommateurs était frappante depuis une décennie. Le sommet a été atteint pour l’année 2018-2019 avec 5879 plaintes. Entre 2015 et 2017, Bell récoltait 36 % de l’ensemble des plaintes recueillies par la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision auprès de quelque 390 fournisseurs.

Mais les deux derniers rapports de l’organisme fédéral ont donné des raisons de sourire au PDG de Bell, Mirko Bibic.

Il ne le nie pas, les clients avaient quelques raisons de grogner. « Il y avait un réseau désuet, reconnaît-il. Ce n’est pas moi qui ai implanté le projet de mettre de la fibre optique partout, ç’a été implanté par mon prédécesseur en 2010. Ce que je fais, c’est que je continue ce boulot-là, mais je l’ai accéléré. Ça a donné un meilleur réseau, le plus rapide au monde, très fiable. Ça, ça améliore la perception et la qualité du service à la clientèle. »

Bell dépassera cette année les 5 milliards en investissements dans ses infrastructures, précise-t-il, contre 3,8 milliards en 2019. L’autre grand chantier, ç’a été d’améliorer le service à la clientèle, l’« expérience client » pour laquelle les 50 000 employés de Bell sont engagés. « Maintenant que c’est un impératif stratégique, 50 000 personnes ont un objectif : rendre la vie du consommateur plus facile, pour que ce soit plus facile de faire affaire avec Bell, plus facile aujourd’hui qu’hier, qu’il y a deux ans. C’est une de nos priorités, et ç’a été suivi par des investissements majeurs dans les services que nous donnons, que nous offrons à nos employés qui ont affaire tous les jours à nos clients. Nos outils, nos capacités en ligne se sont beaucoup améliorés depuis la COVID. La perception de Bell s’améliore grandement. »

Trop cher au Canada ?

Les comparaisons internationales ne mentent pas, le Canada est, année après année, un des quatre pays où le coût du service sans fil est le plus élevé. L’écart s’est toutefois resserré à partir de 2020.

Cette doléance, manifestement, M. Bibic l’a entendue souvent et les arguments sont tout prêts, que ce soit pour le sans-fil ou pour l’internet. « Dans le sans-fil, depuis 2019, le prix pour un forfait moyen au Canada a diminué de presque 30 %. Ce n’est pas mon rapport, c’est Statistique Canada. Le prix d’un gigaoctet de données a diminué de 65 % de 2015 à 2020. »

On ne peut comparer le Canada avec de plus petits pays avec une forte densité de population, estime-t-il. « Ça nous coûte plus cher de bâtir et d’exploiter les réseaux qu’ailleurs. On offre une valeur sûre, un meilleur réseau et une couverture nationale dans un territoire énorme, avec des prix en réduction. »

Pourquoi certaines filiales au rabais, y compris celles appartenant à Bell, arrivent-elles alors à offrir de meilleurs prix que les gros fournisseurs ? « Chaque marque cible un segment de consommateurs différent. Si vous voulez de meilleurs services haut de gamme, plus de données sur le meilleur réseau 5G, vous allez chez Bell. Si vous cherchez un forfait prépayé 3G parce vous voulez payer moins cher, vous choisissez une marque comme Koodo ou notre marque Lucky Mobile, où toutes les interactions se font en ligne. »

Poteaux et régions éloignées

Des concurrents se sont abondamment plaints de la mauvaise volonté de Bell à donner accès à ses poteaux téléphoniques, l’accusant du même coup de négliger les communautés rurales et éloignées. Québecor, notamment, a demandé l’intervention de Québec et du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) à ce sujet.

Souvent, Québecor dit n’importe quoi. On est le fournisseur de communications avec le plus d’abonnés dans les régions rurales et éloignées.

Mirko Bibic, PDG de Bell Canada

Il mise sur un nouveau service, l’internet résidentiel sans fil, qui est offert dans un million de foyers et vise spécifiquement les abonnés orphelins.

À terme, la fibre optique de Bell se rendra dans les 12,5 millions d’emplacements sur son territoire, annonce-t-il. D’ici la fin de l’année 2022, 8 millions de foyers auront soit la fibre optique, soit le réseau internet résidentiel sans fil à un minimum de 50 Mb/s.

Quant à l’accessibilité des poteaux, un dossier pour lequel le CRTC avait estimé en avril 2021 que Bell avait enfreint des articles de la Loi sur les télécommunications, M. Bibic assure avoir « allégé le processus ». Bell, une des six entreprises retenues dans le cadre du programme visant à brancher 148 000 foyers québécois à la haute vitesse d’ici septembre 2022, « va respecter l’échéancier du gouvernement », promet-il. « Nous, nous avons fait notre boulot à cet égard, c’est maintenant aux fournisseurs internet, les concurrents, de construire. Mais si je me fie à la cadence des demandes de permis déposées avec nous, je ne pense pas que la majorité de mes concurrents vont respecter l’échéancier du gouvernement. Ils ont pris un retard majeur. »

En savoir plus
  • 2,9 milliards
    Bénéfice net de BCE en 2021, en hausse de 7,2 % par rapport à l’année précédente
    RAPPORT ANNUEL 2021
    72 %
    Proportion des 49 781 employés de Bell affectés au « service sur fil ». Le sans-fil représente 17 % et Bell Média, 11 %.
    RAPPORT ANNUEL 2021