La montréalaise garde les yeux rivés sur la Bourse

Cinq mois après avoir abandonné son projet d’inscription à la Bourse de Toronto, la montréalaise Sharethrough étend sa présence en Europe avec l’ouverture d’un bureau à Londres et espère toujours faire le saut en Bourse lorsque les conditions le permettront.

Avec 90 % de son chiffre d’affaires réalisé aux États-Unis, l’expansion en Europe vise à diversifier les revenus. « L’Europe génère environ 8 % de nos revenus et l’objectif est d’amener ça à 30 % d’ici deux ans », affirme en entrevue le grand patron de l’entreprise spécialisée en publicité numérique, Jean-François Côté.

Avec l’embauche ce printemps d’un directeur général pour la région « Europe, Moyen-Orient et Afrique » pour diriger le nouveau bureau à Londres, Sharethrough entend avoir une quinzaine d’employés en Europe d’ici la fin de l’année.

Jean-François Côté précise que le chiffre d’affaires de Sharethrough a dépassé la marque des 60 millions US en 2021 (il était de 48 millions US en 2020).

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Jean-François Côté, PDG de Sharethrough

On va passer le cap des 100 millions US de revenus d’ici les deux prochaines années. On veut diversifier nos revenus afin d’avoir une empreinte globale en tant qu’entreprise de technologies.

Jean-François Côté, PDG de Sharethrough

Sharethrough se présente comme un fournisseur d’« expériences publicitaires optimisées » pour annonceurs et éditeurs. Sa technologie repose sur des algorithmes d’apprentissage profond permettant de cibler la performance publicitaire (rendement sur les dépenses publicitaires, trafic sur un site et notoriété de la marque).

Résultat de la fusion l’an dernier de la montréalaise District M avec l’américaine Sharethrough, l’entreprise souhaitait récolter 75 millions à l’automne en faisant le saut en Bourse, une somme devant renforcer la situation financière et appuyer la stratégie de croissance.

Sharethrough espérait obtenir une évaluation boursière initiale de 300 à 400 millions. La direction a cependant dû réviser ses plans.

« Malheureusement, la fenêtre de la Bourse s’est refermée à la fin octobre/début novembre », dit Jean-François Côté.

On a décidé de reporter notre entrée en Bourse et voir ce qui allait se passer durant la première moitié de 2022. Comme on le voit, il n’y a pas d’opportunités pour aller en Bourse présentement. On va donc exécuter notre plan d’affaires en tant qu’entreprise privée.

Jean-François Côté, PDG de Sharethrough

À l’instar de Sharethrough, deux autres entreprises québécoises (Lumenpulse et kdc/one) ont aussi renoncé à faire le saut en Bourse l’année dernière. Coveo, entreprise de Québec spécialisée dans l’intelligence artificielle appliquée au commerce électronique, a cependant réalisé avec succès en novembre son premier appel public à l’épargne. Le titre de Coveo demeure toutefois en forte baisse depuis.

En devenant une entreprise cotée en Bourse, Sharethrough espérait pouvoir utiliser son action comme monnaie pour réaliser des acquisitions.

Jean-François Côté soutient qu’à défaut d’entrer en Bourse maintenant, il peut compter sur de « bons investisseurs » pour l’appuyer dans l’exécution de la stratégie. Le Fonds de solidarité FTQ, Investissement Québec et Exportation et développement Canada détiennent ensemble environ 40 % du capital-actions alors que les cofondateurs, la direction et les employés contrôlent 60 %.

Le PDG se trouve néanmoins « chanceux » d’avoir reporté le projet d’inscription en Bourse. « On est capables de générer une croissance sans être à la merci du marché public », dit-il.

Cap sur 2023

« On continue de gérer les activités comme si on voulait devenir une entreprise publique. Et comme je le dis à mon équipe, nous sommes en camp d’entraînement. On continue de peser sur l’accélérateur et de gérer nos activités pour être prêts à entrer en Bourse lorsque la fenêtre va s’ouvrir. »

De la façon dont les choses se déroulent présentement, avec la volatilité et le contexte géopolitique dominé par la guerre en Ukraine, 2022 n’offrira pas de fenêtre pour aller en Bourse, selon lui.

« Ça semble davantage se dessiner pour 2023 », dit Jean-François Côté.

L’effectif de Sharethrough s’élève aujourd’hui à environ 160 employés. « On a 60 postes d’ouverts et on espère être 220 employés avant la fin de l’année », dit Jean-François Côté. Comme bon nombre d’entreprises du Québec, Sharethrough cherche notamment des ingénieurs informatiques.