L’idée d’une moto a circulé à « trois ou quatre reprises » chez BRP pendant les deux dernières décennies, sans dénouement concluant. Avec une famille de motocyclettes électriques, le constructeur de véhicules récréatifs veut maintenant passer à l’attaque pour profiter du virage qui se profile à l’horizon.

Dans deux ans, ces véhicules à deux roues s’ajouteront aux motoneiges, motomarines, VTT, autoquads biplaces et bateaux qui sortiront des usines de l’entreprise établie à Valcourt.

« Nous avions envisagé à plusieurs reprises de lancer une moto avec un moteur à combustion, mais c’est une industrie dans laquelle il y a plusieurs joueurs matures », a expliqué le président et chef de la direction de BRP, José Boisjoli, en entrevue avec La Presse, vendredi. « Là, l’industrie entre dans une phase de [transition], et on a une occasion de se démarquer. »

L’ancienne division des produits récréatifs de Bombardier n’est pas étrangère aux motos. Elle avait lancé un motocross Can-Am en 1973 avant de cesser la production de véhicules à deux roues en 1987.

Commercialisées sous la marque Can-Am, ces motocyclettes seront les tout premiers modèles électriques de la multinationale offerts aux consommateurs. BRP s’affaire à électrifier l’ensemble de son portefeuille, ce qui doit se faire d’ici 2026.

Peu d’informations ont été fournies par l’entreprise, qui dévoilait également ses résultats du quatrième trimestre, où elle a une fois de plus dépassé les attentes. Le nombre de modèles et les prix n’ont pas été dévoilés. Seule certitude : il y a aura des versions pour circuler « sur les routes » et « hors route », assure M. Boisjoli.

Avec cette incursion dans l’univers de la moto par l’entremise de modèles électriques, ce dernier estime que l’entreprise n’aura pas un trop grand écart à combler avec des acteurs importants comme Harley-Davidson et Honda dans ce créneau. BRP espère que ce nouveau segment lui permettra de générer des revenus d’au moins un demi-milliard de dollars annuellement vers 2030.

L’entreprise pourra utiliser son savoir-faire dans l’électrification et adapter aux véhicules à deux roues ses modules de batteries, selon M. Boisjoli. Elle n’aura pas à repartir de zéro, fait-il valoir. De plus, les adeptes de moto risquent de se tourner plus rapidement vers les modèles électriques comparativement aux amateurs de motoneiges, de VTT et de motomarines, croit le président de BRP.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

José Boisjoli, président et chef de la direction de BRP

« Cela va nous amener de nouveaux clients, affirme M. Boisjoli. Les motos ont accès à des bornes de recharge en milieu urbain. Quelqu’un qui achète un VTT pour aller à la chasse en région éloignée n’a pas d’options pour la recharge. Ce n’est pas le cas avec les motos. »

Gros marché

Dans l’ensemble, les analystes ont estimé que les motos électriques pourraient représenter une avenue de croissance intéressante pour BRP. Martin Landry, de Stifel GMP, souligne dans une note à ses clients que le marché de la moto, estimé entre 8 et 12 milliards, était le plus important dans l’industrie des véhicules récréatifs.

Nous retenons l’aspect de l’électrification, qui permet à BRP de se différencier et de tirer profit de ses investissements dans les batteries. Cette nouvelle gamme de produits devrait être bien accueillie par les concessionnaires, qui disposeront d’outils pour attirer de nouveaux clients.

Martin Landry, de Stifel GMP

Les premières motocyclettes électriques seront livrées en Amérique du Nord ainsi qu’en Europe, où les concessionnaires de BRP sont bien présents. Dans ces deux marchés, le volume potentiel est de 600 000 unités, selon l’entreprise.

Même si les concessionnaires qui font affaire avec la multinationale n’avaient pas de détails, ils voyaient la nouvelle d’un bon œil. Alain Carrier, président de Performance NC, propriétaire de sept enseignes BRP, affirme qu’il est « toujours plaisant » d’avoir de nouveaux produits à vendre lorsqu’on est concessionnaire.

« Nous vendons déjà de la moto ici, et c’est un produit très apprécié, dit-il, au bout du fil. C’est motivant de voir les constructeurs innover. Les voitures électriques, c’était un marché de niche il y a 10 ans, mais en 2022, ce n’est plus le cas. Il y a un mouvement. »

Les motos électriques de BRP seront construites dans ses usines mexicaines. Tout ce qui entoure la conception, la recherche et le développement s’effectue au Québec, souligne M. Boisjoli.

À la Bourse de Toronto, les investisseurs ont réagi favorablement aux annonces de l’entreprise, qui a également relevé son dividende trimestriel de 23 %, à 16 cents par action, en plus d’annoncer son intention de débourser jusqu’à 250 millions pour racheter de ses actions. Vendredi après-midi, le titre prenait 8,37 $, ou 9,45 %, pour se négocier à 96,94 $.

En savoir plus
  • 29 %
    BRP s’attend à ce que ses revenus augmentent de 24 % à 29 % au cours de l’exercice qui se terminera le 31 janvier 2023.
    Source : BRP