Les documents budgétaires du ministère des Finances, jumelés aux budgets de dépenses du Conseil du trésor, représentent facilement plus de 1000 pages de mesures de toutes sortes. La Presse a repéré certaines mesures passées inaperçues.

Un mouchard chez les rénovateurs

Après les restos et les taxis, Québec veut installer des modules d’enregistrement des ventes (MEV) chez les entrepreneurs en construction dans le but de lutter contre le travail non déclaré. Revenu Québec entend mettre à l’essai, en collaboration avec des entrepreneurs, une version web du module d’enregistrement des ventes (MEV-WEB) dans le secteur de la rénovation résidentielle. « Cette technologie s’intègre à même les applications qu’utilisent les entreprises. Ainsi, la transmission des informations s’effectuerait en continu et de manière parfaitement sécurisée », lit-on dans le document sur les renseignements additionnels. Il s’agit d’un MEV faisant appel à l’infonuagique plutôt qu’à de la quincaillerie coûteuse in situ comme dans la première version du MEV, déployée dans les restos en 2011. « Comment vais-je convaincre un entrepreneur en construction que l’imposition d’un MEV va écarter sa concurrence qui travaille au noir ? se demande François Bernier, vice-président principal, Affaires publiques, à l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ). Comment le MEV va-t-il empêcher un entrepreneur de faire une facture MEV de 15 000 $ et des travaux payables comptant de 5000 $ pour un projet de 20 000 $ ? Pour l’instant, les entrepreneurs voient le MEV comme de la lourdeur, comme un coût additionnel. »

Déploiement du MEV 2.0 dans les restos

Revenu Québec veut remplacer les MEV dans les restos par des MEV-WEB, plus modernes, au printemps 2023. Le MEV-WEB, qui a recours à l’infonuagique, « a notamment pour avantages de ne pas nécessiter la présence d’un appareil physique et de diminuer le fardeau administratif en éliminant la nécessité de produire mensuellement un sommaire périodique des ventes. De plus, les factures pourront être envoyées électroniquement aux clients, ce qui n’est pas possible avec la réglementation actuelle ».

L’agrandissement du Palais des congrès : pas demain la veille

Décidément, le gouvernement caquiste ne paraît pas pressé d’aller de l’avant avec l’agrandissement du Palais des congrès de Montréal. Pour la septième année de suite, le projet reste bloqué à l’étape initiale du processus devant mener à sa mise en service. Pourtant, le manque de places empêche Montréal de recevoir les plus grands évènements mondiaux dans les sphères d’excellence de son économie comme l’intelligence artificielle, a déploré dans nos pages Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM). C’était en juin 2020.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Pour la septième année de suite, le projet d’agrandissement du Palais des congrès reste bloqué à l’étape initiale du processus devant mener à sa mise en service.

Dans le Plan québécois des infrastructures (PQI), l’agrandissement du Palais des congrès apparaît dans la catégorie « à l’étude », soit exactement la même catégorie que les années précédentes, et ce, depuis 2015-2016.

Un projet est « à l’étude » lorsque le Conseil des ministres a approuvé la fiche d’avant-projet. Durant l’étude en question, l’organisme parrain, dans ce cas-ci la Société du Palais des congrès, monte un dossier d’opportunité « afin d’apprécier la pertinence du projet et de veiller à recommander la meilleure option pour répondre au besoin et aux exigences établies », explique-t-on dans le PQI. Pour qu’un projet passe de l’étape « à l’étude » à l’étape « en planification », le Conseil des ministres doit approuver le dossier d’opportunité, ce qui n’a pas été fait en sept ans.

« La Chambre réitère l’importance d’investir dans l’agrandissement du Palais des congrès. Pour rester attractive et pour véritablement relancer le secteur touristique, tel que le budget en fait mention, Montréal doit posséder des espaces capables d’accueillir les grandes foires commerciales dans nos secteurs de pointe », a commenté la CCMM dans un communiqué mardi.

Fonds des générations : près de 40 milliards d’ici 5 ans

En mars 2027, la cagnotte du Fonds des générations atteindra près de 40 milliards, de quoi rendre imaginatifs bien des politiciens qui risquent de vouloir accaparer le pactole avec les meilleures intentions du monde.

Dans son dernier budget, le gouvernement québécois prévoit que le solde de la valeur comptable du fonds des générations va tripler d’ici 2027, passant de 12 milliards, en 2020-2021, à 37 milliards, en 2026-2027.

Le fonds a été établi en 2006 par le gouvernement dirigé par Jean Charest pour rembourser la dette publique. La caisse est alimentée par Hydro-Québec, les redevances hydrauliques, les taxes sur l’alcool, les revenus miniers, les biens non réclamés et les revenus de placement générés sur le solde du Fonds, lequel est géré par la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Dans les prochaines années, le Fonds profitera surtout de l’indexation du prix de l’électricité patrimoniale. Les recettes annuelles vont passer de 400 millions en 2021-2022 à 1,2 milliard en 2026-2027, soit 800 millions de plus par année. Les revenus de placement vont tripler eux aussi, passant de 500 millions à 1,5 milliard.

Le ratio de la dette brute au PIB s’établira à 41,9 % au 31 mars 2026 grâce au Fonds des générations.

Simplifier les démarches administratives à la suite d’un décès

Pas facile de s’y retrouver dans les démarches administratives à la suite d’un décès, surtout lorsque c’est la première fois qu’on fait face à cette épreuve. Le gouvernement prévoit donc d’investir 14 millions de dollars sur cinq ans pour son « Plan d’action gouvernemental sur la simplification des démarches administratives à la suite d’un décès ». Il promet d’accélérer l’inscription d’un décès au registre de l’état civil avec la mise en place d’une plateforme électronique destinée spécifiquement à cette déclaration. Pour éviter aux héritiers et liquidateurs de faire mille et un appels, la CAQ souhaite enfin améliorer l’administration des dossiers en augmentant la collaboration entre les ministères et les organismes. Des mesures seront prises pour faciliter la désignation du liquidateur, et les règles entourant la liquidation d’une succession devraient aussi être simplifiées. Tous les détails seront annoncés prochainement.

Isabelle Dubé, La Presse