Un groupe d’environnementalistes s’oppose au stockage des résidus miniers dans des lacs de la Côte-Nord

La décision du gouvernement du Québec d’autoriser Minerai de fer Québec à remplir des lacs avec les résidus de sa mine de fer du lac Bloom, sur la Côte-Nord, suscite colère et incrédulité.

C’est une contradiction flagrante entre les gestes et les paroles du gouvernement, selon Ugo Lapointe, porte-parole de Québec Meilleure Mine.

Une telle décision discréditerait complètement la campagne de relations publiques que Québec et l’industrie [minière] déploient depuis des semaines à grands coups de millions en publicités pour ‟verdir” l’image de l’industrie.

Ugo Lapointe, porte-parole de Québec Meilleure Mine

Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), qui a examiné le projet d’agrandissement du parc à résidus de la société minière, avait émis un avis défavorable au projet parce qu’il détruirait 235 hectares de milieux humides et 8 lacs, dont un de 88 hectares.

L’entreprise « n’a pas fait la démonstration que les solutions retenues pour la gestion des rejets miniers sont celles qui minimisent les impacts sur les milieux humides et hydriques. En conséquence, la commission recommande que le projet ne soit pas autorisé tel que présenté », avait conclu le rapport de l’organisme rendu public il y a un an.

Le projet a obtenu le feu vert du gouvernement, qui impose toutefois à l’entreprise d’investir 20 millions supplémentaires pour compenser la perte permanente d’habitats du poisson et la destruction des milieux humides.

Un regroupement d’environnementalistes a demandé lundi au gouvernement de revenir sur sa décision et d’adopter un règlement pour interdire le déversement de déchets miniers dans les lacs.

« Comment le gouvernement et l’industrie peuvent-ils d’un côté prétendre vouloir fabriquer des éoliennes et des batteries vertes à partir de métaux du Québec, et de l’autre permettre de déverser des déchets miniers dans nos lacs ? Ça n’a aucun sens », s’est indigné le porte-parole de la Fondation Rivières, André Bélanger.

Le député de Saguenay et porte-parole du Parti québécois en matière d’environnement, Sylvain Gaudreault, est surpris que le gouvernement ait accepté le projet tel que présenté par Minerai de fer Québec.

« Ce qui est toujours étonnant, c’est de voir une décision gouvernementale qui va à l’encontre du BAPE », a-t-il commenté.

Selon lui, il faut que les entreprises s’adaptent à l’évolution de la science et fassent en sorte de réduire et de minimiser l’impact de leurs projets, avant de penser à les compenser. « Il est trop facile de dire : on va compenser, alors qu’il faut réduire les impacts sur l’environnement », déplore-t-il.

Une suggestion rejetée par la mine

Dans son rapport, le BAPE avait suggéré à l’entreprise d’envisager d’autres solutions pour le stockage de ses résidus. « Il pourrait être techniquement et économiquement faisable de remblayer l’excès de résidus miniers grossiers dans la fosse » et d’éviter de détruire des lacs, avait souligné le BAPE.

Cette solution n’a pas été retenue par Minerai de fer Québec, a indiqué son chef des opérations, Alexandre Belleau. Selon lui, les conditions imposées par le gouvernement avant d’approuver le projet sont contraignantes et vont nécessiter plusieurs années de travaux.

C’est une bonne nouvelle pour le Québec parce que ça allonge la durée de vie de la mine.

Alexandre Belleau, chef des opérations de Minerai de fer Québec

L’entreprise, dont le gouvernement du Québec est actionnaire, investit actuellement 400 millions pour doubler la production de la mine du lac Bloom, près de Fermont. Le début de la production commerciale de cette phase 2, qui permettra de produire 15 millions de tonnes de fer par année, est prévu d’ici la fin de 2022. L’entreprise, qui est un moteur économique important pour la Côte-Nord, emploie près de 1000 personnes.

Alors que le prix du fer est en forte augmentation, Champion Iron, la société mère australienne de Minerai de fer Québec, accumule les profits. Après neuf mois de l’exercice en cours, Champion Iron affiche un profit de 407 millions, contre 308 millions un an plus tôt. Ses revenus sont en hausse de 28 % en un an, à 1,13 milliard.

En savoir plus
  • 50 millions
    Le coût du projet d’agrandissement du parc à résidus est d’environ 50 millions. La durée de vie de la mine du lac Bloom est estimée à 20 ans (de 2020 à 2040).
    SOURCE : BUREAU D’AUDIENCES PUBLIQUES SUR L’ENVIRONNEMENT