Les employés de La Cordée s’inquiètent pour l’avenir de l’entreprise. Sans convention collective depuis la création de leur syndicat il y a plus de 18 mois, ils reprochent au nouveau propriétaire, Mach Capital, son manque de communication et estiment que peu d’efforts sont faits pour séduire et retenir le personnel.

« Ils n’ont pas vraiment fait preuve d’ouverture par rapport à la convention, affirme Ambroise Thériault, porte-parole des employés syndiqués de La Cordée et membre du conseil de négociation (CSN). Il y a eu des rencontres avec l’avocat, mais il n’y a pas vraiment eu une réelle progression par rapport au projet qu’on avait présenté. On s’en va vers une impasse. » À l’automne 2020, quatre rencontres de négociation ont eu lieu entre les parties.

Spécialiste du sport et du plein air au Québec, l’entreprise, qui s’était placée à l’abri de ses créanciers en février 2020, est devenue la propriété de Mach Capital, société de capital d’investissement privé, en août. Le détaillant compte actuellement quatre magasins dans la grande région de Montréal : deux dans l’île, un à Laval et l’autre sur la Rive-Sud, à Saint-Hubert. Il détient également le magasin La Vie Sportive à Québec depuis 2018. Seuls les employés des deux magasins de la métropole, 70 au total, sont syndiqués.

Essentiellement, ceux-ci veulent être payés au salaire minimum plus 50 cents. Leur salaire est gelé depuis deux ans. Ils demandent également à rencontrer les acheteurs deux fois par année pour leur faire part des tendances qu’ils ont observées chez les clients. Le retour permanent des rabais pour employés ainsi que la possibilité de louer de l’équipement font aussi partie des demandes.

Il faut donner des conditions de travail suffisantes pour avoir une rétention de personnel. Il faut qu’on trouve une manière de garder les jeunes spécialisés.

Ambroise Thériault, porte-parole des employés syndiqués de La Cordée et membre du conseil de négociation

« Pour être à jour sur les tendances, il faut quand même que tu aies une communication avec ceux et celles qui sont en ligne de front avec la clientèle et qui sont aussi [des gens qui pratiquent le plein air], ajoute-t-il. Ce ne sont pas des gens qui vont prendre leur retraite à La Cordée. Ce sont des jeunes qui sont là parce qu’ils tripent. Ils ne sont pas là parce qu’ils veulent avoir un salaire mirobolant ou une retraite dorée. C’est parce qu’ils sont dans un milieu qui leur plaît. »

Boutique spécialisée

Selon M. Thériault, il existe déjà beaucoup d’enseignes à grande surface qui vendent, en magasin ou en ligne, des vélos, des casques et d’autres articles pour les adeptes de sport et d’aventure. « Ce qui fonctionne pour le plein air, ce sont des boutiques spécialisées connectées sur leur communauté, croit-il. Les gens vont se déplacer pour aller chercher des conseils. La survie de La Cordée, ça passe par là. »

« [Chez Mach Capital], ils ne font pas de plein air, dit-il, rappelant dans la foulée qu’ils sont davantage “dans le béton”. Est-ce que c’est parce qu’ils veulent revendre ça ou refermer ça dans deux ans ? »

Avec de nombreuse questions sans réponse, les syndiqués souhaitent que la haute direction leur fasse part des grandes lignes du plan de relance prévu pour l’entreprise. Sinon, estime M. Thériault, La Cordée risque de perdre beaucoup de joueurs. « Il y a beaucoup de gens qui me disent : pourquoi je suis ici ? » Sans pouvoir donner de chiffres, M. Thériault affirme que de nombreux employés ont quitté le navire.

Interrogée à ce sujet, Emmanuelle Ouimet, présidente-directrice générale de La Cordée, assure de son côté que le nombre d’employés est demeuré le même depuis l’achat de l’entreprise par Mach Capital. En août 2020, on parlait de 286 emplois.

« Aucun commentaire »

Concernant les reproches faits par le syndicat, Mme Ouimet a répondu n’avoir « aucun commentaire à faire sur ce qui concerne les relations de travail ». « On a rencontré les employés en septembre pour leur donner les grandes orientations de la transformation, a-t-elle tenu à souligner. Tout est en mouvance. On est comme tout le monde, en mode COVID-19. »

Elle assure cependant que le plan de transformation sera « présenté à tout le monde ». Des projets d’expansion sont toujours dans les plans. Une nouvelle boutique ouvrira à l’automne dans le quartier Saint-Roch, à Québec.

Il a été impossible de parler à un représentant de Mach Capital. « Ce qu’Emmanuelle Ouimet de La Cordée vous a mentionné est le même point de vue que [celui de] Mach Capital », nous a-t-on répondu par écrit.

Avec la collaboration de Marie-Eve Fournier, La Presse