(Washington) L’administration Biden compte augmenter les impôts sur les entreprises pour contribuer au financement d’un gigantesque plan d’investissements notamment dans les infrastructures, a confirmé mardi la secrétaire américaine au Trésor lors d’une audition devant la Chambre des représentants.

Joe Biden « a été clair sur les propositions concernant la fiscalité », a déclaré Janet Yellen, précisant que le président comptait remonter le taux d’imposition sur les sociétés à 28 % contre 21 % actuellement.  

« Nous assistons à une course mondiale pour tirer vers le bas la fiscalité des entreprises et nous espérons y mettre un terme », a-t-elle ajouté.

De plus, la hausse des impôts pourrait être « combinée à une baisse des incitations accordées aux entreprises américaines qui leur permettent de déplacer leurs fonctions de support à l’étranger », a expliqué la secrétaire au Trésor.

Au cours de la campagne présidentielle, Joe Biden avait proposé de relever le taux d’imposition des sociétés de 21 % à 28 % et d’accroître les impôts des particuliers gagnant plus de 400 000 dollars par an.  

Ces projets sont revenus sur le devant de la scène ces derniers jours alors que l’administration démocrate travaille à un projet de loi pour lancer de vastes investissements de 3000 milliards de dollars.

Les républicains, mais aussi une frange de démocrates, sont farouchement opposés à un endettement supplémentaire alors que le gouvernement a déjà dépensé depuis le début de la pandémie près de 6000 milliards de dollars en faveur des ménages et des entreprises.

Le financement d’un nouveau plan d’ampleur pourrait donc se faire via les impôts.

Janet Yellen a argué que l’impôt sur les sociétés était actuellement « très faible ».

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Janet Yellen

Selon Politico, qui cite une étude du gouvernement, le taux d’imposition moyen des sociétés américaines réel est déjà bien inférieur aux 21 % théorique : il avait chuté de plus de moitié, à 7,8 %, à la suite de la grande refonte fiscale adoptée par les républicains en 2017.

Le gouvernement de Joe Biden compte ainsi revenir sur cette mesure phare de l’ère Trump.

Cette réforme avait suscité de nombreuses critiques de l’opposition démocrate de l’époque et d’économistes, car elle a fait la part belle à la diminution des impôts des multinationales et des ménages aisés. Des experts avaient aussi souligné à l’époque que les sociétés ne payaient déjà pas le taux réel d’imposition.

Emplois à la clé

« Je pense qu’un ensemble d’investissements dans les personnes, d’investissements dans les infrastructures, aidera à créer de bons emplois dans l’économie américaine, et des changements dans la structure de la fiscalité contribueront à financer ces programmes », a également déclaré Janet Yellen.

Outre la création d’emplois, il devient vital aux États-Unis de moderniser une myriade d’infrastructures en piteux état.  

La plupart des autoroutes, routes, ponts, voies ferrées, aéroports, etc. ont été construites entre les années 1950 et 1970. Et, elles ont été mal entretenues au fil du temps.

L’objectif de l’administration Biden est à la fois de moderniser les infrastructures existantes et de lancer des projets plus respectueux de l’environnement dans le secteur de l’eau, des transports et de l’énergie.

De leurs côtés, les économistes soulignent que ces projets structurants permettraient de créer de la croissance sur la durée et non pas ponctuellement, comme c’est le cas du plan de sauvetage de 1900 milliards de dollars acté récemment.

Lobby des entreprises

Avant même la présentation du plan de 3000 milliards de dollars, les tractations en coulisses au Congrès ont commencé, les entreprises faisant pression sur les législateurs pour éviter de revenir sur leur fiscalité.  

Mardi, la secrétaire au Trésor était auditionnée aux côtés du président de la Banque centrale Jerome Powell. C’est la première fois qu’ils étaient entendus simultanément dans leurs rôles actuels.  

Le président Donald Trump avait choisi de remplacer Mme Yellen par M. Powell à la tête de la Réserve fédérale (Fed). Mais les deux responsables ont passé plusieurs années à travailler ensemble à la Fed et entretiennent des rapports cordiaux.

Ils ont tous deux fait part mardi d’une reprise économique plus solide que prévu tout en soulignant la nécessité de garder le cap pour aider « des millions d’Américains qui souffrent encore ».

Jerome Powell a insisté sur la nécessité de continuer de soutenir l’économie qui est « loin d’être complètement remise » de la récession provoquée par la pandémie.

Et il a une nouvelle fois minimisé les risques d’une inflation incontrôlée, martelant que la Réserve fédérale disposait des outils pour y faire face.