Pratiquement devenu l’emblème de la pandémie, le papier de toilette s’est retrouvé dans l’actualité plus souvent qu’à son tour dans la dernière année. Mais ça ne veut pas dire que Cascades a fait des affaires d’or grâce aux rouleaux blancs. La demande pour une foule de produits destinés aux hôtels, aux avions et aux restaurants s’est effondrée, a raconté à La Presse le président Mario Plourde.

Bousculades, tablettes vides, blagues au Bye bye 2020… Même s’il travaille pour Cascades depuis toujours, Mario Plourde ne se doutait pas une seconde en mars 2020 que les consommateurs s’apprêtaient à stocker des rouleaux comme jamais.

Encore aujourd’hui, le phénomène des ruées collectives l’étonne. Parce qu’il n’y a jamais eu, assure-t-il, un risque de pénurie de papier de toilette au Québec. « On n’a pas assez de psychologues à l’interne pour comprendre ! », lance-t-il dans un éclat de rire. La capacité de production a toujours été suffisante. Mais comme « le monde magasine en fonction des annonces du gouvernement » et que l’humain agit beaucoup par mimétisme, les détaillants se sont parfois retrouvés avec des tablettes dégarnies.

Au bout du compte, les ventes de papier de toilette Cascades destiné aux consommateurs ont augmenté de « 15 à 20 % » en 2020. « Tout le monde pense qu’on a fait des fortunes et que ç’a été merveilleux », confie Mario Plourde.

Or, la hausse est plutôt… un déplacement de la consommation. Car bien des livraisons aux hôtels, centres des congrès, restaurants, musées, bureaux et salles de spectacles ont été annulées. « Ç’a été extrêmement difficile. On a eu des baisses de volume de 30 à 40 %, précise le dirigeant. On souffre encore beaucoup, et ça va prendre un certain temps avant que ça reparte. Une fois vaccinés et déconfinés, il faut que les gens aient le goût de voyager… »

PHOTO FOURNIE PAR CASCADES

Quelques exemples de produits destinés aux hôtels, restaurants, centres des congrès, musées, bureaux, etc.

D’ailleurs, pendant qu’on s’arrachait les produits de Cascades dans les supermarchés et les pharmacies, deux de ses usines (Lachute, dans les Laurentides, et Laval) ont dû fermer leurs portes pendant quelques mois, faute de demande. Celle de Laval, qui fabrique notamment des serviettes de table, a repris ses activités en janvier, mais partiellement.

Moins de petits paquets

Mario Plourde explique que les usines qui fabriquent des rouleaux de papier hygiénique destinés aux endroits publics (vendus dans de grosses boîtes) ne peuvent pas du jour au lendemain produire des paquets vendus aux consommateurs (dans des emballages en plastique transparent). Il aurait fallu investir d’importantes sommes pour une situation qui sera temporaire. « C’est marginal, ce qu’on a pu convertir. Peut-être 3-4 %. »

Cascades a tout de même trouvé des astuces pour aider les détaillants à fournir à la demande. Comme la livraison directe aux magasins, plutôt qu’aux centres de distribution.

Pour accroître son efficacité, l’entreprise a réduit de 20 % le nombre de produits dans son portefeuille, une stratégie utilisée également dans l’industrie alimentaire. Cela facilitait la production (pas d’interruption) et le remplissage des camions. « Si, dans un même camion, il faut mettre 12 produits différents, c’est plus long », explique M. Plourde. Évidemment, les gros formats ont été privilégiés.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Du papier hygiénique Cascades

Le même phénomène touche les essuie-tout. Avec le confinement, les Québécois se sont mis à faire beaucoup de ménage, croit Cascades. Selon la firme de recherche NielsenIQ, les ventes d’essuie-tout ont bondi de 23 % en 2020.

Boîtes à repas, cartons d’œufs et plateaux

Le papier hygiénique représente « entre 15 et 20 % » du chiffre d’affaires de Cascades. C’est donc dire que l’entreprise fabrique beaucoup d’autres produits.

Mario Plourde donne l’exemple des boîtes isolantes utilisées par Goodfood et HelloFresh. Les ventes ont bondi de 30 %. Cascades ne « fournissait pas à la demande », si bien que la production est passée de 5 à 7 jours par semaine, notamment à l’usine de Berthierville, dans Lanaudière.

Même scénario en ce qui concerne les boîtes d’œufs. Les ventes ont grimpé en flèche. Selon la firme NielsenIQ, les ventes d’œufs ont augmenté de 18 % en 2020 par rapport à 2019.

« Vous savez, ces plateaux en carton pour transporter quatre verres ? », demande Mario Plourde. C’est un autre produit qui a cartonné avec la hausse des commandes pour emporter dans les restaurants.

C’est sans compter la simple boîte brune en carton, dont les ventes ont bondi « de 6 à 8 % » grâce au commerce en ligne. « On a été très occupés, même après Noël, exceptionnellement, parce que les gens confinés achètent sur l’internet. »

En somme, Cascades anticipe « une légère hausse » de son chiffre d’affaires pour l’exercice clos le 31 décembre. Les résultats seront connus le 25 février. « Il ne faut pas penser qu’on est passés à la caisse », insiste Mario Plourde, tout en précisant que l’entreprise n’a pas refilé des hausses de prix aux détaillants puisqu’« on est commis sur des prix pour des années ».