La montée en popularité depuis quelques années de l’alimentation cétogène ou paléo ainsi que la multiplication des besoins des clients qui cherchent à mettre dans leur panier des produits bios, faibles en sucre ou sans gluten ont incité Metro, après deux ans de recherches, à mettre en place un nouveau système d’étiquetage vert visant à faire ressortir les « attributs » de ses produits.

« C’est vraiment une méthodologie qui est unique. On est la seule chaîne au Canada actuellement à présenter [les produits] de cette façon-là, à énoncer les attributs », affirme Martin Turcotte, vice-président à la mise en marché de Metro. Impossible toutefois de connaître le coût de ce nouveau projet.

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Près de 9000 produits ont ainsi été étiquetés visant afin de faire ressortir leurs « attributs ».

Ainsi, dans l’allée des conserves, par exemple, on peut lire « source de fer » sous les boîtes de pois chiches. Plus loin, sous les emballages de craquelins canneberges et graines de citrouille, les clients peuvent voir l’étiquette verte portant les termes « Naturel » et « Grains anciens ». Près de 9000 produits ont ainsi été étiquetés. Les adeptes de l’épicerie en ligne peuvent également faire le même repérage. L’étiquetage vert est aussi visible dans les publicités (circulaires).

Si, selon l’épicier, l’objectif premier du guide appelé Mieux choisir mieux vivre est de faciliter la vie aux clients qui arpentent le supermarché en leur permettant de repérer rapidement les produits dont ils ont besoin, l’exercice pourrait s’avérer étourdissant pour les consommateurs déjà bombardés par un nombre important de logos et d’étiquettes, estime pour sa part Jordan LeBel, professeur titulaire en marketing alimentaire à l’Université Concordia.

Comment ça fonctionne ? « Tous les produits du magasin qui ont un code UPC [code à barres] ont été passés au peigne fin », explique Martin Turcotte. Préalablement, une équipe de spécialistes de chez Metro, la nutritionniste Linda Montpetit ainsi que la firme SPINS ont établi une liste de 50 attributs recherchés par les clients : bio, source de fer, faible en FODMAP, sans sucre, sans OGM, végane… Avec l’algorithme de SPINS, chaque produit a été analysé en fonction de son tableau nutritionnel et de ses ingrédients. Le système a ensuite permis de lui accoler une caractéristique (attribut). Celle-ci a été apposée dans les étagères, sous forme d’étiquette verte, à côté du prix.

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Martin Turcotte, vice-président à la mise en marché de Metro

Il y a une très grande fragmentation des besoins qui s’est opérée dans les dernières années. Les besoins sont changeants, les gens suivent toutes sortes de diètes, d’autres ont des conditions.

Martin Turcotte, vice-président à la mise en marché de Metro

Selon les chiffres répertoriés par son équipe, près de 600 000 recherches seraient effectuées mensuellement sur le web au Québec en lien avec un régime ou un mode de vie alimentaire.

« Ce n’est pas toujours évident de lire les étiquettes, rappelle Martin Turcotte. L’idée était de simplifier la lecture pour que les gens puissent faire des choix qui sont en lien avec leurs besoins. »

Trop de logos ?

Mais avec l’abondance de logos et d’affichages – bio, aliments du Québec, premier choix des consommateurs – déjà présents sur les boîtes de barres tendres, de céréales et autres emballages de quinoa, le consommateur risque-t-il plutôt de s’y perdre et de ne plus savoir à quelle information se fier ?

Jordan LeBel, spécialiste en marketing alimentaire, est très sceptique devant « cette tendance à mettre des logos partout, des certifications, des emblèmes à droite et à gauche ».

« Les gens sont fatigués de voir des logos, lance-t-il sans détour. Des logos alimentaires, il en existe plus de 450 dans le monde. À un moment donné, on en vient un peu fatigué. À quoi va ressembler l’expérience client ? »

M. LeBel se demande également comment vont réagir les manufacturiers qui font des pieds et des mains pour attirer le regard des clients sur leurs produits.

À partir du moment où on complexifie l’environnement d’achat, il y a plus de stimulus. Il y a des petites étiquettes jaunes, vertes, véganes, bios… Moi, manufacturier, j’ai deux secondes pour attirer l’attention du client sur mon produit. Je vais être obligé de compétitionner avec plus de stimulus. Qu’est-ce que ça va vouloir dire pour moi, pour mes efforts de mise en marché ?

Jordan LeBel, professeur titulaire en marketing alimentaire à l’Université Concordia

Ayant elle-même collaboré au projet de la chaîne, Linda Montpetit, diététiste-nutritionniste et consultante pour Metro, croit au contraire que les étiquettes vertes apporteront de l’éclairage aux consommateurs qui ne savent pas toujours quels produits déposer dans leur panier. « La simplicité de tout ça, c’est que ce n’est pas sur l’emballage, soutient-elle. C’est quelque chose que l’on voit rapidement. C’est un système de repérage qui est beaucoup plus rapide sans avoir à décortiquer chacune des étiquettes. Ça va accélérer le choix alimentaire. »

« Des fois, on va avoir des aliments qui sont végés, mais il y a de la poudre de lait dedans, cite-t-elle en exemple. Si tu es végane, ça ne t’intéressera peut-être pas. C’est quelque chose qui est [normalement] très difficile à repérer en magasin juste en regardant les différentes tablettes. Avec des attributs très visibles, je n’ai pas besoin de me casser la tête. »

Pas nécessairement santé

Par ailleurs, en plus de donner par exemple, l’attribut « sans gluten » à un paquet de vermicelles de riz et « sans OGM » à un petit pot d’humus, cette nouvelle façon d’étiqueter se retrouve aussi accolée à des produits comme de la bière à laquelle on associe le qualificatif « Bio » dans le cas de la Molson Coors Organic et sur les boissons énergisantes Red Bull étiquetées avec le terme « sans sucre ». Or, ces articles ne sont pas reconnus comme étant santé.

« C’est vraiment pour guider les gens à travers leurs préoccupations, précise la nutritionniste. Par exemple, si je tiens absolument à manger bio et que j’ai le goût d’une bière, peut-être que ça va m’intéresser de savoir que ça existe, une bière bio, parce que je vais en boire de toute façon, de la bière. »

« À la base, ce n’est pas un programme qui vise à dire aux gens : “si vous suivez toutes ces étiquettes-là, vous allez manger santé” », explique Mme Montpetit.